L’introduction dans les épreuves du CAPES d’une dimension didactique donne à un ouvrage comme celui-ci toute sa place dans la préparation des candidats à ce concours. S’interroger sur les raisons qui ont poussé à inscrire dans les programmes scolaires telle ou telle question est salutaire puisque cette réflexion permet de légitimer l’enseignement d’une thématique. Dans le cas des questions socialement vives, bien souvent les parents pauvres de l’enseignement scolaire, cette interrogation est d’autant plus nécessaire. Aussi, le cheminement intellectuel que nous propose Alain Pache dans cet ouvrage, tiré de sa thèse en didactique de la géographie soutenue en 2012, peut permettre de réfléchir aux enjeux de l’alimentation tant au niveau primaire que secondaire.

Ce formateur à la Haute Ecole Pédagogique du canton de Vaud dresse, dans une première longue partie, un tableau très exhaustif des champs de connaissances concernant l’alimentation, passant de la crise alimentaire de 2008, à la place de l’alimentation dans l’histoire, comme dans l’épistémologie de la géographie avant d’analyser les aspects proprement didactiques de la question. Cette partie mêle des développements très pointus sur les « multiples systèmes sémiotiques » et d’autres vulgarisés par les médias (Penser l’alimentation pour penser les sociétés).

La deuxième partie, très courte comparée à la première, revient sur les méthodes employées tout au long des trois années pendant lesquelles s’est déroulé ce travail de recherche. Elle décrit dans le détail les procédures ayant consisté à interroger, par questionnaire, 164 enseignants stagiaires mais aussi à mener des entretiens avec les enseignants volontaires acceptant des observations (filmées) de leurs séquences en classe (séquences ayant été intégralement retranscrites). Elle s’appuie aussi sur des travaux d’élèves collectés. Tout l’enjeu pour Alain Pache a été de placer des limites entre recherche et formation, plus particulièrement lors des entretiens individuels avec les enseignants, fortement demandeurs d’un éclairage pédagogique sur leur séquence plutôt que prêts à un entretien classique.

La troisième partie, consacrée à l’analyse des résultats, fait le constat que les enseignants ont une vision un peu primaire, voire assez catastrophiste de la situation alimentaire mondiale, occultent le jeu des acteurs, même s’ils manient correctement les échelles. Les méthodes pédagogiques mises en œuvre sont peu innovantes (importance du cours dialogué et très faible recours au débat argumenté), les apports épistémologiques de la discipline sont absents dans les mises en œuvre. Ce bilan assez sévère peut être tempéré en prenant en compte la non-spécialisation des enseignants du primaire en géographie. Il y a fort à parier que le chercheur aurait trouvé des défauts équivalents dans des séquences du secondaire.

Catherine Didier-Fèvre © Les Clionautes