Comme pour les tomes précédents, le scénariste est Olivier Péru, auteur plutôt spécialisé sur les séries de science-fiction ou d’héroïc-fantasy, comme Androïdes, les Druides ou Elfes. Multi-tâche, cet auteur est également romancier, dessinateur ou encore illustrateur. Pour les dessinateurs, la stratégie est la même que sur les opus I et II : donner sa chance à d’autres mains. En l’occurrence, celles de Lucio Leoni et d’Emanuela Negrin. Le premier a travaillé longtemps sur Mickey en Italie, avant de naviguer entre différents magazines et collaborer finalement avec Soleil sur de nombreuses séries comme Oracle ou Les brumes d’Asceltis. Il est aidé pour l’encrage, le lettrage et le dessin par Emanuela Negrin. Le duo a réalisé de nombreuses œuvres chez Soleil comme la série « Alice Matheson ».
Dès le titre, l’auteur donne le ton de l’ouvrage : il sera question ici de traiter de l’ascension de Jules de Médicis, neveu de Laurent le Magnifique, dont le père, Julien, a été assassiné en 1478, lors de la conjuration des Pazzi. Mais, pourtant, il ne peut être considéré comme le seul personnage central de cette bd, tant son cousin, Jean est un maillon essentiel de l’accès des Médicis au pouvoir suprême, le prestigieux trône pontifical romain qu’ils occuperont tous deux, Jean sous le nom de Léon X, Jules sous celui de Clément VII.
Jean et Julien, deux cousins avides de reconnaissance et de volonté de monter au pinacle la famille Médicis. Deux cousins aux destins liés, chaotiques et mouvementés, à la fois marionnettes et acteurs d’une période troublée. Le contexte est celui de l’Italie du XVI
Au travers du destin de ces hommes, les auteurs nous font rencontrer une galerie de personnages aussi illustres que machiavéliques : Savonarole, le prédicateur dominicain, pourfendeur de la curie romaine qui a su s’emparer de Florence et chasser Pierre l’infortuné et les Médicis ; la famille Borgia, père, fille et fils, pape et conquérants ; les rois de France Charles VIII et Louis XII, attirés comme tous les Valois par l’Italie ; et bien évidemment Machiavel, l’amoureux transi de Florence, prêt à tous les stratagèmes pour la gloire de sa ville…
Il n’y a rien à redire sur la capacité des auteurs à nous plonger dans l’ensemble des jeux politiques et des systèmes d’alliances et de trahisons inhérents à cette époque. L’ensemble est limpide, se suit sans difficultés, même si une deuxième lecture est appréciable pour saisir de manière plus convenable l’ensemble des paramètres historiques et géopolitiques des tractations entre Florence, Naples et Rome. Tout cela s’appuie sur un style graphique cohérent et une mise en ambiance particulièrement réussie.
Si les deux premiers tomes pouvaient s’avérer extrêmement précieux pour un élève de lycée curieux de croiser quelques hommes illustres de la Renaissance et de réfléchir sur le rôle politique du mécénat, autant cet ouvrage laisse la place à une intrigue beaucoup plus complexe qui l’amènera à réfléchir sur le jeu politique, la trahison, les alliances, qui ne sont pas l’apanage de notre système démocratique actuel.
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Matthieu Henry, pour Les Clionautes©