Il était une fois une ville unique, l’air y était clair, ses habitants, doux et un peu étranges, y faisaient pousser partout des fleurs, des parcs et des jardins. Ils chantaient, dessinaient et écrivaient des poèmes. Danko, Fabian et Zirka, trois amis inséparables adoraient leur ville, Rondo, célèbre pour ses extraordinaires fleurs chantantes et sa serre immense. Danko avait un corps comme une ampoule, son coeur brillait si fort. Fabian était un ballon de baudruche en forme de chien. Zirka, la cocotte en papier, aimait découvrir le monde.

Mais un jour, un jour pourtant comme tous les autres, le silence s’abattit sur Rondo. Aux portes de la ville, c’est la guerre. Les habitants n’avaient aucune idée de ce qu’était la guerre. Elle faisait jaillir l’ombre, des fleurs noires desséchées ou des buissons couverts d’épines. Et le pire arriva : les fleurs s’arrêtèrent de chanter.
Nos trois amis décidèrent de ne pas laisser faire la guerre et de lui parler. Mais la guerre n’écouta pas, une pierre frappa Danko et fissura son corps, une étincelle roussit les ailes de papier de Zirka et une fleur noire piqua la patte de Fabian. « LA GUERRE N’EPARGNAIT PERSONNE ».

Donc pour parler à la guerre, il fallait parler le même langage qu’elle, la frapper droit au coeur… mais la guerre n’a pas de coeur !
Rondo disparaissait un peu plus jour après jour. Un plan était nécessaire. La lumière, qui faisait chanter les fleurs survivantes, était la solution. La lumière allait taire la guerre. Il fallait construire une énorme machine à lumière. Tous les habitants rejoignirent les trois amis pour mener à bien ce projet. Lorsque la machine fut terminée, tout le monde se mit à son poste pour pédaler et mettre en branle les engrenages. Pour se donner de l’énergie, tous chantèrent la chanson de Rondo. Plus la chanson était forte, plus la lumière était forte et plus la guerre faiblissait jusqu’à la victoire des habitants.

Des coquelicots sortirent de la terre, habituellement roses, jaunes, violets ou blancs, ils étaient désormais rouges. La ville fut rebâtie, de nouvelles fleurs poussèrent mais tout cela n’effaça pas toutes les traces de la guerre.

Un album magnifique, une histoire très émouvante, fort bien écrite. Les illustrations sont superbes, originales, tendres et dures à la fois, mêlant dessin, infographie, gravures anciennes photographies. Les couleurs pastel du début de l’histoire font place au gris, au noir de la guerre pour mieux revenir avec la conclusion du récit. Beaucoup de symboles dans ce livre, notamment les coquelicots rouges qui font indubitablement penser aux poppies de la Grande Guerre.

Cet album a une résonance encore plus particulière quand on sait qu’il a été écrit et illustré par deux auteurs ukrainiens, confrontés dans leur pays à la guerre. Il a d’ailleurs été primé à la Foire internationale du livre de jeunesse à Bologne.
Utilisant la poésie, l’humour dans leur histoire, les auteurs n’en oublient pas de montrer que la paix se cultive comme les fleurs, et que la guerre, même terminée, laisse toujours des traces.

La guerre qui a changé Rondo est un livre fort, un livre d’espoir. A mettre entre toutes les mains, à tout âge.