Issu du foisonnement des publications liées au centenaire de la Grande Guerre, Créer avant de Mourir. Des œuvres dans les tranchées, n’est pas une nouveauté mais un ouvrage déniché chez un soldeur.

Dans son très large propos liminaire, Chantal Grell écrit que l’art des tranchées, en France comme en Belgique, n’est pas considéré comme un art mais seulement « comme un artisanat, de l’ordre du bricolage (p.11) », ce qui n’est pas le cas dans d’autres pays. Pire encore, les artefacts produits sont parfois liquidés par les familles pour des sommes dérisoires.

Les œuvres réalisées par les soldats ne l’étaient pas à des fins de constitution de collections mais constituaient un puissant dérivatif à la violence de la guerre.

Des séries de briquets, cure-pipes, tabatières, cendriers furent ainsi constitués mais également des chausse-pieds, des lampes à huile, des bouillottes, des timbales, des coupe-papier (très répandu), des bagues (fabriquées à partir de plomb ou d’acier des têtes d’obus), des porte-photos, des plumiers ainsi que les fameux vases fabriqués à partir de douilles, ceux qui se trouvaient parfois sur les linteaux de cheminées.

Les sujets qui figurent sur les douilles sont souvent patriotiques (Marianne, coq gaulois, devise, couple royal belge…) ou militaires (figuration d’une bataille). Des ornementations végétales (chêne, olivier, lierre, pavot, coquelicot…) et animalières (papillon, grue, phénix) y figurent, certaines chargées évidemment d’une forte symbolique.

Chantal Grell écrit que l’art des tranchées est « émouvant pour qui sait le regarder et le comprendre » et qu’il « exprime avec pudeur et réserve le courage de soldats qui se savaient sacrifiés (p.28) ».

Pierre-Marie Deparis (« Quelques notes sur l’artisanat de douilles d’obus », p.31-39) s’intéresse aux douilles d’obus, aux conditions de réalisation des œuvres qui y figurent et aux différents types de figurations qu’elles comportent.

Arnaud Péters (« Techniques et savoir-faire des artisans de tranchée », p.43-52), évoque les techniques des « orfèvres » des tranchées et Thierry Babette (« Les couteaux de tranchées », p.55-57) propose un exposé sur les couteaux utilisés par les soldats. Enfin, Pascal Pirot (« Les opérations militaires de la Première Guerre mondiale », p.61-72) revient sur les opérations militaires du premier conflit mondial.

L’ouvrage comporte, en sus, de très intéressantes photographies de Maxime Loxhay, Maréchal des Logis au 8e régiment d’artillerie, évoquant la vie au front et les destructions liées à la guerre en Belgique, ainsi qu’un catalogue avec des « œuvres emblématiques » de l’art des tranchées, à l’instar de la douille d’obus figurant ci-dessous qui représentent deux paysans s’embrassant.

Créer avant de Mourir est un petit livre qui pourra être utilisé avec profit dans le cadre d’une séquence consacrée à la Grande Guerre.

Grégoire Masson

 

Douille d'obus figurant deux paysans qui s'embrassent.
Douille d’obus figurant deux paysans qui s’embrassent.