Depuis plus de cinquante ans, les pictogrammes ont reflété et alimenté notre représentation du masculin et du féminin. Ils constituent à leur façon un véritable musée populaire de la différence des sexes. L’ouvrage est illustré par de nombreux exemples.

La construction d’une usine à stéréotypes

L’auteur, Serge Tisseron, psychiatre et auteur de nombreux ouvrages, guide le lecteur sur ce sujet qui pourrait sembler banal mais qui, en même temps, dit beaucoup des rapports entre les sexes. Les premières lois exigeant la séparation des sexes dans les toilettes publiques sont prises au début du XXe siècle aux États-Unis. Dans les années 60, la généralisation des voyages internationaux montre la nécessité d’un langage sans frontière. Les pictogrammes sont rapidement produits dans toutes les tailles et matières. Trois orientations coexistentle lettrage, le corps  stylisé et désincarné et la mise en scène du corps. Les vêtements sont également intéressants à examiner avec très souvent des cannes et autres chapeaux.

Naissance et mort d’un art populaire

L’obligation de lieux d’aisance séparés dans les espaces publics s’est rapidement accompagnée d’une explosion d’images originales. Beaucoup de propriétaires de lieux publics obligés de créer des toilettes genrées ont fabriqué leur propre signalétique. On apprécie les multiples exemples proposés en photographies. On constate souvent que les pictogrammes  opposent le pantalon à la robe. Le bassin des femmes apparait aussi comme un marqueur de la différence homme-femme.

Vivre dans les images

Les pictogrammes des toilettes ne doivent leur efficacité qu’à deux caractères : le lieu où ils sont installés  et l’opposition binaire qu’ils fondent. Serge Tisseron rappelle les travaux de Charles Sanders Peirce, considéré comme le père de la sémiologie. Il existe trois relations possibles entre une image et ce qu’elle évoque : l’indice, le symbole et l’icône. L’indice a un lien avec l’objet désigné, le symbole n’a d’autre lien avec ce qu’il signifie que la convention que leurs utilisateurs y associent et l’icône présente une ressemblance avec un objet auquel il fait référence.

Les mœurs changent et des figures nouvelles sont apparues. Aujourd’hui, un débat s’installe sur la nécessité de toilettes plus inclusives. Sur un sujet qui pourrait paraitre très anecdotique, Serge Tisseron réussit à dire quelque chose de notre société.