Dans le cadre de l’exposition qui se déroule actuellement au Louvre-Lens, la revue Archéologia propose un excellent hors-série consacré à Champollion et au déchiffrement des hiéroglyphes.
Le numéro débute par un entretien avec Vincent Rondot, commissaire de l’exposition.L’historien rappelle qu’avant Champollion, l’Égypte est avant tout perçu comme une civilisation « du mystère ». Elle n’est réellement « appréhendée » que d’après des auteurs comme Hérodote, Diodore de Sicile, Strabon ou encore par la lecture de la Bible. Jean-François Champollion, indique Vincent Rondot, « a non seulement déchiffré une langue morte, mais aussi lancé une nouvelle science humaine et ainsi définitivement modifié notre rapport au monde et à l’histoire (p.9) ». L’entretien comporte en outre trois encarts consacrés respectivement aux hiéroglyphes, à la pierre de Rosette et au frère aîné de Jean-François Champollion, Jacques-Joseph Champollion.
Karine Madrigal (« Les premiers pas de Jean-François Champollion vers l’Égypte ») revient sur la formation intellectuelle du jeune Champollion. Celui-ci développe très vite une appétence pour les langues orientales et profite des liens tissés à Grenoble par son frère Jacques-Joseph avec la notabilité grenobloise. A Paris, il suit des cours de persan, d’hébreu, de syriaque et de chaldéen. Revenu à Grenoble, il est nommé professeur-adjoint d’histoire ancienne ( à seulement 19 ans) à la faculté des lettres de Grenoble et obtient en 1810 (par décret) le diplôme de docteur-ès-lettres.
Jean-Yves Carrez-Maratray (« L’Égypte en héritage ») passe en revue la lente compréhension du passé égyptien de l’Antiquité au XIXe siècle. Il écrit (p.21) qu’ « il faudra attendre la vraie « égyptologie », celle fondée par Champollion, pour s’assurer que la civilisation pharaonique était née vers 3200 avant notre ère. Ainsi donc, depuis les Grecs jusqu’au déchiffrement des hiéroglyphes en 1822, l’héritage que l’Égypte laissa à l’Occident gréco-romain et judéo-chrétien ne fut jamais qu’un mélange fait à la fois de fascination et de méprises ».
Alain Faure (« Rassurer l’Église, convaincre les savants »), biographe de Jean-François Champollion, évoque les premiers pas de Champollion dans le monde des savants, les nombreuses oppositions auxquelles il eut à faire face (Thomas Young, Gustav Seyffarth, Julius Klaproth, Edme-François Jomard) et ses rapports avec l’Église.
Patrice Bruet (« Contexte et enjeux du déchiffrement des hiéroglyphes ») mentionne dans le détail les contextes politique, scientifique et culturel de l’aventure du déchiffrement des hiéroglyphes.
Dimitri Meeks (« Les hiéroglyphes et leur déchiffrement ») propose une très belle contribution sur l’histoire du déchiffrement des hiéroglyphes. Il mentionne le philosophe chrétien Clément d’Alexandrie qui « distingue les trois types d’écritures pratiqués en Égypte de son temps selon une terminologie encore en usage aujourd’hui (p.46) » : les « hiéroglyphes », le « hiératique » et le « démotique ». Le dernier texte hiéroglyphique connu est daté du 24 août 394 et le dernier texte démotique du 11 décembre 452. L’auteur relate ensuite les travaux des savants ayant cherché à saisir le sens des hiéroglyphes jusqu’à leur déchiffrement par Champollion.
Hélène Guichard (« Les collections égyptiennes du cabinet particulier au musée ») mentionne les cabinets privés de François Artaud à Lyon et de François Sallier à Aix-en-Provence dont les collections seront profitables à Champollion et l’organisation de la section égyptienne du Louvre par ce dernier (il est nommé conservateur de l’institution en 1826).
Enfin Caroline Dugand (« Mémoire et postérité. L’héritage de Champollion ») s’intéresse à la postérité de Jean-François Champollion.
Grégoire Masson