La mort de Louis XVI, la captivité de la famille royale au Temple, le mystère Louis XVII : cette suite d’événements où l’histoire touche au mythe est par elle-même légendaire. Pour les connaître dans leur réalité quotidienne, il faut retourner aux rares pièces authentiques. Voici donc rassemblés ici trois témoignages majeurs : ceux de Cléry, le valet de chambre du roi, d’Edgeworth de Firmont, le confesseur du roi, enfin de la fille de Louis XVI et de Marie-Antoinette, seule survivante du drame qui fit périr sa famille.
Grâce à ces textes, nous pouvons revivre heure par heure, et comme si nous y étions, l’un des épisodes les plus émouvants de l’histoire de France.

 

Cet ouvrage est composé de trois récits-témoignages de personnes ayant côtoyé la famille royale de France lors de leur captivité au Temple :

– le premier témoignage est celui de Jean-Baptiste Cléry « Journal de ce qui s’est passé à la tour du Temple » : d’abord valet de chambre du duc de Normandie (second fils de Louis XVI) à Versailles et aux Tuileries, il devient le valet du roi lorsque celui-ci est emprisonné à la tour du Temple et plus ou moins séparé de sa famille. Fidèle à la famille royale, il reste auprès d’elle dans ses derniers et plus durs moments, dans une période où beaucoup l’ont abandonnée.
Son témoignage commence le 10 août 1792, date de la prise des Tuileries. Il raconte précisément cette journée, le sacrifice de la garde royale pour protéger la famille royale. Il raconte également comment il a sauvé sa propre vie en sautant d’une fenêtre pour échapper à la foule pénétrant dans le palais et tuant les personnes s’y trouvant. Nous apprenons que les domestiques qui avaient fait le choix de se cacher ont été massacrés par la populace, ivre de sang.

De manière fidèle il raconte les propos, la vie quotidienne de cette famille mais aussi de ce qu’il entend quant aux « actualités » de la Révolution grâce à sa femme qui lui rend régulièrement visite, mais aussi grâce aux crieurs qui viennent sous les fenêtres de la famille royale pour annoncer les nouvelles politiques: victoires de l’armée, arrêtés de l’assemblée nationale etc. Dans de plus durs moments, c’est la foule qui vient scander les nouvelles sous les fenêtres de la famille royale. Cléry relève ce triste épisode : les massacres de septembre ; notamment avec la tête de la princesse de Lamballe (amie de la reine Marie-Antoinette) portée au bout d’une pique près des murs dans le but de traumatiser la reine. Les gardes ont choisi de fermer les rideaux pour que cela ne puisse pas se faire, mais aux questionnements de la famille, l’un deux répondit que la foule était là pour montrer à la reine la tête de la princesse. Témoin de cette scène tragique, Cléry la raconte avec précision et sans tomber dans le sentimentalisme.

Il raconte également la difficulté de vivre enfermé et sous les injures de certains gardes qui ne se privent pas de les humilier. De même, il témoigne des affaires qui leur sont enlevés de plus en plus, les conditions de vie telles que les fouilles, le manque d’air, l’humidité etc. Mais aussi, ce qui frappe dans le récit, c’est la peur de Cléry d’être séparé du roi ou de sa famille, de ne plus pouvoir servir cet homme jugé très bon, agréable et humble.
Les dernières heures du roi sont racontées à la fin de ce récit, avec, on le sent, l’admiration de l’auteur pour le roi devant sa bonté avec ses « bourreaux ». Beaucoup de gardes ont été, paraît-il, impressionnés par le calme du roi avant de mourir et son humilité. Le récit s’achève au moment même où la mort du roi est annoncée par les coups de canons et les cris de « vive la nation! » entendus depuis la prison du Temple.

Ici, il s’agit du récit le plus long de l’ouvrage.

