Sous un titre particulièrement accrocheur, Fweley Diangituwa, docteur en sciences économiques et sociales, présente un long plaidoyer en faveur de l’intégration régionale des pays d’Afrique centrale. Citoyen de la République démocratique du Congo, cet auteur porte un regard particulièrement critique sur les politiques publiques mises en œuvre dans son pays et chez ses voisins.

Bruno Modica est chargé de cours en relations internationales à l’IEP de Lille dans le cadre de la prépa ENA

Le sous-titre de cet ouvrage, « plaidoyer pour la création d’une communauté économique des pays côtier de l’Afrique centrale » résume parfaitement la finalité du propos de l’auteur. Malheureusement, ce dernier n’en reste pas là. Pour essayer de coller à son titre Fweley Diangituwa développe sur des thème déja largement traités sur la géopolitque en général et la mondialisation.
Le livre de 316 pages souffre d’une absence d’unité et est composé de chapitres et de parties juxtaposées d’intérêt inégal.

Le premier chapitre: pourquoi la géopolitique ? associe des généralités sur la spécialité popularisée par Yves Lacoste dans les années 70 à des remarques plus spécifiques sur des intégrations régionales en Afrique Australe notamment. Celles-ci aboutissent à un constat plutôt banal, c’est-à-dire que le géant économique que constitue l’Afrique du Sud, est, depuis la fin de l’apartheid, le principal bénéficiaire de cette intégration régionale à partir de la COMESA, tandis que les structures héritées de la ligne de front contre l’Apartheid, dans lesquelles le Zimbabwe était el pays le plus important vivotent au gré des fluctuation des cours des matières premières dont ces pays sont des exportateurs majeurs.

Toujours dans ce premier chapitre, on passe ensuite à d’autres sujets, comme les difficultés de l’union du Maghreb arabe face à la communauté européenne, ignorant superbement les accords euro-méditerranéens pour terminer sur les guerres en Asie du Sud Est. La cohérence de l’analyse qui est réelle, souffre de ce fait de ces aller retours entre une présentation très pointue de la situation en Afrique australe et centrale et des généralités sur d’autres régions du monde.

Le second chapitre, « la mondialisation, origine et manifestations » est également du même niveau. Les généralités qui figurent dans la plupart des ouvrages sur la question sont reprises ici, mais ne sont pas, et c’est dommage reliées au cas africain qui serait tout à fait éclairant de ce point du vue. De ce fait, on reste souvent sur sa faim à la lecture de ce chapitre qui constitue pourtant une utile synthèse de sources multiples et largement citées. Parfois sur les effets du tourisme et les trafics de drogue comme phénomènes reliés à la mondialisation, on aurait aimé des développements plus longs argumentés par un travail de recherche plus important. Cela est d’autant plus vrai que l’Afrique Australe et centrale fournit des exemples particulièrement intéressants mais il est vrai encore peu étudiés.
De la même façon, l’analyse de la thèse de Samuel Huntington, sur le choc des civilisations, apparaît dans ce chapitre et donne plutôt les conceptions de l’auteur sur ces positions en général qu’un éclairage sur le cas particulier de l’Afrique.

Les quatre derniers chapitres traitent enfin de l’Afrique et plus spécifiquement du rôle de la république démocratique du Congo. Le problème rencontré dans les autres chapitres est le même, à savoir la cohabitation d’arguments très vagues : « beaucoup de gens préfèrent avoir un téléphone portable plutôt que manger correctement », et quelques remarques précises sur les difficultés de circulation dans l’ex-Zaïre soumis à une invasion étrangère avec les Rwandais, après 1994.

La fin de l’ouvrage est une longue énumération de ce qui devrait être fait pour cette Afrique centrale et Australe et qui tombe d’ailleurs sous le sens.
On y parle de développement du réseau routier et des réseaux numériques, du développement de l’électricité pour lutter contre la déforestation, d’un contrôle des fonds marins, de la création d’une école régionale de gardes-côtes, avant de conclure sur le nécessaire apprentissage de la démocratie comme élément décisif pour en arriver à la bonne gouvernance.

La conclusion de cet ouvrage oppose deux modèles démocratiques, le majoritaire avec une alternance entre majorité et opposition et le consensuel, avec un partage du pouvoir. Ce modèle aurait la préférence de l’auteur car plus adapté à la diversité de l’Afrique…

Cet ouvrage contient de très nombreuses références et réflexions pertinentes et utiles pour le développement de l’Afrique, ce qui est à l’évidence la motivation de l’auteur. Il n’est pourtant pas un ouvrage de référence car il oscille entre le manuel général et le cours retranscrit, avec quelques approximations dans le traitement des questions qui peuvent se révéler peu éclairantes. Cet ouvrage pourrait par contre alimenter un débat sur les chances de développement de l’Afrique sans que l’on puisse y trouver, et c’est heureux, de conclusions définitives.

Bruno Modica
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