Philippe Bernardi, archéologue et historien, est directeur de recherche au CNRS. Il se propose dans cet ouvrage de dresser un état des lieux de la connaissance sur la construction à l’époque du Moyen Age. Pour chaque thème abordé, il se propose non seulement de synthétiser l’état de la recherche mais aussi de la resituer dans une approche historiographique. L’ouvrage couvre la période du XIII e au XVI e siècle. Le livre comporte en outre un cahier central avec des reproductions rapidement commentées à la fin, un glossaire et une bibliographie à deux niveaux de lecture. Signalons également tout au long des thèmes abordés, de nombreux extraits de documents d’époque qui offrent de la chair à ce qui pourrait sembler autrement parfois trop technique. On trouve également des schémas sur les engins de levage des chantiers médiévaux ou sur les différentes parties d’une charpente.

De la conception à la réalisation

L’ouvrage est organisé en trois parties bien distinctes. Il choisit de partir de la place du bâtiment dans la société médiévale puis il s’intéresse aux facteurs de production et enfin traite de la mise en œuvre. L’auteur précise qu’il n’a pas cherché à équilibrer les différentes sous-parties tant il est vrai que, selon les sujets, les travaux ne connaissent pas tous la même avancée. Cet ouvrage, en plus d’être synthétique, montre combien il est important de reprendre parfois tout à la base. Ainsi convient-il de se poser ou se reposer des questions apparemment simples et de se méfier des évidences comme : qu’est ce qu’un chantier ? un ouvrier du bâtiment ? Philippe Bernardi invite également à se méfier des fausses évidences comme le fait par exemple que le nombre des ouvriers n’est pas toujours proportionnel à l’ampleur de l’ouvrage mené. Lorsque l’on lit le nom de matériaux utilisés il faut aussi s’interroger car que doit on comprendre derrière le terme de sable par exemple ?

La diversité est de règle

Il ne faudrait pas croire que l’ouvrage ne fait que survoler les sujets, car pour l’essentiel d’entre eux, il permet d’en savoir beaucoup plus sur la réalité de la construction au Moyen Age. Il faut garder en tête l’idée de diversité qui revient très souvent dans les articles. On peut examiner ainsi les effectifs présents à Windsor au cours des six premières semaines de chantier en 1344 selon les métiers et constater combien ils variaient. Il est difficile, quel que soit le chantier, de compter précisément les personnes employées, car des petits travaux pouvaient être réalisés par des travailleurs de proximité sans apparaître dans les comptes officiels. En tout cas, pour rétribuer le travail de chacun, il existait
des signes lapidaires pour lesquels le livre propose des exemples collectés. Philippe Bernardi resitue aussi au plus près ce que pouvait être la construction d’édifices durant la période XIII-XVIe car il pouvait y avoir de grands changements entre un plan de départ et le résultat final.


Tout savoir sur la construction au Moyen Age

Philippe Bernardi livre pêle-mêle les recettes et dépenses d’un chantier dans la cathédrale de Bourges où apparaissent la part de l’archevêque, des confréries ou encore des quêtes. Dans la deuxième partie de l’ouvrage, il revient en détails sur la question des matériaux employés au Moyen Age. Il propose une approche pour chacun et n’oublie pas de donner des considérations générales. Ainsi, le prix de la matière première, la pierre, augmentait selon le trajet du parcours entre extraction et utilisation. Pour chaque matériau, il montre donc son extraction, son acheminement. Il condense utilement certains travaux récents comme ceux qui insistent sur la place du fer dans les cathédrales : en Allemagne, dans les seules fenêtres, la masse de fer employée oscillait entre 3,6 tonnes pour une église et 13,5 tonnes à la cathédrale de Ratisbonne.
L’auteur n’oublie pas les hommes en restituant les rythmes de travail et ce qu’on peut en savoir : de la journée à l’année, il propose des ordres de grandeur où l’on cerne mieux la part des jours fériés.
Le livre aborde aussi des questions comme celle du décor des constructions d’époque. Il rappelle comment l’association des couleurs de pierre ou de brique permettait de créer déjà des possibilités de décor.

Au total, ce livre permet un tour d’horizon des plus intéressants sur un thème qui semble à la fois bien connu et en même temps objet de nombreux travaux. Le chapitrage très précis du livre permet en outre d’accéder à une information précise. Dans le cadre des nouveaux programmes, et notamment de seconde, l’ouvrage de Philippe Bernardi permet un apport d’informations pour notamment retracer ou du moins approcher la réalité de l’époque.

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