Armand Colin édite un nouvel opus consacré à la géographie urbaine dans la récente collection PORTAIL (dirigée par Magali REGHEZZA-ZITT). Celle-ci « ne propose pas une vision exhaustive […] mais des clés pour l’acquisition d’un questionnement, d’un vocabulaire, de connaissances et de méthodes spécifiques ». Sur un thème aussi vaste, investi par de nombreux géographes sur plusieurs décennies, la mission peut paraître difficile. Elle est relevée par Pascale NEDELEC, docteur agrégée en géographie, enseignante à l’Ecole Normale de Paris.

L’introduction permet de poser les bases et tout d’abord de répondre à la question « qu’est-ce qu’une ville » ? ». La définition n’est pas simple car les critères varient dans le temps et dans l’espace. La diffusion de l’urbanisation à l’échelle mondiale la complexifie encore davantage entre homogénéité et hétérogénéité. Pour les géographes, la ville se caractérise par l’association de la densité et de la diversité. Elle polarise et organise les territoires qui l’entourent. Dès les années 1970, ils préfèrent toutefois utiliser le terme d’urbain davantage pertinent pour appréhender l’augmentation de la population et l’expansion des villes. On parle alors de transition urbaine, de taux d’urbanisation, de (dé)croissance urbaine, d’étalement urbain, de péri-urbanisation. Certaines villes, les métropoles, sont aujourd’hui les territoires privilégiés de la mondialisation. Cette métropolisation est à l’origine de nouvelles dynamiques : gentrification, ségrégation, fragmentation.

La partie Cours est divisée en 7 chapitres :

Le chapitre 1 (Une urbanisation généralisée à l’échelle mondiale) présente l’inégal avancement de l’urbanisation à l’échelle mondiale entre des Nords et des Suds. La transition urbaine est en effet inégalement aboutie. On constate encore des décalages dans le temps entre les grandes régions de la planète. L’étude de cas sur l’urbanisation de l’Afrique montre le retard du continent en même temps que la croissance rapide de ses principales aires urbaines et les défis qu’elles doivent affronter.

Le chapitre 2 (La répartition des villes dans l’espace) aborde les notions essentielles de site, de situation, de semis urbain, de réseau, de système de villes. La loi classique de ZIPF ou la théorie ancienne des lieux centraux de CHRISTALLER sont expliquées. L’étude de la localisation, de la distribution, de la répartition spatiale, de la hiérarchie des villes est au cœur de la géographie urbaine. La capacité de polarisation, mesuré par le degré de centralité des villes, devient essentielle.

Le chapitre 3 (Centralités et périphéries urbaines en recomposition) décrit les différents territoires urbains et les relations centre-périphérie. Le centre-ville apparaît comme l’apogée de la centralité urbaine. La multiplication des gratte-ciel dans les quartiers des affaires mesurée par l’indice de verticalité des villes est le symbole du rayonnement international de certaines métropoles. Parallèlement, les villes s’étalent (conurbation, mégalopole). Les périphéries s’affirment comme le lieu de vie de la majorité des citadins. Les espaces périurbains sont de plus en plus hétérogènes. Des centralités hétérogènes y apparaissent (edge cities), bousculant la traditionnelle organisation centre-périphérie. L’étude de cas sur Bangalore en fournit un exemple.

Le chapitre 4 (Une hiérarchie urbaine dominée par les métropoles) analyse particulièrement le phénomène de la métropolisation, entendu comme « le processus de concentration de populations, d’activités, de capitaux et de valeurs dans des villes qui concentrent des fonctions de commandement de rayonnement international, qu’on appelle les métropoles« . Olivier DOLLFUS parle d’archipel mégalopiltain mondial, Ludovic HALBERT d’avantage métropolitain. Le classement de ces métropoles pose problème. Pour Saskia SASSEN, les trois principales sont New York, Londres et Tokyo : les global cities.

Le chapitre 5 (Habiter en ville) explore les concepts d’urbanité et citadinité et aborde donc les principales caractéristiques de l’habiter en ville. Les espaces publics peuvent alors apparaître comme des lieux de rencontre ou d’évitement selon notre façon d' »habiter » ces lieux. L’exemple du Bois de Vincennes à Paris est à cet égard saisissant.

Le chapitre 6 (Villes et inégalités socio-spatiales) s’intéresse « à la division sociale de l’espace , c’est-à-dire à la distribution spatiale des groupes sociaux, caractérisés par leur niveau économique, leur origine géographique, leurs pratiques linguistiques ou religieuses ». Les ghettos sont des exemples de ségrégation et de fragmentation urbaines, tout comme le processus de gentrification. Les communautés fermées (gated communities) se multiplient dans toutes les villes du monde.

Le chapitre 7 (Utopies et cauchemars urbains) propose une réflexion sur les utopies et dystopies urbaines de l’île d’Utopia selon Thomas MORE, à la ville industrielle fictive de Coketown par Charles DICKENS en passant par Le CORBUSIER ou les villes contemporaines des films et séries télés. Cette géographie plus culturelle nous informe alors sur les représentations et imaginaires de la ville.

Dans la partie Méthodes, une dissertation corrigée sur la ville et le développement durable est proposée. Une carte topographique de Brest-Point de Saint-Mathieu est analysée. Un paysage de Pyongyang en Corée du Nord est commenté. Un article de presse sur des bidonvilles de Buenos Aires est étudié.

La collection PORTAIL porte bien son nom. Elle permet d’entrer dans un thème fort de la géographie en se concentrant sur les notions essentielles, les concepts centraux tout en donnant des définitions nombreuses et précises des principaux termes et en identifiant les auteurs à connaître. Elle est tout logiquement destinée aux étudiants de Géographie en Licence. La géographie urbaine est également présente dans l’enseignement secondaire au collège (programmes de 6e, de 5e, de 4e et de 3e) et de lycée (programmes de Seconde, Première et Terminale). Ce nouveau volume sera donc très utile aux enseignants pour une remise à jour rapide (en utilisant les encarts « à retenir » et les « entraînements ») mais efficace (des références bibliographiques limitées permettent d' »aller plus loin ») mais aussi pour préparer des « études de cas » pour les élèves.