Présentation
Ce livre est présenté en soutien de l’exposition « le Bain et le Miroir, soins du corps et cosmétiques de l’Antiquité à la Renaissance », organisée par le musée de Cluny -musée national du Moyen-âge, le musée national de la Renaissance -château d’Ecouen et la Réunion des musées nationaux. Réalisé avec la collaboration de la Recherche de L’Oréal et le soutien de la Fondation d’entreprise L’Oréal, les éditions Gallimard présentent ici un recueil dirigé et visé par Isabelle Bardiès-Fronty, Conservateur en chef au musée de Cluny, Michèle Bimbenet-Privat, Conservateur en chef au musée national de la Renaissance – château d’Ecouen mais aussi Philippe Walter, Directeur de recherche au CNRS. 350 pages généreusement illustrées, avec références précises, bibliographie, reliure de qualité, finition or fin. On découvre d’abord des textes de différents auteurs sur des thèmes tels que le bain, la toilette, les appartements, les fards ou les cosmétiques. Par la suite, un catalogue, richement illustré et étoffé de descriptifs agréablement rédigés, qui présente les documents visibles dans les différents musées de l’exposition. Une pointe de culture scientifique permet de connaître les techniques récentes d’investigations utilisées dans les laboratoires de haut niveau.
Qualité du travail effectué.
Reconnaissons le d’emblée, de part les différents intervenants, ce livre appelle au plus profond respect. La couverture épaisse, la finition de qualité, la mise en page travaillée incitent à un minimum de concentration avant de prolonger la découverte. Première interrogation, comment a-t-on pu consacrer un document de cette envergure sur le seul sujet du « bain et du miroir » ? Les premières pages permettent de répondre, au plus vite, à nos interrogations. En effet, la précision des écrits nous envoie immédiatement dans l’Antiquité, nous fait sentir tous les arômes de cette époque, tous les enjeux aussi. Les illustrations, nombreuses, touchent notre imaginaire, et on se croit volontiers observateur privilégié de scènes aussi bien pudiques qu’interdites, celles qui se déroulent dans la salle de bain. Et l’intérêt de naître, une envie forte de tourner les pages car les enjeux sont vite mis en évidence : à travers les attitudes, les objets, les lieux, le bain devient un outil de compréhension de l’Histoire. Le social transparaît immédiatement, la relation aux autres, la place de la femme dans la société, la religion, le culte du corps, la sexualité, l’architecture de l’habitat. Autant de sujets divers et variés que l’on a souvent du mal à lier.
Et le miroir ?
Objet encore utilisé de nos jours mais loin d’être essentiel, quoique…Il est présent dans de nombreux tableaux, accompagnant souvent la nudité de la femme. Il est hautement symbolique, souvent comme métaphore de la connaissance et attribut de la vanité. Il accompagne souvent un hédonisme raffiné et, les nombreuses photos issues des musées le confirment, fait l’objet d’un renouvelement incessant, dans sa taille, ses matériaux, ou sa forme. Il contraste souvent avec les symboles colportés par la nudité, fécondité et beauté, et amène à la réflexion sur les messages des différents peintres.
Bain plaisir ou bain pour l’hygiène ?
La question mérite d’être posée et trouve de nombreuses réponses à travers les différents écrits. De l’Antiquité à la renaissance, les évolutions furent nombreuses. On y trouve ainsi des anecdotes croustillantes où on rapporte que les bains collectifs n’existaient pas vraiment en vue d’améliorer l’hygiène mais de s’y livrer à des pratiques sexuelles douteuses ; la aussi les illustrations ne laissent planer aucun doute. Ainsi trouve-t-on différents bains : pour la propreté corporelle, pour l’embellissement, pour rechercher la beauté idéale, pour mettre la femme en valeur, pour avoir droit de peindre des femmes nues, pour avoir une attitude d’aristocrate, pour le plaisir. Et la religion d’intervenir clairement à travers le maquillage, les teintures, les crèmes, qui entraînent l’humain vers les artifices, le mensonge.
Et la chimie ?
Cet ouvrage est largement soutenu par le CNRS qui intervient ici pour apporter une touche scientifique de haut niveau à cette exposition. En effet, impossible de ne pas lier procédés physico-chimiques et histoire des parfums, poudres, fards. La technique de diffraction des rayons X est évoquée et on y insiste sur le fait qu’elle permet d’analyser solides en poudres ou œuvres, sans les détériorer.
Un bain différent ?
Après avoir parcouru ce livre, vous ne vivrez plus le bain de la même façon …Vous vous surprendrez à lister vos attitudes devant le miroir, de courtoisie dans la voiture, mural dans la salle d’eau. Vous guetterez vos habitudes, souvent oubliées, dans la douche, les objets que vous utilisez pour vous coiffer, la forme de vos peignes, les marques utilisées, le soin que vous apportez au choix de vos crèmes, de vos champoings. Ce livre provoque une évidente introspection. Si par chance vous passez du temps dans des spas, « mus »t du délassement depuis le début du siècle, vous découvrirez que les « étuves » existaient déjà chez les grecs, la chaleur étant assurée par des braseros, que les Romains utilisaient la géothermie à savoir les sources d’eau chaude mais avaient aussi mis au point des « frigidariums », à température plus basse. De même, de part la préparation de mixtures, les nanotechnologies, sujet à la pointe si l’en est, étaient déjà maîtrisées. On y découvre aussi l’enthousiasme pour les matières cosmétiques exotiques, développé par les activités commerciales accrues.
En conclusion
A travers le bain, cet ouvrage permet d’avoir un aperçu très clair des attitudes à travers les siècles. Lié à l’exposition, saluons l’effort pour imbriquer l’Antiquité, le Moyen âge et la Renaissance. Malheureusement on retrouve plutôt une juxtaposition des textes, souvent répétitifs, qui démontrent que chaque intervenant a produit son texte sans tenir compte des autres. Historiquement, il ravira les amateurs des ces époques par la précision des informations, le goût du détail, le choix des illustrations. La qualité générale du livre permettra aussi d’orner agréablement un salon, de le présenter à des invités et d’y trouver là une source de conversation des plus intéressantes : dis moi comment tu te baignes, je te dirai comment tu vis. Ce livre encourage aussi à se déplacer dans les 2 musées pour y découvrir, de visu, les nombreuses peintures, gravures ou sculptures. Les objets, récupérés à travers les âges dans les différentes salles de bains, objectif complexe s’il en est, satisferont les plus esthètes d’entre nous. Le catalogue, sur près de 270 pages, abordé par thèmes, pourra aussi être utilisé par des enseignants de sciences, en mal d’illustrations pour leur cours de chimie, mais aussi en Histoire de l’art, permettant d’y illustrer l’importance de la chimie.
Cédric Garcia
