Ce numéro du « Dessous des cartes » consacré à Dubaï permet à un enseignant en géographie de présenter et surtout d’expliquer les ressorts de la mondialisation et la façon dont celle-ci s’inscrit dans l’espace. En présentant les images satellites de cette zone du golfe arabo-persique, Jean-Christophe Victor illustre bien l’impact spatial de la mondialisation. Comment, à partir des fonds représentés par la manne pétrolière exploitée dans les années soixanet et en voie d’épuisement, une famille d’Émirs, au pouvoir depuis 1971, a pu entreprendre et développer la construction d’un hub logistique et commercial ?

Cet espace est doublé d’une série de complexes touristiques et hôteliers, destinés à une clientèle régionale haut de gamme, cherchant à venir dépenser son argent loin des gardiens du vice et de la vertu saoudiens et des gardiens de la révolution iraniens. Dans le même temps, Dubaï joue le rôle de Singapour au moyen Orient en fournissant, ce qui est remarquablement montré et expliqué dans les cartes présentées, un espace d’échange et de transit, des installations portuaires de grande capacité et bien entendu zones franches et services financiers discrets et adaptés.

Les limites de ce développement se trouvent à Dubaï comme ailleurs dans la faible homogénéité sociale de la population permanente. Seuls les autochtones disposent du droit de propriété et ces ex-rentiers du pétrole devenus hommes d’affaires utilisent la main d’œuvre immigrée, non musulmane souvent d’Asie du Sud et du Sud Est. Ces populations sont victimes de ségrégations diverses, ce qui n’est pas dénué de conséquences à propos de la stabilité politique du territoire.

De la même façon, les chantiers pharaoniques, îles artificielles, centres aquatiques et autres tours en projet de 800 mètres ont un fort impact environnemental. La question de l’eau est posée depuis longtemps dans la zone et on connait le recours déjà ancien aux techniques de dessalement de l’eau de mer, même si celles-ci sont coûteuses en énergie. C’est cette question du coût qui peut dans une certain nombre de pays inciter des pays pétroliers comme l’Iran à développer une filière nucléaire. Brûler du pétrole à 70 $ le baril en échange d’une eau qui en coute moins de deux est évidemment absurde.

Dans la classe il est possible de bâtir, après visionnage de l’émission, un questionnement sur les différents aspects de la mondialisation que l’on retrouve à Dubaï. L’explication sur la fonction de Hub est évidemment facilitée par la présentation des différentes cartes notamment celles sur la desserte de Dubaï airlines et celles sur les pays proches. Iran, Golfe et au-delà Asie centrale ex-soviétique. En passant, on pourra également travailler en histoire sur les nouveaux rapports de force internationaux et sur les voies de développement en expliquant toutefois que le modèle de Dubaï est difficilement transposable ailleurs. La conjonction d’événements comme la guerre civile libanaise, les trois guerres du Golfe, l’effondrement de l’URSS, ont permis à la famille régnante sur l’un des sept membres des émirats arabes unis de connaître cette forme originale de développement. Elle s’inscrit pourtant dans l’histoire de la région. De la côte des pirates à la contrebande et aux exploitations des huitres perlières, on arrive assez vite à la mondialisation actuelle.

Bruno Modica