– le deuxième récit a été écrit l’abbé Edgeworth de Firmont et fait suite de manière logique au premier récit car il raconte les dernières heures du roi. L’abbé est le confesseur de Louis XVI et arrive à la Tour le matin du 21 janvier 1793, avant 5h, pour célébrer la messe qui doit être faite avant 7h sur ordre de la Convention. Il accompagne le roi jusqu’à l’échafaud et est le seul témoin présent à ses côtés pour raconter le trajet effectué depuis la tour du Temple jusqu’à la place de la révolution, l’actuelle place de la Concorde à Paris. Son récit s’achève par la retranscription de l’ultime phrase prononcée par Louis XVI.
C’est un récit également intéressant car il permet de comparer les derniers moments racontés par Cléry et les siens ; ils sont concordants ce qui est un gage de fidélité quant au témoignage de ces événements.

Ici, il s’agit du récit le plus court de l’ouvrage.

 

– le troisième et dernier récit est le témoignage de Marie-Thérèse-Charlotte de France, aussi appelée Madame Royale, fille de Louis XVI et de Marie-Antoinette.
Son récit est précieux car il est le seul témoignage direct sur ce qu’a pu vivre un des membres de la famille royale emprisonnée. En effet, nous n’avons pas d’autre écrit témoignant de la vie quotidienne au Temple. Elle raconte, certes de manière admirative, l’humilité de ses parents face aux geôliers et leurs irrespect face à cette famille. Il faut rappeler ici que parmi les membres de la famille royale étaient présents le roi, la reine, leur fils le dauphin, leur fille et la sœur du roi Madame Elisabeth qui mourra sur l’échafaud avec piété. Elle est connue pour sa bonté, et surtout pour avoir fait libérer une femme enceinte condamnée à mort dans le même groupe qu’elle.
Ainsi, la fille du roi nous raconte les séparations qu’elle a subit : d’abord son père, puis son frère, sa mère, et sa tante. Elle raconte ainsi la dégradation de la santé de sa mère, les maladies qu’elle-même a subit durant son emprisonnement, les nouvelles qu’elle a pu avoir de son frère lors du procès de sa mère (les infamies qu’il a tenu contre ses proches l’a scandalisée), les difficultés et la pesanteur de la vie quotidienne liées à la présence des gardes, les fouilles, l’enlèvement de biens….
Son témoignage s’achève par la mort de son frère le 8 juin 1795 qu’elle n’apprend cependant que plus tard. Avec les annotations, nous pouvons croiser les témoignages des différents médecins qui se sont succédés à son chevet et qui n’avaient pas le même rapport avec Louis XVII quant à son traitement. Nous apprenons ainsi son état, son évolution physique ; d’après ces témoignages il était devenu un enfant rachitique à cause des conditions de vie déplorables qu’il a subit durant son emprisonnement et en particulier lorsqu’il avait été abandonné dans sa « chambre ».
A travers son témoignage, nous savons également qu’elle n’avait jamais été mise au courant de la mort de sa mère puis de sa tante ; lui laissant alors l’espoir d’un jour les revoir. Elle n’apprit leur mort seulement en 1795 sûrement par la dame de compagnie qui lui a été confiée Madame Chanterenne. C’est d’ailleurs à partir de là qu’elle rédige ses mémoires.

Elle fut libérée et échangée contre des prisonniers de guerre français, capturés par l’armée autrichienne, le 19 décembre 1795, jour de ses 17 ans, après avoir passé trois ans derrière les murs de la prison du Temple. Sa destination fut Vienne, pour retrouver la famille de sa mère et vivre à la cour de l’Empereur François II qui est alors le neveu de Marie-Antoinette.

 

 

En préface, l’éditeur rappelle que comme tout témoignage, il est possible que des faits soient enjolivés ou exagérés. A la lecture de ces trois récits, il est à noter qu’ils sont assez distants et neutres dans la mesure où ils ont été écrits quelques années après cette période. Mais il n’y a pas de place à la rancœur ou autre, comme on aurait pu le croire en lisant la préface.
Cette édition présente l’intérêt d’avoir beaucoup de notes de bas de pages (toutes référencées en fin d’ouvrage) dans le but d’éclaircir certains points, d’en corriger d’autres. C’est très utile pour mieux comprendre le contexte, qui n’était pas toujours connu des auteurs.

 

C’est un ouvrage très intéressant pour connaître plus en détails les dernières années de la famille royale de France pendant la révolution française, et ce, par le biais de trois témoins.