L’œuvre est scénarisée par Jean-François Vivier, déjà auteur de plusieurs BD historiques, certaines évoquant la Résistance comme Tom Morel, Vivre libre ou mourir et Hélie de Saint-Marc, d’autres s’intéressant à la montagne comme La grande crevasse ou Premier de cordée. Cette œuvre lui permet d’évoquer à nouveau, avec Denoël, Franz Stock, prêtre catholique, dont il a fait une biographie en BD en 2016 : Franz Stock, passeur d’âmes. C’est la troisième fois qu’il collabore avec l’auteur et dessinateur, connu notamment pour sa série Ombres et lumières (deux tomes).
Cette bande dessinée démarre par une page de remerciements de la famille d’Honoré d’Estienne d’Orves. Cela montre que la BD se veut officielle et autorisée, que la famille a participé à l’écriture, pour qu’elle puisse se montrer la plus fidèle aux nombreux écrits laissés par Honoré durant sa captivité. Néanmoins, les auteurs ne tombent jamais dans l’hagiographie. Ils restent dans une analyse très complète et détaillée de la vie de l’officier. Ils mêlent les allers-et-retours chronologiques, multipliant les ellipses, mais sans jamais se perdre dans la confusion temporelle qui touche parfois certaines œuvres. Chacun des retours dans le temps est justifié et expliqué, et s’intègre parfaitement dans la trame narrative.
Un bémol sur les dessins de Denoël cependant. Que ce soit à l’âge adulte ou pendant l’enfance, les traits du personnage principal restent peu expressifs, tout comme ceux des personnages secondaires malheureusement. Peu de cases ou de planches complètes à retenir d’un point de vue graphique. Est-ce une volonté des deux auteurs pour n’attirer l’attention que sur le destin de ce personnage hors du commun? La question peut-être soulevée.
L’œuvre est donc une biographie. Elle nous fait alterner entre l’enfance, l’adolescence et le parcours militaire d’Honoré. Brillant étudiant, engagé de la première heure dans la France libre, martyr de la Résistance. Elle montre son influence, son charisme, son rôle prépondérant au sein de l’organisation gaulliste, notamment à travers le réseau Nemrod. Les auteurs ont insisté sur l’importance de la religion catholique pour le personnage, jusqu’à ses derniers instants. C’est ainsi qu’ils donnent aussi un rôle important au père Stock, aumônier des prisons parisiennes durant la guerre et directeur du Séminaire des barbelés, épisode extrêmement intéressant des relations entre nazis et catholicisme.
Cette bande dessinée est clairement destinée à mettre mise entre toutes les mains. Dans un cadre scolaire, elle peut être utilisée sans problème dès le collège, en Troisième, et au lycée, en Première, pour évoquer la Résistance, ses missions, ses buts, ses moyens d’actions, ses dangers. Dans le cadre du programme de Terminale, si l’on évoque la mémoire de la Résistance, elle peut être un atout dans l’évocation des courants multiples de cette dernière, dans l’analyse du mythe résistancialiste et dans la critique de l’unité résistante que de Gaulle a voulu imposer à la société.
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Mathieu Henry, pour Les Clionautes