La campagne de Pologne
Ministère de la propagande du IIIe Reich
Ce film présenté par l’ECPAD dans la collection archives inédites est absolument remarquable et permet, quel que soit le niveau de classe de présenter, en plus des débuts de la seconde guerre mondiale, les ressorts de la propagande.
Les images sont soignées, les montages et notamment les cartes, remarquablement présentés et on imagine bien comment, diffusé dans les salles de cinéma allemandes, ce film a pu faire croire aux allemands que le Reich, en «subissant les provocations polonaises» était dans son bon droit le 1er septembre 1939. Dans la genèse du conflit, soigneusement expliquée du point de vue allemand, les commentaires vont même jusqu’à défendre les droits des juifs, minorité nationale opprimée par les polonais depuis 1921. La puissance de l’armée polonaise est présentée comme irrésistible et, seul le courage des SA retranchés à Dantzig permet de ramener dans le Reich cette terre allemande depuis les chevaliers teutoniques !
Les cartes de l’offensive allemande et le déploiement permettent assurément de présenter les ressorts de la blitzkrieg, y compris les tirailleurs motocyclistes, souvent oubliés dans les récits sur la seconde guerre mondiale. L’état-major allemand en avait largement compris l’utilité, bien avant les chefs militaires alliés.
On pourrait aussi présenter ces plans de scènes de déploiement dans des écoles de cinéma et certainement dans CinéHG, tellement ils sont soignés et dynamiques ? L’alternance des gros plans et des travellings latéraux donnent une dimension épique à cette campagne de Pologne, tandis que le commentaire en voix off, sous titré sur le DVD, présente le rôle de la Wehrmacht, reconstruisant les ponts détruits par les Polonais. Ces ennemis ne sont d’ailleurs pas visibles pendant les premières séquences, seules leurs destructions sont largement montrées par des travellings avant, montrant des scènes de désolation, imputées forcément au camp adverse. Les polonais détruisent leur propre pays, tel est le message à retenir !
Les images aériennes présentent aussi de précieux détails sur la guerre moderne et sur l’observation photographique. La qualité des prises de vue montre aussi l’avance technique des usines d’optique de Iéna.
Les amateurs d’histoire de l’armement seront également comblés avec ces vues détaillées de Messerschmitt et de Focke Wulf, un avion polyvalent trop rarement présenté.
On appréciera aussi les images de Stukas, plus classiques, et ces scènes de bombardements qui ont eu les effets destructeurs que l’on sait. Évidemment ces films ne se soucient pas de cohérence. Et lorsque le bilan des attaques est fait, la puissante aviation polonaise a totalement disparu. Elle était créditée pourtant de 1000 appareils au début de la guerre. Ode à la gloire de cette armée allemande ce film souligne « l’état déplorable des routes » tandis que les allemands de souche « libérés » par les soldats du Reich les accueillent avec des fleurs.
Des scènes de liesses dont filmées avec des angles soigneusement choisis permettant de créer un effet de foule. La question est d’ailleurs de savoir où ces images ont été filmées ?
Les prisonniers sont toujours en civil et présentés comme de lâches francs tireurs ayant attaqué des allemands de souche sans défense et on présente même un montre ayant crevé les yeux de soldats allemands blessés. Les allemands sont évidemment respectueux des églises et sortent du sanctuaire de Shostokowa, là où se trouve la vierge noire, en se recouvrant de leur casque.
La kriegsmarine n’est pas en reste et nous dit le commentaire le « pilonnage se poursuit jour et nuit ». Par contre, il semblerait que les cameraman de la marine aient été moins performants que leurs collègues de la Luftwaffe. Les polonais vaincus sont déguisés en civil évidemment, même si la ficelle est grosse.
La présence du Führer sur les lieux est également soigneusement traitée. Toujours ces scènes de liesse et ses effets de foule avant que le dictateur ne partage la gamelle de ses soldats. On reconnaît aussi Goering et Jodl à ses côtés dans le quartier général mobile, un concentré de technologie qui montre évidemment la supériorité du Reich dans ce domaine. La guerre devient alors, dans le commentaire une guerre d’anéantissement tandis que les scènes de reddition apparaissent avec des amoncèlements de casques polonais et de fusils. Des engins de toute sorte sont capturés et on insiste même sur leur provenance française avec ce plan sur une culasse frappée de la marque « le Creusot ». Les colonnes de prisonniers sont filmées en plans larges et en reculant, ce qui en augmente le nombre.
Ici aussi on appréciera les animations sur les cartes qui sont d’une grande clarté et qui montrent le caractère irrésistible de l’avancée allemande vers l’Est.
Von Brautsitsch décerne la Croix de fer à des combattants tandis que l’on annonce le 21 sept. 1939 170 000 prisionniers. Les soviétiques et les allemands font liaison tandis que certains détails notamment d’uniformes montrent également que les allemands ont également été des fournisseurs de l’armée rouge.
La capitulation de Varsovie est précédée d’offres « généreuses » rejetées par les polonais et c’est à leur corps défendant que les allemands bombardent Varsovie. Une fois que les 870 diplomates sont partis, tout de même !
Encore une fois, les images qui ont soixante dix ans sont d’une remarquable fraîcheur. Lors de ce siège de Varsovie, Hitler et Himmler font leur apparition et des maisons polonaises de carte postale sont ensuite détruites. Varsovie capitule le 27 septembre.
Les allemands font 120000 prisonniers qui partent dit-on vers des lieux de rassemblement.
L’impeccable défilé pendant lequel alternent les plans larges de troupes et les cadres resserés sur le Fuhrer donne aussi une idée de la qualité de la mise en scène. La Grande Allemagne vient de s’agrandir encore tandis que sonnent les cloches pour le plan final.
On le voit ici, ce DVD est d’une grande richesse. Il contient des scènes précieuses et rarement vues pour travailler sur la Blitzkrieg et sur des aspects différents de la guerre moderne. Document de propagande soigneusement réalisé, il donne aussi les moyens au professeur de décrypter la puissance évocatrice de l’image, ce qui rend cette réalisation de l’ECPAD parfaitement adaptée aux besoins des CDI et des cabinets d’histoire, s’ils existent encore dans quelques temps… On sait que les moyens horaires qui permettent de les gérer sont destinés à servir de variable d’ajustement dans de trop nombreux établissements…