Ne coupons pas les cheveux en quatre, j’ai été emballé par cet ouvrage jeunesse ! Louise Vercors pour les textes et Pierre d’Onneau pour les illustrations proposent en effet une approche très originale du cheveu qui est « un témoin essentiel de l’histoire des sociétés ». Ce documentaire, conseillé à partir de 9 ans, pourra en effet intéresser bien au-delà du public ciblé. Le plan choisi est thématique ce qui se révèle particulièrement pertinent. La mise en images du livre est vraiment agréable et textes et dessins se répondent, ou se complètent, formant un ouvrage très cohérent. Généralement, le texte et les dessins se partagent une page à égalité.
Le cheveu du pouvoir
Dans cette première partie, on s’intéresse notamment au cheveu pharaonique où la perruque était un signe extérieur de richesse. La page propose même une recette d’époque pour avoir de beaux cheveux. Cheveu et pouvoir vont donc ensemble pendant longtemps comme le montrent d’autres exemples. On apprendra peut-être que Louis XIV était presque chauve à vingt ans après une fièvre typhoïde. La perruque devient un accessoire essentiel et au moment de la Révolution tout n’est pas permis en terme de coiffure. Halte notamment aux coiffures aux proportions gigantesques. Louise Vercors aborde aussi d’autres époques et d’autres continents allant jusqu’à s’arrêter sur le bon côté de la raie en politique.
Le cheveu féminin
On repart de l’époque romaine et des conseils d’Ovide en terme de coiffure, puis on perçoit que durant le Moyen Age se construit l’idée qu’une femme ne doit pas montrer ses cheveux pour ne pas tenter l’homme. En revanche, au XVIII ème siècle, le pouf, cette coiffure constituée d’un coussin et surmonté de plusieurs objets, s’impose dans les hautes sphères de la société. L’auteure passe ensuite en revue les différentes couleurs de cheveux et la façon dont elles furent perçues. On termine le tour d’horizon par le mouvement « nappy » apparu dans les années 2000 aux Etats-Unis qui invite les femmes à laisser leurs cheveux au naturel.
Le cheveu humilié
On parle ici aussi bien de Méduse, des sorcières ou des scalps. Louise Vercors rappelle aussi qu’avec Mao la natte traditionnelle chinoise fut interdite et le cheveu court, signe de l’adhésion à la nouvelle société, s’imposa. L’auteure évoque également la déshumanisation durant la Seconde Guerre mondiale ou l’épuration avec les femmes tondues.
Le cheveu religieux
Cette quatrième partie propose un tour des religions très intéressant. On parle de la « couronne chrétienne », cette forme de tonsure, qui n’est pas sans rappeler la couronne d’épines du Christ. Dans la religion musulmane, il faut cacher les cheveux même si sa justification par le Coran reste imprécise. Dans la communauté juive, et particulièrement dans la communauté hassidique, le cheveu est aussi très codifié. On lira aussi l’importance des 5k chez les Sikhs dont deux concernent les cheveux : « kesh » (ne pas se couper les cheveux) et « kangha » (les fixer avec un peigne en bois).
Le cheveu rebelle
Le livre se termine par le cheveu rebelle avec plein d’exemples. Gabrielle Chanel lança au début du XX ème siècle la coupe « la garçonne ». Un peu plus tard, les Zazous se remarquèrent par leurs coupes puis ce fut le mouvement « Peace and Love », le mouvement punk, les skinheads et encore les rasta et les dreadlocks. L’ouvrage se termine par quelques dessins de coupes remarquables et des annexes avec quelques chiffres, expressions autour du cheveu et une rapide bibliographie.
En un peu plus de cent pages, Louise Vercors et Pierre d’Orneau proposent donc un tour d’horizon du cheveu dans une approche à la fois historique, géographique et même anthropologique. En plus d’être un bel objet graphique, ce livre raconte notre histoire et offre aussi quelques pistes de réflexion sur ce que nous sommes aujourd’hui.
© Jean-Pierre Costille pour les Clionautes