En introduction les auteurs rappellent l’intérêt de la géographie pour comprendre les enjeux du monde actuel entre productions et consommations alimentaires à l’échelle locale comme mondiale et l’intérêt de connaître l’histoire de l’évolution des produits et des habitudes alimentaires jusqu’à l’érosion actuelle de la biodiversité dans nos assiettes.
Cinq grands thèmes pour traiter de ces aspects depuis le Néolithique à l »évocation de demain.

Parcourir cet atlas est un véritable régal.

Les foyers de domestication

Il est rappelé que la lente domestication des plantes remonte au 13r millénaire avant notre ère et dans plusieurs foyers sur la planète même si différentes thèses existent à ce sujet sur les causes et les conditions de cette domestication . Une carte résume les connaissances actuelles et un tour d’horizon met en évidence les grandes plantes : céréales, légumineuses …

Un chapitre est consacré aux trois grandes céréales : blé, riz, maïs originaires de trois continents. Les auteurs détaillent comment on passe des variétés sauvages, objet de cueillette aux variétés cultivées.

Puis ils montrent au chapitre suivant que les fruits et légumes sont originaires des zones montagneuses en commençant par les Andes1, berceau de la pomme de terre et du quinoa, du haricot et de la tomate. Ils montrent l’importance des aires d’échange et donc de diffusion des plantes. Autre montagne, autre richesse, le Caucase fut le pays des fruits (pommes, châtaignes, amandes…) mais aussi des légumineuses (petits pois, lentilles, pois chiches), des légumes et des condiments (carottes, concombre, ail, estragon).

Le lecteur continue son voyage vers l’Asie à la rencontre des agrumes.

Un chapitre est consacré à l’animal à partir des fouilles archéologiques avec une carte de la domestication au Proche et Moyen-Orient2 : bovins, ovins, caprins, équidés quand la poule vient de Nouvelle Guinée et la dinde de Méso-Amérique3.

La mondialisation des plantes

Les déplacements des hommes, les échanges pacifiques ou guerriers ont été des occasions de diffusion du couple nutritionnel indispensable céréale/légumineuse. Les concentrations humaines, les villes ont généré des mouvements de denrées pour nourrit cette population4.

Dès l’Antiquité dans l’Europe, l’Asie et dans une certaine mesure l’Afrique les hommes ont échangé des denrées, ont tenté avec plus ou moins de réussite de les acclimater hors de leur biotope. Mais les « Grandes Découvertes » ont été facteur d’échanges de nouveaux produits qui vont être adoptés dans la nourriture de base comme maïs de la polenta italienne, alors que la canne à sucre de Nouvelle Guinée, transitant par l’Arabie parvient en Amérique5. Les auteurs font ici une place au rôle des médecins, savants et botanistes qui ont étudié toutes ces plantes.

L’âge industriel est caractérisé par l’abondance : moyens de conservation (Appert), de transport et de transformation qui modifient à la fois la répartition des zones de production et des modes de consommation comme le montre l’exemple de la Floride : un verger mondialisé6. Sont évoquées les craintes actuelles sur la qualité nutritionnelle des aliments et la question d’un « Sud, ferme du monde ? »7, accaparement des terres par la Chine et la conservation des semences.

Les produits de l’élevage

Une carte de la consommation de viande en 20148 ouvre cette troisième partie. Si les aires de consommation : Asie – porc, poule, Amérique – bœuf, Afrique – chèvre, mouton s’estompent dans l’histoire les animaux élevés pour la viande ont migré avec les hommes et ont été longtemps associés aux pratiques religieuses, ils sont porteurs d’un imaginaire culturel fort. Les auteurs évoquent la culture attelée en Europe et abordent la réflexion actuelle sur l’élevage intensif, kes résistances tant des agriculteurs que des consommateurs européens, les évolutions de consommation en Afrique et en Asie 9.

Un chapitre est consacré aux produits laitiers avec notamment une carte de l’intolérance au lactose10, un développement sur l’ancienneté des formes de consommation et montre les écarts de consommation de fromage11.

La pêche n’est pas oubliée. Les premières traces d’aquaculture remonte en Chine vers 2500 avant notre ère, 1000 pour la méditerranée, mais son développement est surtout un phénomène récent12 né de la nécessité de préserver une ressource menacée.

Les boissons

L’origine des boissons fermentée semble liée aux religions dès l’Antiquité : vin, bière avant de gagner le monde entier13. On parle même de géopolitique des vins pour évoquer la Chine tant comme espace de consommation que de production. Une nouvelle tendance est décrite : les microbrasseries aux États-Unis et maintenant en France.

C’est ensuite un tour d’horizon des alcools forts d’un usage ancien thérapeutique à une consommation sociale entre variété des végétaux utilisés, des zones de consommation et des développements industriels contemporains.

D’autres boissons entrent dans la danse. Si les eaux thermales sont d’un usage ancien la grande consommation d’eau en bouteille est récente14 et parallèle à la diffusion des jus et sodas avec deux leaders du marché : le jus d’orange et le coca-cola.

Quant aux boissons chaudes : thé, café, chocolat leur usage en Europe est récent (XVIIe-XVIIIe siècle) avec une mondialisation progressive de la culture et de la consommation15.

Cuisines et saveurs

Cette dernière partie s’ouvre sur une question : « le goût peut-il être planétaire ? ».
Pour répondre à cette question les auteurs interrogent les aspects économiques (industrie agroalimentaire), les variations de modes de consommation (exemple du thé), les « modes » (expansion des cuisines asiatiques).

On ne saurait parler de nourritures interdites sans aborder les interdits religieux mais aussi sanitaires comme dans deux exemples : la « vache folle » et le scandale des lasagnes à la viande de cheval16.

Un dernier point est évoqué : le développement du « bio ».

Les touristes, les diasporas ont contribué à diffuser de nouveaux plats, de nouveaux goûts au point qu’on puisse parler de best sellers culinaires : Pizza, burger, sushi, kebab17 qui sont, d’ailleurs, plus une réinterprétation à la française, américaine voire chinoise du modèle importé.

Face à cette uniformisation même relative on assiste à la mise en valeur de traditions : inscription au patrimoine mondial de l’UNESCO, mouvement « Slow Food » italien entre notion de terroir (AOP, IGP) et reconnaissance des cuisines des pays colonisés (Maghreb, Inde).

Enfin l’ouvrage pose la question d’un retour au local, un mouvement présent aux États-Unis comme en Europe qui interroge le modèle de production agricole.

Et demain ? Nourrir les villes sur les toits, « biotech »18 et viande synthétique, exemple californien.

La conclusion met en valeur les aspects multidimensionnels de l’acte de se nourrir.

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1Croquis de l’étagement des cultures andines d’après Humboldt, page 38

2Page 50

3Carte page 54

4Carte de l’approvisionnement de Rome au VIIe siècle av. J.C.

5Carte page 78

6Carte page 89

7Exemple su soja brésilien

8Page 100

9Carte de la consommation de viande en Inde page 113

10Page 120

11Carte page 125

12Graphique de la production de poisson , pêche et aquaculture, page 130

13Carte page 143

14Carte d’Europe page 160

15Carte du café page 168, du thé page 171

16Intéressante carte page 192 qui montre le cheminement des produits

17Carte page 198

18Carte page 226