Avec les nouveaux programmes de la classe de sixième en histoire, les enseignants sont amenés à renouveler leurs démarches d’enseignement. Le programme est construit selon une structure tripartite (« connaissances », « démarches » et « capacités ») qui s’ancre dans le Socle commun.
Les capacités mises en valeur s’appuient largement sur la maîtrise de la langue et font une large part au récit. Or ce passage de la parole à l’acte écrit est toujours aussi problématique. Par ailleurs, comme le rappellent les auteurs en introduction, trois grands axes sous-tendent les objets d’étude proposés par les « démarches » : les hommes qui sont les acteurs de l’histoire ; les lieux qui permettent d’approcher les traces visibles laissées par l’histoire ; des récits fondateurs. « Hommes, lieux ou récits fondateurs doivent donc permettre d’aborder l’histoire par un objet précisément circonscrit et aisément accessible aux élèves ».
La tâche est ambitieuse d’autant que la recherche de documents variés, pertinents et de supports adaptés à un usage en classe restent le pilier de nos enseignements. Dix enseignants (dont un actif Clionaute) sous la houlette de Pascale Goutagny, IA-IPR de l’académie de Rouen, se proposent d’aider concrètement à la conduite des séquences dans le cadre du nouveau programme de 6ème en vigueur depuis la rentrée 2009.
Organisation de l’ouvrage
L’ouvrage traite l’ensemble des thèmes du programme. Il s’appuie sur des situations d’apprentissage problématisées et proposent des pistes fondées sur la méthode inductive, en utilisant de nombreux documents inclus dans le fascicule et dans le DVD-Rom. Une large part est réservée à l’histoire des arts, introduite au collège.
Chaque thème est présenté de la même manière : pour commencer, une présentation des termes de la séquence, des bornes chronologiques et de la bibliographie et sitographie récentes sur la question. Dans un second temps, une mise au point scientifique permet d’actualiser les connaissances rapidement (une double page) mais clairement. Viennent ensuite les propositions d’activités organisées autour de 4 rubriques : « identifier les documents », « analyser et confronter les documents », « diversifier les situations pédagogiques » et « synthétiser les idées-clefs ». Enfin, le thème s’achève le plus souvent par une mise en perspective à l’aide de cartes et/ou de chronologies qui font office de bilan. Les problématiques sont clairement formulées et permettent de varier les approches.
Contenu
Les propositions font la part belle aux documents (textes, iconographie), socle fondamental du travail en histoire. Certaines propositions sont classiques comme le travail sur les Grandes Panathénées à partir de la frise du même nom ou sur le Principat d’Auguste, ce qui n’ôte en rien leur qualité.
D’autres sont plus originales. Ainsi une activité invite à travailler la mort des héros dans l’Iliade autour de la question « quel culte est rendu aux morts dans l’Iliade ? » et s’appuie sur la comparaison d’extraits d’Homère et de vases du peintre athénien Brygos. Une autre propose d’étudier les productions et échanges dans l’empire romain à travers le commerce de l’huile d’olive, à l’aide d’une mosaïque et d’amphores.
Les TICE ne sont pas oubliées avec la visite de Rome au moyen de la maquette virtuelle réalisée par l’université de Caen.
Les questions sur les mondes lointains (la Chine des Hans ou l’Inde des Gupta) proposent des pistes intéressantes autour d’un fil directeur. Les séquences sur la Chine sont centrées sur la soie à savoir pourquoi la soie est une expression de la civilisation chinoise, comment le commerce de la soie est né et comment la soie est un instrument au service de la diplomatie impériale. Un des parcours diversifiés incite à travailler la soie sous l’angle de l’histoire des arts notamment à travers la représentation du cheval dans la culture et l’imaginaire chinois car la route de la soie est aussi la route des chevaux.
Le chapitre sur l’Inde des Gupta se centre sur l’histoire des arts : une activité pose la question du rapport entre le temple de Vishnu, situé à Deogarh en Uttar Pradesh et la cosmogonie hindoue. L’autre interroge la signification des représentations d’un homme à tête d’éléphant.
Le DVD-ROM permet d’utiliser les documents proposés à l’étude en les vidéo-projetant. Sont également proposées quelques fiches élèves. Certaines sont de simples pistes, d’autres sont livrées clefs en main dont quelques unes corrigées comme celle sur Moïse. Les reproductions sont présentées par un cartel précis permettant une identification rigoureuse et aisée des documents. Elles peuvent être agrandies pour une plus grande lisibilité.
Un outil précieux malgré quelques imperfections
Cet ouvrage est utile pour les enseignants pour plusieurs raisons.
– Tout d’abord, il fait un point rapide mais salvateur sur le renouvellement des éclairages scientifiques et des problématiques. En ce sens, la « mise au point sur l’Orient ancien » est un modèle de concision et de précision.
– Il s’intègre parfaitement dans l’optique des nouveaux programmes qui, tout renouvelant les contenus, offre de larges possibilités de choix à l’enseignant quant à la conduite de ses séquences : les plus de 200 documents proposés sont en cela une mine dans lequel on ne manquera pas de piocher avec d’autant plus de curiosité que nombre d’entre eux sortent des sentiers battus des manuels.
– Enfin, l’un des soucis des auteurs est de donner aux enseignants des outils précis et des analyses permettant d’éviter l’écueil d’un enseignement « désincarné ». L’ouvrage permet en effet de bien saisir l’articulation entre les études de situations, lieux et personnages qui ne doivent en aucun cas servir à la construction d’un savoir historique général qui serait déduit de leurs caractères propres et l’étude d’une réalité historique inscrite dans la maîtrise de repères spatio-temporels. Il s’agit de rendre l’histoire concrète ce que réussissent bon nombre de propositions du fascicule.
La qualité de l’ouvrage ne doit pas occulter quelques imperfections à l’heure où les TICE sont valorisés. Le DVD-Rom n’est qu’un simple support de projection des documents comme l’aurait fait aussi efficacement une série de transparents et un rétroprojecteur. Il n’existe aucune fonctionnalité permettant un travail plus actif sur les documents tels une palette permettant d’entourer, de souligner, de cacher et de zoomer sur un détail par exemple. Il n’est pas non plus possible de mettre en regard deux documents ce qui est dommage et ce d’autant plus que les activités sont construites autour de la capacité « confronter les documents ».
Au total, Enseigner le programme d’histoire 6ème est un outil de travail intéressant et stimulant sur le fond mais dont la facture et notamment l’articulation support papier/support numérique laisse sur sa faim.
Marie-Anne Vandroy