Encore une légende qui s’effondre ! Catherine de Médicis ne serait pour rien dans l’introduction en France des macarons, des sorbets et de la frangipane !!! Et l’usage de la fourchette ne lui devrait rien ! Le mythe italien de la gastronomie française en prend un sacré coup !
Jean-Marc Stébé l’affirme : « Il est impossible d’identifier dans les archives la présence des cuisiniers italiens à la cour de France » à l’exception d’un seul, passé inaperçu.
Gastronomie… Vous avez-dit gastronomie ?
Qu’est-ce que la gastronomie ? En bon sociologue et en gourmand averti, Jean-Marc Stébé entend d’abord la définir, dans un ouvrage, qui n’est pas sans rappeler, en moins austère, la collection Que sais-je ?. Le premier chapitre montre comment le terme s’impose peu à peu et la façon dont il évolue au fil des siècles. On y trouvera un portrait de Jean Anthelme Brillat-Savarin, auteur de la Physiologie du goût ou méditations de gastronomie transcendante… (1826), livre qui suscite des critiques de la part d’Antonin Carême (cuisinier de Talleyrand pendant le congrès de Vienne) ou de … Charles Baudelaire et d’Alexandre Dumas. Mais aussi, quelques pages sur le repas gastronomique des Français, patrimoine immatériel de l’humanité depuis 2010, qui susciteront un élan patriotique voire alimenteront le roman national parmi nos compatriotes, parfois enclins toutefois à le délaisser pour les charmes douteux de la restauration rapide.
De Versailles à la Nationale 7, les tribulations de la gastronomie en France
Les chapitres deux et trois sont peut-être ceux qui attireront le plus l’attention des clionautes gourmets et gourmands. Ainsi, l’historien en culottes courtes, et peu au fait de ces choses, apprendra que, dès le XVIIème, siècle émerge une déjà « nouvelle cuisine ». Plus tardif, le goût louis-quatorzien pour le pouvoir et la mise en scène des repas du grand roi rappelleront à l’enseignant chevronné une scène du beau film, réalisé pour la télévision par Roberto Rossellini, La Prise de pouvoir par Louis XIV (1966). Enfin, les mystères du service à la française et du service à la russe seront éclaircis sans que soient négligés ni l’étude du lieu où l’on mange, ni la vaisselle nécessaire pour ce faire. Puis, l’invitation au voyage gastronomique nous transportera du Palais Royal, à la ville de Paris tout entière, aux grands palaces et enfin le long des routes de vacances.
Du Guide Michelin aux plateaux de télévision, la consécration du chef
Il est une manie française à laquelle nous cédons toutes et tous et qui, paraît-il, agace beaucoup hors de l’Hexagone : celle de discourir sur les plats. Ceux que nous mangeons, ceux que nous avons mangé et bien d’autres encore dont nous rêvons parfois. Cette manie populaire explique-t-elle le succès des guides qui depuis le Michelin, en 1900 jusqu’ au Guide Fooding en passant par le Gault et Millau, analysent les plats, discourent sur les mets dégustés et hiérarchisent les restaurants ? Et l’ouvrage de consacrer ici quelques lignes à un des pères du discours gastronomique, Grimod de La Reynière[1].
Discourir sur les mets est bien, les déguster est mieux… Mais pour cela, il faut des chefs en cuisine ! Métier exigeant, métier de passion, qui suppose une formation solide et un travail rigoureux. Pour atteindre l’excellence, longtemps les brimades étaient considérées comme normales dans les cuisines, dans lesquelles les tâches étaient parcellisées. De nouveaux chefs et de nouvelles cheffes, avec un regard différent, semblent considérer que ce n’est pas forcément nécessaire. La haute cuisine ne justifie ni le sexisme ni le racisme. Une bonne nouvelle dans un monde en mutation.
Enfin, l’ouvrage n’oublie pas les émissions télévisées qui ont fait, et font encore, les succès des grands chefs ou de personnalités reconnues. Que l’on pense à Raymond Oliver dès les années 1950 du temps de la défunte ORTF, à La cuisine des Mousquetaires de Maïté dans les années 1980-1990 ou à Cyril Lignac plus récemment. Sans oublier aujourd’hui les réseaux sociaux.
Un livre bref, appétissant, à déguster tranquillement.
[1] À ne pas confondre avec Robert Courtine, au sombre passé collaborationniste, qui signait La Reynière dans le journal Le Monde.
Voir l’article de Raphaëlle Bacqué,


