Les auteurs affirment un credo: étudier l’Afrique comme un acteur et non comme un objet. Les contributions issues du colloque: L’Afrique indépendante dans le système international d’octobre 2010 qui a réuni les Internationalistes dans le cadre du Cinquantenaire des Indépendances se partagent en trois grandes tranches chronologiques: les Années 60, l’entrée de l’Afrique dans le système international 70-90, mondialisation. Les approches sont tantôt à l’échelle du continent tantôt consacré à tel ou tel état, analyses politiques, économiques elles offrent des points de vue divers sur l’histoire récente du continent noir.

L’entrée dans l’indépendance

Un moment clé analysé par G.-H. Soutou à travers la vision de Jean-Marie Soutou qui fut directeur des Affaires africaines et malgaches au Quay d’Orsay (1963-1966). Dans le contexte de la guerre froide fallait-il organiser les états nés de la décolonisation dans un réseau de relations bilatérales comme le préconisait Foccart ou envisager des relations multilatérales avec les autres puissances (USA, RU) comme le pensait Couve-de Murville? Les crises: Brazzaville (1963), Gabon (1964) révèlent les positions de De Gaulle. Ce premier chapitre est aussi l’occasion de dresser le portrait d’un grand serviteur de l’Etat Jean-Marie Soutou.

P.-M. Durand prend un exemple, celui du Congo: conditions de l’indépendance de la colonie belge qui pour l’auteur constitue un traumatisme national fondateur qui hante la mémoire d’un pays. Du Congo au Zaïre, de nouveau nommé Congo, le pays semble voué à la violence politique, de Lumumba à Kabila en passant par Mobutu les grandes étapes d’une histoire récente.

R. Perron analyse les relations entre ces jeunes états et le mouvement géopolitique du “Tiers Monde”. Après un rappel concis mais utile de la Conférence de Bandoeng elle décrit l’évolution de 1955 à 1973 du Tiers Monde politique au Tiers Monde économique jusqu’à la charte d’Alger.

La mise en place de l’Afrique dans le système international (1970-1990)

M. Foucher montre comment les crises sont, dans les années 60, avant tout territoriales, questions de frontières même si les limites héritées de la colonisation ont été finalement peu modifiées malgré des points chauds: Sahara occidental, Soudan, Somalie. L’auteur rappelle la genèse de ces conflits dans la documentation lacunaire concernant les tracés coloniaux, les modes de résolution et le développement actuel des activités transfrontalières.

Deux organisations: OUA (1963) puis Union Africaine (2002) sont nées durant cette période. P. Berthelot en rappelle les réalisations concrètes pour nuancer un bilan habituellement très critique.

M. Badji s’intéresse à la francophonie et au rôle de son organisation dans la gestion des conflits. Il insiste sur le concept de démocratie indissociable de la francophonie. Une contribution essentiellement descriptive qui met en évidence les limites de ces actions dans la réalité d’état à parti unique?

Quand F. Turpin analyse les ambiguïtés de la Francophonie: de l’échec de l’Union africaine et malgache à la politique de coopération et au soutien de la langue française. Il décrit les différents temps de cette politique et l’ouverture progressive et lente au multilatéralisme, influence grandissante du Québec.

Ce sont les questions monétaires et financières qui sont abordées par L. Quennouëlle-Corre, elle montre deux faces de cette histoire souvent présentée de façon contradictoire: impérialisme / générosité de l’aide. Au-delà des polémiques l’auteur insiste sur les mécanismes à l’oeuvre: une aide en augmentation constante depuis 1960 avant tout bilatérale même si la politique européenne introduit une forme de multilatéralisme renforcée par la place des instances internationales: FMI et Banque Mondiale à l’occasion de la crise de la dette.

Du dialogue Nord-Sud aux Droits de l’Homme, les relations eurafricaine sous le regard de G. Migani. L’auteur explique les accords de Lomé, leur importance et leur évolution.

La contribution de G. A. Sess montre les raisons qui ont pris l’Afrique dans ce qu’il appelle le carcan des rivalités Est-Ouest. De 1960 à 1988, comment la balkanisation et le sous-développement économique ont favorisé les relations bilatérales avec l’ancienne métropole.

L’Afrique et la mondialisation

Avec la fin du monde bipolaire et la libéralisation des marchés, l’Afrique trouvera-t-elle une nouvelle place dans l’espace mondial, une possibilité de développement? Telles sont les questions que pose G. Dussouy. Afropessimisme, place récente de la Chine en Afrique et concurrence accrue des divers partenaires sont évoqués notamment dans une carte de synthèse (p. 190). Les enjeux géostratégiques et la question démographique complètent cet article qui se conclue sur une note positive.

A.-C. de Gayffier -Bonneville montre à partir de la crise somalienne des années 90 le développement de l’interventionnisme humanitaire. Après un rappel précis des événements l’auteur analyse l’action des USA et de l’ONU avec l’opération Restore Hope: succès face à la famine, échec dans la stabilisation politique de la corne de l’Afrique.

Face à la “bonne gouvernance”, outil d’évaluation des organisations internationales comment les états africains, longtemps marqués par le parti unique, ont-ils évolués? C’est la question posée par E.-M. Mbonda. L’Afrique peut-elle, doit-elle inventer son propre modèle d’organisation politique et de développement économique?

A partir des années 90 le régionalisme semble pour J. M. Kobila, une réponse à la mondialisation. Synthèse de lecture sur le sujet, la contribution présente les tentatives d’intégrations régionales : CEDEAO, CEN-SAD…

Le dernier chapitre est consacré à une étude particulière: l’aluminium en Afrique et la présence des nouveaux pays industriels. Le secteur bauxite-aluminium montre à la fois les difficultés de gestion post-indépendance (Guinée, Cameroun) et le contexte économique mondial. C’est l’exemple choisit par F. Hachez-Leroy, d’autres produits auraient pu être évoqués tel le coltran.

Un ouvrage collectif et varié sans réelle conclusion