Le Journal de Jean Migault ou malheurs d’une famille protestante du Poitou victime de la Révocation de l’Edit de Nantes (1682-1689) est un témoignage poignant rédigé au jour le jour sur les dragonnades et les filières d’évasion de la France sous Louis XIV.
Dans ce récit relativement court (100 pages), on trouve une description saisissante des actes des cavaliers pour convertir de force les protestants. Migault déclare : « Arriva le régiment de cavalerie qui a ruiné une grande partie des familles de ceux de notre religion. ». Ils vendent tout ce qui tombe sous leur main, « plusieurs papistes font donc des affaires à bon marché, les cavaliers vendaient leurs marchandises au premier qui la voulait acheter, et au prix qu’il en promettait ». Ils « mettent en pièce meubles, portes et fenêtres ». Ceux qui refusent de céder fuient de nuit « pour éviter la fureur de ces impitoyables ». En 18 heures tout un village est converti sauf 15 à 20 familles. Un curé veut même jeter le corps d’un bébé aux chiens car c’est un hérétique.
Par contre, on voit aussi des familles catholiques qui choisissent d’aider, de cacher ou de soutenir les protestants persécutés. La tentation permanente est celle de l’abjuration : pour sortir de prison ou éviter que les dragons s’installent dans votre maison. Même le héros, Jean Migault, sera contraint d’abjurer ! On voit aussi la liste des métiers interdits aux protestants : greffiers, notaires, procureurs, sergents, précepteurs, domestiques…(ce qui nous évoque aussi les juifs en 1940-1944).
Dans la deuxième partie du récit, pour « sortir du royaume avec le secours de Dieu pour pouvoir le glorifier en toute liberté », Jean Migault va se déchaîner pour sauver ses 10 enfants. Il nous éclaire sur les passeurs et l’argent nécessaire pour fuir le royaume, ce qui peut nous rappeler les filières d’immigration clandestine pour entrer dans la forteresse Europe en 2011. Les pays qui servent alors de refuge sont la Hollande, l’Angleterre, l’Irlande ou la Caroline en Amérique. Le grand point de départ est le port de La Rochelle où Jean Migault fera 4 semaines de prison dans la Tour de La Rochelle. En mai 1689, il atteint enfin Rotterdam où il se précipite dans un culte libre et se réfugie en juin à Amsterdam où il écrit ce récit.
En conclusion, c’est un récit captivant et qui se lit facilement. Tous les «parpaillots» doivent le lire et même tous les amateurs d’Histoire