Autre approche que celle de Florence Rudolf , la collection 360° se veut plus détaillée et repose sur le principe d’une conversation entre les auteurs animée ici par Isabelle Joncour, maître de conférences en astrophysique à l’Université Grenoble 1. Sur ce volume, trois chercheurs (un glaciologue – Jérôme Chappellaz, un économiste – Olivier Godard et Hervé le Treut – célèbre climatologue) et un journaliste (Sylvestre Huet – de Libération) sont réunis.

Le livre se divise en deux grandes parties : le débat scientifique et le débat citoyen. On appréciera la présentation personnelle des auteurs de même que leurs pistes de lecture commentées. Tout comme l’ouvrage de la collection « Engagé-é-s », les citations en pleine page apportent de repères précieux pour le rythme de lecture.

L’entame se fait sur la distinction climatologie/météorologie qui génère souvent la confusion sur le côté imperceptible au quotidien du changement climatique, le public ne retenant que des manifestations exceptionnelles, des hivers froids par exemple.

La question de savoir si la climatologie est une science prédictive est posée ensuite. Là, trois échelles temporelles sont citées : à 10 jours pour étudier l’atmosphère, à quelques mois pour étudier les océans et les températures et à bien plus long terme pour voir s’il y a un surplus d’énergie…qui doit bien être redistribué…

De même, les températures et les précipitations ne sont pas les seuls indicateurs de repérage du changement climatique, les « proxies » constituant des mesures indirectes précieuses, tel que le dépôt de sédiments par exemple. Le lien entre CO2 et température est plus subtil qu’un simple accroissement « juxtaposable ».

Avec un vocabulaire nécessairement plus technique, les auteurs détaillent ensuite les techniques de la spectroscopie, de modélisation avant d’en venir à la présentation du GIEC, organisme répondant à une demande politique et nécessitant de faire consensus. Les ratés de communication ne sont pas inévitables comme le prouve l’exemple de l’erreur sur la prévision de la fonte des glaciers de l’Himalaya en 2035 réfutée depuis.

Plus abordable pour nos sciences humaines et sociales, la seconde partie s’ouvre avec un « passage obligé par le climato-scepticisme ». La technique de brouillage des sceptiques si efficace est décryptée. Ces auteurs fortement médiatisés comme Claude Allègre ou Vincent Courtillot ne retiennent qu’un paramètre des modèles et théories pour appuyer leur discours mais l’erreur serait d’imputer à eux seuls le phénomène du scepticisme… qui le nourrirait encore plus… d’autres acteurs étant impliqués. La formation à la psychologie du changement climatique semble un véritable enjeu de demain.

La question de la hiérarchisation des priorités est aussi pointée : les ours polaires oui, mais les enfants au Sahel d’abord. Idem pour Tuvalu, la disparition d’un Etat est emblématique mais tant d’autres territoires sont potentiellement plus touchés.

Les aspects économiques doivent, pour avoir des effets à long terme, reposer sur des décisions urgentes (taxation, changement du mode de vie…) alors que l’explosion des prix du pétrole ne laisserait comme alternative que le charbon ? La capture-séquestration du CO2 serait un levier vital.

L’ouvrage se clôt sur le fait que les gouvernants traitent l’urgence et d’autres dossiers… « Quand on a la croissance, il faut tout faire pour la conserver, donc ce n’est pas le moment de s’occuper d’environnement ; quand on ne l’a pas, il faut tout faire pour la retrouver et ce n’est donc pas non plus le moment de s’occuper d’environnement ». La prise de confiance dans le GIEC apparaît indispensable pour les auteurs.

Bienvenue dans la Cliothèque donc et longue vie aux éditions « La ville brûle » dont la qualité de présentation et la liberté de parole des auteurs se doivent d’être saluées.