Enseigner la Révolution française à l’école primaire, au collège ou au lycée est parfois vu comme un redoutable défi. Parmi les questions qui surgissent de suite, il y a l’équilibre à trouver sur les multiples événements. Cet ouvrage est porté notamment par la Société des études robespierristes. Il est dit dès l’introduction l’objectif d’une telle entreprise, à savoir proposer en quelque sorte un livre du maître au fait de l’historiographie la plus récente sur la période.

Accompagner le professeur

Il y a donc la volonté, non pas d’offrir des séquences clés en mains, mais plutôt un accompagnement pour créer sa propre trame. Il y a donc des dossiers qui sont des documents avec des propositions d’exploitation déclinées en école primaire, collège et lycée. Précisons cependant qu’aucun corrigé n’est fourni. Le questionnement de type lycée invite à croiser les documents et est moins guidé que les autres. Pour l’école primaire, un ou deux documents du dossier sont parfois privilégiés pour être l’objet de questions. Parfois il n’ y a pas de questionnement du tout. Une petite bibliographie conclut chaque chapitre. Avec l’arrivée de nouveaux programmes en collège, l’ouvrage pourra donc aider l’enseignant à traiter de « La Révolution française et l’Empire : nouvel ordre politique et société révolutionnée en France et en Europe ».

Le discours scolaire sur la Révolution française

Dans cette première partie, quatre chapitres sont proposés avec tout d’abord l’historiographie face à l’histoire enseignée de 1989 aux années 2000. Encore plus que sur d’autres sujets, on ne peut pas faire l’impasse sur le lien avec l’enseignement scolaire. La matrice républicaine détermine depuis longtemps la lecture de la Révolution française. Celle-ci a connu un renouvellement profond de son historiographie. Il y a eu un emballement autour de 1989, mais son succès ne s’est jamais démenti. Les auteurs passent ensuite en revue les différents programmes. Les manuels scolaires traduisent à leur manière les changements historiographiques. Parmi les questions qui reviennent, celle de la temporalité d’un tel événement ou encore la place à accorder aux acteurs. Cela est d’ailleurs pointé comme une dérive et le chapitre évoque l’hyperpersonnalisation du discours scolaire sur la révolution française.

Les temps forts de la Révolution française et de l’Empire

Il s’agit là de cinq chapitres qui déroulent le cours des événements de la révolution entre 1789 et 1815. On dispose à chaque fois d’un texte qui dit ce qu’il faut savoir sur la période, puis de plusieurs dossiers pour accompagner le thème. Citons par exemple pour le chapitre 1789-1792 un dossier sur le 14 juillet 1789, un autre intitulé « la France révolutionnée » qui cadre parfaitement aux termes du nouveau programme de cycle 4. Un autre dossier envisage la question de « La chute de la monarchie ». Dès le début, le texte précise bien la relecture de cette période en soulignant, qu’au début, Louis XVI est proclamé restaurateur de la liberté française. Méfions-nous donc de toute vision téléologique et insistons auprès des élèves sur cet aspect qui invite à réintroduire la part d’incertitude dans l’histoire. Les chapitres suivants passent en revue les grands moments de la Révolution et apportent rectifications, précisions ou nuances selon les cas. Le livre propose de nombreux documents plus ou moins connus et sur des thématiques très variées. A charge au professeur d’en faire un choix raisonné au risque d’exploser les recommandations horaires pour traiter une telle question. En effet et c’est peut-être un paradoxe, le livre étant très riche, il faut absolument le digérer au service de nos enseignements. Sur Napoléon, le résumé proposé est pertinent et ne se contente pas d’un récit mais propose en quelque sorte une problématisation en se demandant s’il s’agit d’une dictature moderne. Il convoque aussi le concept de culture de guerre pour appréhender la période.

La France révolutionnée

Cette troisième partie se déploie sur cinq chapitres et une soixantaine de pages pour aborder cette idée par thèmes maintenant que le cadre chronologique a été posé dans la deuxième partie. On peut noter particulièrement un chapitre sur les origines de la laïcité à la française. Parmi les autres points abordés pour montrer les changements, la question de l’invention de la politique, de l’armée et la guerre, de la Terreur et des guerres intérieures ou encore du culte civique et la déchristianisation.

Acteurs et groupes en révolution

Honneur aux femmes avec trois portraits de femmes prolongés sous forme de dossiers ensuite. Ensuite, trois figures masculines sont abordées avec Louis XVI, Robespierre et Bonaparte. A propos du roi, on peut relever trois dossiers dont un consacré à son caractère. Il s’appuie notamment sur les mémoires de madame Campan ou sur le journal de Jean-Baptiste Cléry. Une autre partie permet de passer en revue des aspects comme la question du peuple ou encore la question de la bourgeoisie. On retrouve une approche centrée sur les femmes qui complète donc les portraits abordés dans la partie précédente. On fera aussi le point sur la question de la traite, sur l’esclavage et sur les abolitions.

Parcours artistiques et littéraires sur la Révolution française et l’Empire

Ce chapitre est particulièrement utile dans une logique d’Histoire des Arts. Il y a cinq chapitres et on signalera particulièrement une contribution sur « Histoire, bandes dessinées et mangas » ainsi qu’une autre sur la Révolution française à l’écran.

C’est donc un ouvrage très complet et qui propose un angle original, à savoir parler des renouvellements historiographiques tout en se penchant sur l’histoire scolaire. Un précédent ouvrage de la même collection avait fait de même avec la question des femmes. A chaque professeur ensuite de dompter la masse de documents proposés pour choisir ceux qui lui semblent les plus adaptés à son cours. Un accompagnement est proposé sur Cliolycée.

© Jean-Pierre Costille pour les Clionautes