Romain Bernard est un jeune illustrateur né en 1981 et qui a étudié les Arts appliqués à Angoulême puis à Toulouse où il vit désormais. Après avoir été infographiste, il se consacre depuis 2015 à l’illustration de presse sous le pseudonyme de Tight, pour des revues comme L’Éléphant, Libération ou Psychologies. Après Chromopolis, publié chez Maison Eliza et sorti en février 2019, Jour après Jour est son deuxième album pour enfant en tant qu’auteur-illustrateur.
« Aimé m’a raconté qu’il avait sept ans quand sa maman lui a offert un appareil photo. Dès lors, il n’a cessé d’observer le paysage ». C’est ainsi que commence cet album qui va fonctionner comme un véritable album-photographique. Sur la page de gauche, Aimé grandit, entouré de ses proches et de ses nouveaux proches. Sur la page de droite, toujours le même point de vue de la ferme d’Aimé. Si le point de vue ne change pas, le paysage, quant à lui, se transforme au rythme des saisons, puis des années. L’activité rurale se développe.
Progressivement, que voit-on ? Le chemin de fer arrive près de la ferme. Une usine finit pas s’installer, donnant du travail à un grand nombre. Puis, la crise frappe et l’usine doit fermer, non sans lutte. Lorsque l’hiver arrive, il vient geler une campagne désertée. À ce moment, « tout semble vide »… Et puis arrivent des extra-terrestres. C’est d’ailleurs l’un d’entre eux qui raconte l’histoire. Et l’histoire devient celle de ces nouveaux arrivants, de ces nouveaux ruraux avec qui il faut composer. « Jour après jour, chacun a trouvé sa place ». Le village est resté peuplé et s’est même embelli.
On comprend très vite que Jour après jour raconte l’histoire des campagnes françaises, de leurs transformations, de leur désertification et de l’arrivée des nouveaux ruraux. Exurbanisation, tertiarisation et redynamisation sont des thèmes traités en filigrane par les images de cet album dédié entièrement aux paysages de la ruralité. Le rapport texte/image est formidablement bien traité, proposant un véritable jeu avec la double-page. D’un côté, à la double focalisation du témoin extraterrestre qui parle pour l’humain Aimé, répond, de l’autre côté, le paysage aux lignes simples et géométriques et aux couleurs pastel. Un album très réussi.