Adèle Jolivard est une jeune illustratrice qui, après un master d’architecture obtenu à l’école d’architecture de Bordeaux, est partie à Bruxelles, à l’Académie royale des Beaux-Arts, pour se tourner vers l’illustration. Elle publie un certain nombre de dessins pour des revues comme Hors-Cadre ou le journal Erratum. Un petit jeu de piste est son premier album pour enfants.

Il se présente dans un format moyen (20 x 22 cm) et comporte 15 double-pages. Le trait d’Adèle Jolivard semble subir plusieurs influences : on peut y reconnaître quelques traces d’André François, de Magalie Le Huche ou encore de Kitty Crowther. La narration emprunte aussi bien à la mise en page de l’album pour enfants moderne qu’à la bande dessinée contemporaine, usant d’une typographie mécanique pour la narration externe et d’une typographie manuelle pour les dialogues entre les personnages.

L’histoire est somme toute assez simple : Monsieur Rat veut savoir ce qu’il y autour de lui et décide d’aller rencontrer les autres animaux du zoo en demandant à chacun de dessiner sa maison sur une grande feuille afin d’établir le plan du zoo. Quelle n’est pas la surprise du lecteur de découvrir dans les dernières pages qu’en fait les différents personnages du zoo sont des figurines avec lesquelles un enfant joue. Il a construit sur le tapis jaune de sa chambre une maquette du zoo avec divers éléments récupérés çà et là sur ses étagères et parmi ses jouets. Toutes les figurines ont été placées alignées en bord de tapis face à un monde qu’il leur appartient de découvrir.

À travers cette histoire, Adèle Jolivard explore le monde de l’enfance et notamment ce qui se joue lorsque l’enfant joue. Plongé dans une sorte de mimesis, il joue avec l’espace, construit des histoires, du récit qui structure son espace imaginaire. Dans cet album, il est question de carte pour découvrir et s’approprier l’espace du tapis-zoo, il est question de maison-habitation, d’umwelt pour chacun des animaux du zoo imaginaire. Le rat vit sous un arbre, dans un terrier multi-cellulaire, la tortue dans une rivière, l’ours blanc au sommet des montagnes, le coq dans sa cage dorée, etc.

Là où les animaux, objets transitionnels de l’enfant, s’emploient à dessiner une carte du territoire dans lequel ils ont à évoluer, le tapis de la chambre ; l’enfant, démiurge, s’invente un territoire imaginaire qu’il domine par sa miniaturisation, qu’il aménage et dans lequel il fait évoluer ses jouets.

Cet album témoigne d’une bonne connaissance de l’enfant, de ses besoins de structurer l’espace qui l’entoure, de le représenter pour mieux le pratiquer. Même si l’histoire, bien construite, manque de rebondissements, le sujet est maîtrisé et saura être un excellent medium pour aborder l’espace et ses représentations avec des enfants de Moyenne Section de Maternelle ou plus.