Dans cette BD, Cinéphilix – Une histoire du cinéma en BD, les auteurs ont l’ambition de retracer l’histoire du cinéma de son invention à nos jours. Pour cela, ils s’appuient sur des personnages qui visitent un musée de cinéma. Par les dialogues entre ceux-ci, les interventions fantomatiques de figures illustres et des pages de textes, nous voilà promenés de part et d’autre du monde à la découverte d’industries et d’artisanats cinématographiques parfois méconnus.

En 6 chapitres, les auteurs font un découpage chronologique de cette histoire, ce qui semble être le moyen le plus pratique de synthétiser une aussi riche odyssée. De l’Europe à l’Asie, en passant par l’Amérique, se succèdent ainsi les périodes, les réalisateurs, les évolutions techniques et technologiques. Un grand absent géographique: le cinéma africain, malgré l’influence des productions égyptiennes, maghrébines ou encore nigérianes pour prendre un exemple actuel. En Asie, Bollywood ne semble pas avoir trouver grâce non plus.

Le livre est évidemment une véritable mine de références. Les auteurs ont choisi de mettre une demi-douzaine de références à chaque page et cela renforce, bien sur, une soif intarissable de projections à venir. Il faut être très humble par rapport à tout ce qui est proposé: il semble quasi impossible d’avoir vu l’ensemble des titres proposés et c’est l’une des grandes forces de cet ouvrage de fournir une liste si exhaustive.

Cependant, ce qui est un atout peut être aussi vu comme un inconvénient. L’ensemble des pages ressemble au final beaucoup plus à un catalogue d’éléments juxtaposés les uns à coté des autres sans véritable continuité si ce n’est celle des dates. Il était évidemment quasi impossible de faire autrement, mais il aurait été apprécié de tisser plus de liens entre les époques, les réalisateurs et les lieux.

Autre élément qui heurte à la lecture: la place du cinéma « dit » populaire. Par celui-là, nous entendons plusieurs catégories de films : les films d’animation, les blockbusters et les comédies. Les films d’animation sont mentionnés sur 2 minuscules pages de texte, ce qui amène de la déception, tant ces films ont eu de l’importance, ont permis des avancées technologiques et sont liés à des musiques, des studios, des. phénomènes de société qui sont totalement mis de côté ici. Comment passer à côté de Pixar, de Disney évidemment ou encore des studios Ghibli ?

Les blockbusters sont traités sur le seul du marketing, oubliant, là-encore, ce que des sagas, comme le Seigneur des anneaux avec Peter Jackson, ou Star Wars avec George Lucas, ont apporté tant sur le plan du storytelling que du montage, des effets spéciaux, des équipes techniques et de la mémoire collective. Multi-récompensés par l’industrie même du cinéma, ce choix paraît ainsi étrange. Il aurait été d’ailleurs intéressant de dresser quelques pages sur ces cérémonies à travers le monde.

Cérémonies qui, comme ce livre, ne tiennent pas en odeur de sainteté les comédies. Mise à part une brève mention des Monthy Python (l’honneur est sauf) et du western spaghetti (Terence Hill et le regretté Bud Spencer), ce genre est totalement absent de cette BD, tout comme le sont les comédies musicales. En restant ne serait-ce que sur la France, pas une mention de Bourvil, Louis de Funès, des Bronzés… ; en allant aux Etats-Unis, le collectif ZAZ ou l’influence d’acteurs comme Jim Carrey ou Robin Williams… Ce choix est bien malheureux.

Au final, il paraissait impossible d’être exhaustif. Les auteurs nous dressent pourtant une litanie impressionnante de films d’époque et de genre totalement différents. Ces films sont plongés dans des contextes culturels et politiques présentés de manière succincte.

Le livre pousse très clairement, et c’est une très bonne chance, à la réflexion et au visionnage d’œuvres. Cependant, il sombre parfois dans une sorte d’élitisme qui lui fait oublier ce qui fait aussi le succès du 7e art : le cinéma populaire. Et en cela il se rapproche des critiques que l’on peut faire, en France, à des cérémonies comme les César ou les Molière au théâtre.