Prestigieux historien de référence dans le champ des études napoléoniennes, Jean Tulard est un habitué des Rendez-vous de l’Histoire de Blois. A l’occasion de l’édition 2011 de cet événement, il a très cordialement accordé un entretien aux Clionautes le samedi 15 octobre, lors de la séance de signature de son dernier ouvrage : «Talleyrand ou la douceur de vivre» (Bibliothèque des Introuvables, 2010, 213 p.).

La Cliothèque : Ce bel album illustré revisite un personnage très fréquenté par l’historiographie napoléonienne. D’où vient le succès de cette « vedette » de l’histoire napoléonienne ?

J.Tulard : On doit à son premier biographe, Georges Lacour-Gayet, une heureuse formule à double sens : «Talleyrand s’est toujours bien vendu…» Effectivement, Talleyrand a particulièrement attiré le public et inspiré les biographes. Le plus récent est Emmanuel de Waresquiel, auteur de deux importants ouvrages à son sujet. L’abondance de la production inspirée par Talleyrand ne le cède qu’à celle suscitée par Napoléon ! Son succès éditorial est très supérieur à celui d’un autre célèbre acteur équivoque de la période, Joseph Fouché. Tous deux sont des figures négatives mais, si Talleyrand est un personnage profondément corrompu, qui incarne et entérine l’échec stratégique de la France au Congrès de Vienne, il est tout de même sympathique et il séduit par son style de vie.

La Cliothèque : Précisément, quelle est cette «douceur de vivre» à laquelle fait référence le sous-titre de votre ouvrage ?

J.Tulard : Talleyrand était aussi réputé pour son art de vivre que pour son esprit. Il avait été surnommé le « Prince des gastronomes » et était un œnologue averti. Sa table était célèbre dans toute l’Europe. C’était également un grand amateur de femmes, et un personnage sensible aux arts et à l’architecture. Le Talleyrand homme privé était un être raffiné et épris de luxe qui a su vivre agréablement, à Paris comme non loin d’ici dans son château de Valençay !

La Cliothèque : Quel agrément particulier trouvez-vous à fréquenter un événement tel que les Rendez-vous de l’Histoire ?

J.Tulard : Pour un écrivain, rencontrer le public est un contact d’autant plus nécessaire que cela permet un échange inexistant à la télévision, où on est vu sans pouvoir être interrogé. Ce n’est pas un geste commercial mais un moyen d’entretenir ce lien direct avec le public et de cheminer ensemble vers le futur. C’est aussi un cadre de rencontre professionnelle. Enfin, il est agréable de retrouver à Blois le charme propre à la province !