Voici un titre évocateur pour les lecteurs d’Effondrement (2005) de Jared Diamond ! Sous-titré « Comment les crises climatiques ont fait basculer les civilisations ? Peut-on agir ? », ce numéro intéressera les enseignants chargés de mettre en perspective le concept de développement durable dans leurs classes.

Ce dossier conséquent revient sur les travers déterministes des quelques études réalisées en France sur le sujet : La théorie des climats de Montesquieu, pour n’en citer qu’un seul. A l’exception des travaux (Histoire humaine et comparée du climat. Trois tomes publiés entre 2004 et 2009) d’Emmanuel Le Roy Ladurie, ce sont des historiens anglo-saxons et allemands qui ont apporté de nombreuses contributions à ce sujet. C’est d’ailleurs le grand intérêt de ce dossier (constitués d’articles courts se faisant écho) de faire le point sur l’épistémologie du sujet et sur les travaux peu connus publiés en langue anglaise.

Tous s’accordent pour dire que les variations du climat ne sont pas nouvelles. L’humanité a connu au cours de son histoire des périodes de sécheresse et de refroidissement. Geoffrey Parker (Global crisis. War, climate change and catastrophe in the seventeenth century, 2013) a fait le lien entre le « minimum de Maunder » au XVIIème siècle (période pendant laquelle l’activité solaire fuit réduite et responsable d’une baisse des températures mondiales) et la « crise générale », thèse faisant référence à la vague des bouleversements politiques qui affecta toute l’Europe, avant d’élargir son champ d’études à l’Asie, l’Afrique et le Moyen-Orient. John R. McNeill, dans un article publié en 2008 (« Can history help us with global warming ? »), montre que les catastrophes attisent la solidarité comme les divisions dans les sociétés. L’élan de générosité envers les victimes (aides humanitaires, dons) côtoie des phénomènes de stigmatisation de certaines populations jugées responsables de la situation (les Coréens lors du tremblement de terre du Kanto en 1923 au Japon, les juifs lors de la Peste noire) alors victimes de violence.

Si les hommes se sont interrogés depuis très longtemps sur leur rapport à l’environnement (voir l’ouvrage de Clarence J. Glacken), c’est paradoxalement depuis le début de la révolution industrielle qu’ils en minimisent leur rôle. Le fait que l’étude de ce phénomène soit pluridisciplinaire (archéologie, climatologie, histoire, sciences politiques, économie, …) rend complexe sa prise en compte et sa lisibilité, même si depuis les années 1980 le trou dans la couche d’ozone médiatise la question, sans pour autant que des décisions majeures aient été prises. Et Sam White (historien à l’Université d’Etat de l’Ohio, auteur de The Climate of rebellion in the early modern ottoman empire, 2011) de conclure : « Exactement de la même façon que les généraux étudient (ou devraient étudier) l’histoire militaire pour se préparer à la guerre, ou que les économistes examinent (ou devraient examiner) l’histoire économique pour anticiper la prochaine crise, les citoyens et les décideurs peuvent apprendre de l’histoire du climat comment se préparer au changement climatique. » (p36)

Catherine Didier-Fèvre © Les Clionautes