Cet ouvrage est une excellente mise au point sur l’histoire de la mondialisation contemporaine. Organisé de façon très didactique, il permet de disposer de données récentes et mises à jour sur les tous derniers développements et notamment la montée en puissance de pays émergents.
Si système commercial mondial a constitué au cours de ces six décennies le fondement d’une période de croissance économique et de développement sans précédent, il semblerait que des questions se posent quand aux perspectives environnementales.
Les deux auteurs s’interrogent sur la nature de ce système et des liens entre commerce, croissance et développement ?

Depuis la fin de la seconde guerre mondiale qui a vu la création du GATT jusqu’aux accords de Marrakech et à la création de l’OMC, en 1994-1995, une politique continue de levée des barrières douanières a été menée
L’Organisation Mondiale du Commerce est ainsi présentée tant pour son fonctionnement que son organisation.
Acteur majeur de la mondialisation, l’OMC demeure, malgré ses insuffisances, indispensable pour réguler les relations commerciales internationales.
l’Organisation a lancé en 2001, après bien des difficultés, un nouveau cycle de négociations destinées à renforcer la libéralisation multilatérale des échanges initiée par le GATT. Le « cycle de Doha », du nom de la capitale du Qatar où a été prise la décision, a été désigné « cycle pour le développement », fixant ainsi l’objectif majeur qui est le sien.

Un peu d’histoire

Les auteurs reviennent sur le lourd contentieux agricole, qui n’est toujours pas réglé.
L’affrontement initial entre les États-Unis et l’Union européenne s’est complexifié avec l’arrivée de nouveaux négociateurs incontournables que sont les pays émergents, grands exportateurs agricoles, au premier rang desquels le Brésil.
La crise alimentaire mondiale déclenchée en avril 2008 n’a pas arrangé les choses, au contraire, d’autant plus qu’une nouvelle flambée des prix est à craindre si l’on se base sur les dernières prévisions de la FAO.

Le multilatéralisme qui est le fondement du commerce international pourrait être remis en cause s’il venait à être remplacé une multiplicité d’accords régionaux ou bilatéraux. Ces groupes régionaux, fortmenet concurrentiels seraient alors conflictuels à terme.

La seconde partie de ce livre, évoque les deux grandes questions contenues dans le programme de Doha – et celui concernant la libéralisation commerciale impulsée par des accords régionaux et/ou bilatéraux mis en place au détriment des accords multilatéraux négociés au sein de l’OMC.

Le dossier agricole est ainsi évoqué avec les chiffres qui sont impressionnants. Les pays développés, EU et UE en tout premier lieu dépensent plus d’1 milliard de dollar par jours en subventions agricoles. C’est cela qui explique les difficultés des agricultures des pays en développement et aussi les revendications des pays émergents.
D’autres questions comme la libéralisation de l’accès au service ou au médicament sont également traitées et on lira avec profit ces pages très claires qui présentent bien ces enjeux parfois traités de façon trop vague.
On y parle en effet, pour ce qui concerne les enjeux du médicament des big pharma, sorte de cartel qui représente 60 % de la production mondiale et de leur refus de céder les brevets à des pays émergents disposant des industries chimiques puissantes permettant de fabriquer des génériques en grande quantité. En fait les enjeux sont ailleurs. Les 13 entreprises de «big pharma», dont le français Sanofi Adventis craignent surtout d’être concurrencées sur leur propre marché intérieur, celui des pays développés.

Retour sur un concept

La problématique en termes de développement durable fut amorcée en 1970 par le Club de Rome. Le Sommet de la Terre tenu à Rio de Janeiro en 1992 entérine ce terme comme la référence officielle de toutes les décisions adoptées par les organisations internationales en matière de développement. Et le programme de Doha lancé en 2001 accorde au commerce international un rôle primordial dans le développement économique, la réduction de la pauvreté et la préservation de l’environnement.

Ce thème du développement durable s’est imposé depuis que le changement climatique et la lutte pour la préservation de la planète sont devenus des créneaux économiques porteurs dans les pays riches, c’est à-dire depuis 2005-2006 environ lorsque le prix du pétrole a commencé à augmenter durablement.
Il est à craindre que la baisse brutale des cours et les restrictions des budgets de la recherche ne viennent compromettre les efforts entrepris. Pour être un peu optimiste on conviendra de dire que ces recherches couteuses étant mises sur les rails, elles ne pourront pas être stoppées facilement. De plus, si l’on se base sur les aides conditionnelles – mais le sont-elles vraiment ? – à l’industrie automobile, la question est bien de faire de l’environnement durable un moyen de soutenir la croissance.

L’écologie stimule un certain nombre de secteurs économiques et l’environnement devient un investissement rentable dans les pays « du Nord ».
En même temps, le développement durable condense l’ensemble des problématiques liées aux rapports « Nord-Sud ». Le cercle vertueux entre l’écologie, le politique, l’économique et le social provoque inévitablement des incompatibilités à plusieurs niveaux. Entre volonté de croissance des pays pauvres et contraintes environnementales ou sociales imposées par les riches, le débat est vite tranché dès lors que le pays émergent a les moyens de résister aux injonctions des grandes puissances. C’est le cas de la Chine et du Brésil ou de l’Inde.

Le commerce international condense l’ensemble de ces contradictions, et l’OMC doit faire face aux enjeux multiples et variés soulevés par le développement durable. Quelles normes environnementales imposer ? Quelles règlementations sociales et à quels pays ? Ces question sont autant de pierres d’achoppement dans les différentes négociations.

Quel devenir pour le multilatéralisme ?

 

Le blocage progressif du « cycle de Doha pour le développement » et la multplication des accords bilatéraux et régionaux favorisent la régionalisation de l’économie mondiale. Dex blocs se constituent : autour de l’Union européenne, l’Association de libre-échange nord-américaine (Aléna) et l’Asie orientale, de Singapour au Japon, en passant par la Chine, Taiwan et Corée.
Le Mercosur aurait vocation à devenir la quatrième puissance autour du Brésil.
De cette situation, découlent deux interrogations majeures.

Un pays emergent comme le Brésil mais aux capacités de production très diverses a tout intérêt à profiter du multilatéralisme tout en constituant sa zone d’influence, Ainsi, fin mai 2008, un nouvel organisme régional est né dans cette région à l’initiative du Brésil : l’Union des nations sud américaines (Unasur). Ce forum de dialogue politique regroupe douze pays ayant pour objectif la prévention des conflits sans recourir à l’Organisation des États américains (OEA), dont font partie les États-Unis.

En second lieu, la libéralisation et la multilatéralisation des échanges constituent un facteur majeur de la croissance de l’économie mondiale depuis 1950. En revanche, s’agissant de l’accès au développement des pays du tiers-monde, on observe que l’expérience passée (Brésil, Corée, Malaisie ou Taïwan à partir des années 1970) et présente (Chine et Inde) repose sur un protectionnisme considérable, comme le Japon à l’ère Meiji et après la seconde guerre mondiale.

Garantir à ces pays que le multilatéralisme constitue le meilleur moyen pour parvenir au développement représente le principal défi de l’OMC. Dans le cas contraire, ces pays pourraient être alors davantage intéressés par des blocs régionaux. L’ASEAN a pris des mesures en ce sens, pour la gestion des stocks de pétrole il ya deux ans au moins et il y a fort à parier que la tendance ne se renforce.