Comprendre en bande dessinée les mécanismes du racisme ?
Cet album est le fruit d’une rencontre entre Ismaël Méziane, passionné de Sciences humaines et les commissaires de l’exposition « Nous et les Autres » au Musée de l’Homme à Paris en 2017 qui avait fait l’objet d’un ouvrage aux éditions La Découverte. Il s’agit de concevoir un ouvrage qui allie ses réflexions personnelles et les explications de Carole Reynaud-Paligot, historienne et Evelyne Heyer, professeur en anthropologue généticienne.
Renvoyé à son identité, Ismaël Méziane se met en scène pour décrire son expérience personnelle qu’il confie à son psy, tout en écoutant les explications des deux spécialistes afin de comprendre l’origine d’un phénomène aujourd’hui très répandu, le racisme.
Trois éléments entraînent le racisme
La catégorisation
Il s’agit de mettre les individus dans des cases. S’il est naturel de catégoriser, la catégorisation n’est pas naturelle. Elle découle de l’origine sociale : au Moyen-Age, ceux qui prient, ceux qui combattent et ceux qui travaillent), puis au XIXe, les nobles, les bourgeois, les ouvriers et les paysans ou par les nationalités : les Français, les Allemands… Réduire les individus à une catégorie liée à une idée reçue témoigne d’une grande paresse intellectuelle.
La hiérarchisation
Il faut parler ici d’ethnocentrisme ce qui signifie qu’un groupe se désigne comme supérieur et qu’il devrait devenir la norme pour tout le monde. Les autres groupes se hiérarchisent. Les groupes sont donc considérés comme « un tout » alors que chacun est constitué de plusieurs identités, nées de son histoire, de ses choix ou du regard que porte la société sur lui. On oublie donc la diversité des êtres. Aussi assimiler une personne à sa communauté n’a rien de pertinent, de rationnel ou de scientifique. L’assignation identitaire renvoie un individu à une identité figée en le réduisant à des caractéristiques physiques ou à des goûts présumés.
L’essentialisation
L’essence de l’individu est définie en fonction de caractères physiques, moraux et comportementaux qui se seraient transmis de génération en génération. Les préjugés parasitent la réflexion ainsi que le jugement. Ils se fondent sur les idées reçues d’une époque et d’un milieu donné.
Issues de ces trois compartimentations, des théories racistes issues de la science des races ont émergé au XIXe siècle. Elles ont justifié la colonisation et le nationalisme qui aboutit à des régimes totalitaires. Le groupe dominant justifie sa place en méprisant les autres. Le comportement discriminatoire répond à un besoin psychologique de reconnaissance.
Cet ouvrage très personnel aborde avec justesse les mécanismes sociologiques et psychologiques de l’installation des préjugés et du racisme dans la société. La production graphique par la simplicité du trait et la douceur des couleurs rend l’album plus pédagogique et de ce fait plus percutant. Il sera d’une grande aide pour les cours d’EMC sur les différentes discriminations spécifiquement en cycle 4.
« Il ne s’agit pas de fixer l’homme puisque son destin est d’être lâché » Frantz Fanon, Peau noire, masques blancs.