Le documentaire diffusé sur France 3, et toujours visible en vod sur la plateforme D-Day, http://www.france3.fr/emissions/thalassa/d-day/ , a donné lieu également à cette publication qui reprend une partie des informations données dans ce reportage.

Il est structuré en trois axes qui abordent à la fois des informations générales et des flashs sur des aspects précis. Dans l’introduction, les auteurs rappellent qu’il a donc fallu inventer des solutions pour ce débarquement et qu’il ne faut pas oublier qu’il dura jusqu’en décembre. Trois millions de soldats transitèrent par la Normandie.

Opération Neptune

Il fallait tout prendre en considération pour mener et réussir une telle opération dont la météo. On sait maintenant que l’opération prévue initialement le 5 juin fut repoussée d’un jour, mais qu’il était difficile d’attendre plus longtemps à moins de différer beaucoup plus le débarquement. La marée montante à l’aube dégageait suffisamment la plage « pour que les obstacles placés par les Allemands soient visibles », mais pas trop « pour que les soldats n’aient pas à couvrir une trop longue distance sous le feu ennemi ». Le débarquement fut exceptionnel à de nombreux titres et d’abord par la mobilisation industrielle incroyable des chantiers navals. Entre 1942 et 1945, les Etats Unis ont fabriqué 170 000 avions, 90 000 chars et 65 000 bateaux de débarquement ! Ces chiffres ne doivent pas faire oublier la diversité des engins fabriqués qui eurent tous leur importance. Le plus grand risque pour les soldats était de se noyer avant de toucher la plage. Le débarquement fit 6 % de victimes, soit moins que ce que prévoyait les chiffres des états majors. Il faut donc redire l’importance de la logistique dans une telle opération : l’essence, la nourriture étaient évidemment essentielles, même si ce point est peu souvent évoqué à propos du débarquement.

Un défi archéologique et technique

C’est le mot qui s’impose à plusieurs titres. Les équipes et moyens réunis sont impressionnants, mais le livre a le bon goût de ne pas trop s’attarder sur cette armada technique et préfère justement concentrer son propos sur les résultats. Premier défi à souligner : celui d’inventorier environ 350 épaves, là où d’habitude ces spécialistes se mettent en quête d’un navire et d’un seul. Le livre propose aussi des flashs sur certains bateaux comme le Léopoldville. Ce bateau achemina entre juin et décembre 1944 plus de 50 000 soldats. Lors de sa vingt-cinquième traversée, il fut touché par une torpille et coula. George Bigelow survécut à cette attaque et on le retrouve sur les lieux, soixante dix ans après. L’ouvrage alterne photographies d’époque et images de reconstitution ainsi que certaines actuelles qui témoignent du fait que cette exploration archéologique fut aussi une aventure à dimension humaine. Le livre est donc entrecoupé d’entretiens avec des spécialistes ou des témoins de cet épisode. Les pages promotionnelles sur l’exploit technique et le soutien de Dassault sont réduites au minimum.

Le premier port artificiel en eaux profondes

Les Mulberries sont ces ports artificiels qui permirent le débarquement des troupes et du matériel. En juillet cela représenta pour le Mulberry B environ 200 navires par jour et 4 millions de tonnes de matériel. Des images d’époque couplées à des images de synthèse permettent de visualiser ce port artificiel assemblé sur place en deux semaines ! Le livre développe aussi des cas moins connus comme les caissons Phoenix. Ceux-ci atténuaient la houle et facilitaient le déchargement des navires. Ils existent aujourd’hui encore sous forme de vestiges. L’ouvrage permet aussi de faire resurgir des faits oubliés comme cette tempête entre le 19 et 21 juin qui endommagea les Mulberries. Cela aurait pu sérieusement compromettre la suite des opérations. Quelques aspects techniques sont brièvement abordés car il fallait concevoir des ponts flottants assez solides pour supporter un tank de 38 tonnes mais rester flexible pour s’adapter aux mouvements de la mer : sacré défi !

Des innovations technologiques au service de la victoire alliée

Les barges LCVP eurent un rôle essentiel à ne pas oublier. Ces bateaux permettaient d’approcher des côtes et de débarquer rapidement un maximum de soldats. Leurs héritières sont d’ailleurs toujours utilisées aujourd’hui. Beaucoup furent construites en bois pour des raisons de coût, ce qui implique des problèmes de conservation pour aujourd’hui. Ici, la reconstitution virtuelle trouve tout son sens car elle permet de reconstituer dans le moindre détail ces barges et cela permet de comprendre l’ingéniosité technique avec, par exemple, l’existence d’un deuxième safran qui leur permettait de repartir vite au large. Le livre évoque aussi les Waco, ces planeurs discrets et silencieux. Il aborde également le dukw et le duplex Drive Tank. Celui-ci ne fut pas vraiment un succès. En effet ce bateau n’était viable que dans une mer calme et, face aux conditions climatiques, il eut tendance à être submergé, rendu peu maniable, il coula. On est donc loin d’une histoire uniquement héroïque et lénifiante. L’ouvrage se termine par une interview de Jim Booth. Il faisait partie des cinq personnes qui observaient depuis un sous-marin les côtes avant que ne soit lancé le débarquement. Celui-ci est retourné sur les lieux et a pu replonger avec les moyens modernes.

Ce bel ouvrage alterne de façon équilibrée aventure humaine, défi technique et mémoire de l’histoire. Il donne envie de prolonger l’étude avec les moyens proposés par la plate-forme, y compris sous forme ludique avec http://www.reseau-canope.fr/d-day/lexperience-interactive.html et pour nos cours http://www.reseau-canope.fr/d-day/lespace-pedagogique.html

© Jean-Pierre Costille, Clionautes.