Vous êtes « un être hybride, mi-étudiant, mi-adulte, coincé entre deux âges » (Lhérété, 2011), bref un doctorant, alors ce livre est fait pour vous ! Sa lecture vient à point nommé pour rebooster les étudiants laborieux en cours de rédaction. Car, quand on s’embarque dans une aventure de longue haleine de la sorte, il est bon de se plonger dans des ouvrages de méthodologie qui rassurent et poussent à continuer dans la voie engagée et dans les délais impartis (de plus en plus courts depuis la réforme du doctorat en 2007). Si Les ficelles du métier d’Howard S. Becker ou L’art de la thèse de Michel Beaud sont les livres de chevet de tous, il faudra désormais y compter, parmi les indispensables, cet ouvrage lumineux.

Ce livre est le résultat du séminaire doctoral de l’EHESS Les aspects concrets de la thèse mis en œuvre par Moritz Hunsmann (politologue post-doctorant à l’EHESS) et Sébastien Kapp, (sociologue collaborateur à l’Université Libre de Bruxelles). Le blog éponyme, est l’indispensable complément à l’ouvrage puisqu’il permet d’écouter et de voir les vidéos des séances du séminaire. L’ensemble (livre et blog) regorge de conseils aussi simples qu’indispensables. Howard S. Becker a préfacé l’ouvrage et, comme à son habitude, donne des tuyaux tout simples pour arriver au bout de cette rédaction qui met à l’épreuve l’endurance des plus motivés. « (…) Je vais vous livrer un secret qui m’a permis de finir ma thèse rapidement et sans souffrance inutile. J’écrivais deux pages par jour, sans exception. C’était ma tâche quotidienne. (…) Un ami avait fait le calcul à ma place : si l’on écrit deux pages par jour, à la fin de l’année, on disposera de 730 pages, c’est-à-dire assez pour au moins deux thèses. » (p. 15). Car le maître mot de Becker face à l’angoisse de la feuille blanche (ou du clavier) est toujours le même : il vaut mieux écrire quelque chose de mauvais que rien du tout. Il est plus facile de retravailler un texte imbuvable qu’un texte qui n’existe pas. Une évidence, dont il ne reste plus qu’à se convaincre !

Les articles réunis ici sont là pour ça et même si tous les sujets sont différents, les problématiques de recherche sont très semblables. « La thèse se doit de rendre compte, d’expliciter les incertitudes et choix qui ont été faits. Elle conserve ainsi une bonne partie de l’échafaudage qui a rendu possible la construction du travail et qui rend compréhensibles les modalités de production du savoir. » (p. 44) Les textes rassemblés sont criants d’esprit pratique (que faire des conseils (ou de l’absence de conseils) de son directeur de thèse ?, Rédiger sa thèse comme on assemble un puzzle, la communication orale, publier pendant sa thèse, le canon à idées. Les opportunités du numérique pour les jeunes chercheurs…) et de vérités toutes banales qu’on a besoin de lire pour s’en convaincre. La question des méthodes d’enquête et de production de données n’est pas occultée. Les auteurs sont nombreux à battre en brèche la partition qualitatif / quantitatif et le cloisonnement entre les disciplines. Ils militent pour l’innovation en termes de recherche, compétence particulièrement appréciée sur le marché universitaire. Toute méthode est bonne à condition d’être explicitée : « Fondamentalement, l’auteur prend le lecteur par la main pour l’emmener dans un lieu inconnu ; tout en lui ménageant quelques surprises, il lui explique où ils vont et pourquoi ils y vont. » (p. 209) S’il faut écrire pour penser, il faut avoir en tête que « parler n’est pas écrire » (p. 218). La publication d’articles dans des revues scientifiques est indispensable comme l’est la participation à des colloques et à des séminaires mais les compétences à mettre en œuvre ne sont pas du même ordre et il faut en être conscient, même si dans les deux cas, il faut fournir matière à discussion. Les candidats aux pré-sélections au concours Ma thèse en 180 secondes qui se déroulent cette semaine à Paris Ouest en savent quelque chose ! Un coaching spécial a été mis en place par les services universitaires pour entraîner ces poulains qui représenteront la fac à l’international. Car, les doctorants sont les vitrines des universités et il ne faut pas oublier de les bichonner !

Catherine Didier-Fèvre © Les Clionautes