La joie de Lire présente le premier ouvrage de deux sœurs sud-coréenne, Joo et Kyung  Jin. La première est écrivaine, la seconde illustratrice. Chez nous est une adaptation d’un album paru en 2015 en Corée, sous le titre Ma maison. Le titre, qu’il soit français et coréen, est à lui seul un horizon d’attente dans typographie. En effet, à travers le lettrage, transparait un paysage qui rappelle les territoires d’origine des animaux sauvage figurant alignés sur la couverture.

            Les deux premières pages sont ainsi programmatiques. « Nous vivons ici. » dit le texte. Ici, c’est une ville sous la grisaille. C’est un zoo au milieu des buildings qui, se découvre aux pages suivantes comme un écrin de verdure au milieu de la grisaille. Onze pavillons aux aspects fantaisistes annoncent les différents animaux accueillis par le zoo : des girafes, des paons, des blaireaux, des loutres, des guépards, des singes, des lions, des caméléons, des suricates, des éléphants et des paresseux. Pour chacun de ces animaux, les pavillons qui leur sont destinés semblent avoir été « adaptés ». En fait d’adaptation, il s’agit surtout de formes d’habitations humaines se rapprochant du mode de vie des occupants capturés.

            Sur chacune des double-pages représentant l’intérieur des pavillons construits par l’homme pour les animaux du zoo, on trouve un oisillon accompagné de son double en jouet, immobile et inanimé. Partout dans ces double-pages aux illustrations douces, partout dans ces situations ridicules, vient s’opposer la liberté de l’oisillon et son double emprisonné. « C’est leur maison…. Vraiment ? » alerte l’avant-dernière page avant de s’ouvrir sur un vaste panorama évoquant l’habitat d’origine des animaux enfermés dans le zoo : « Chez nous, ce n’est pas ici. C’est ailleurs ».

              Avec une certaine subtilité, l’album insiste sur l’importance du respect du droit des animaux à vivre dans un habitat conforme à leurs besoins spécifiques. L’habitat humain n’est pas l’habitat animal. Sans doute faut-il voir dans ce premier album des sœurs Jin une sorte de manifeste pour défendre le droit des animaux à disposer d’eux-mêmes ? Un premier album très réussi qui invite le lecteur à attendre avec impatience les prochains.