L’ouvrage Histoire rurale de l’Europe a été conçu sous la direction de Laurent Herment, chargé de recherche CNRS à Paris, spécialiste des filières agroalimentaires et agro-industrielle en Europe du Nord, de l’alimentation et de l’approvisionnement, ainsi que du système agraire européen, XIXe-XXe siècle.

Le cœur du livre interroge la notion de croissance agricole sur une période couvrant cinq siècles, du XVIè au XXè. Trois parties scandent cet état des lieux : d’abord la diversité des voies du développement agraire, puis le renouveau de l’histoire quantitative, enfin les institutions et moteurs de la croissance. En outre, l’œuvre se fait polyphonique – elle concentre treize contributions – et propose aux lecteurs une multiplicité d’approches à travers les cas danois, allemand, espagnol, suisse, italien, néerlandais, belge et français, mais aussi grâce aux prismes de l’histoire sociale et économique, l’histoire de la famille, la démographie historique, ou encore l’histoire des sciences et l’histoire de l’environnement.

In fine, ces travaux permettent de comprendre la nature, le rythme et les causes de la croissance agricole en Europe, indissociable de l’émergence du monde moderne. Pour ce faire, le livre s’appuie sur les trois grandes approches qui ont stimulé la recherche depuis la décennie 1990 : la diversité des systèmes agraires, les méthodes quantitatives ainsi que le rôle des institutions. Les analyses de L Ferrer-Alos sur l’Espagne, ou de P van Cruyningen sur les Pays-Bas, sont à ce titre très éclairantes.

Dépasser le modèle anglais

Par ailleurs, l’ouvrage critique les modèles historiographiques canoniques qui présupposent la supériorité du modèle de développement capitaliste anglais. A contrario, il invite à tenir compte de la croissance démographique, des contraintes environnementales, des effets de la demande urbaine, des courants d’échange internationaux et des évolutions institutionnelles propres à chaque système agraire afin notamment de circonscrire le phénomène de la croissance agricole.

Pour conclure, aucun reproche à adresser à cette somme, tant l’actualisation et l’acuité des regards, conjuguées à la dimension européenne des contributions, confèrent un grand intérêt à sa lecture, en particulier pour le lectorat universitaire.