Dix-huitième édition, l’opus 2007-2008 de l’état de la France a l’ambition affichée d’être « un panorama unique et complet de la France ». Au-delà de la formule, il a le mérite de présenter un tableau de la France riche de multiples points de vue. En premier lieu, l’ouvrage privilégie une approche thématique. Comme les précédentes éditions, il est divisé de manière somme toute très classique. Une partie est, en effet, consacrée à chacun des thèmes suivants : la société française, la culture, l’économie et la politique. Cependant, deux nouvelles parties contribuent à renouveler l’intérêt de cet ouvrage. L’une aborde la problématique des territoires. L’autre replace la France dans le cadre de l’Union Européenne à travers, notamment, les questions de ses institutions, de son élargissement, mais aussi les enjeux économiques et sociaux ainsi que de défense. L’autre intérêt de l’ouvrage réside dans la complémentarité de ses auteurs. Ils sont en effet issus d’horizons très différents. Si les économistes sont majoritaires, géographes, sociologues, démographes, spécialistes des sciences politiques ainsi qu’un philosophe contribuent à offrir un regard croisé des plus intéressants.
L’ouvrage compte plus de 80 articles et mises au points. Ils sont par conséquent très synthétiques. Ils font cependant une très large place à la documentation. Cartes, tableaux statistiques, graphiques mais aussi glossaires abondent. Enfin chaque article est complété par les références essentielles.
L’ouvrage est clos par une chronologie des événements les plus marquants de la période 1995-2007 et un répertoire de sites (études et recherches, ressources statistiques, administrations et institutions nationales, institutions européennes).
Il nous semble impossible de faire le panorama … d’un panorama sans le dénaturer. Aussi préférons- nous donner un aperçu du contenu d’une partie de l’ouvrage, celle consacré aux territoires. Daniel Béhar et Philippe Estèbe (Coopérative Acadie) replacent la dynamique de ces derniers dans leurs rapports avec l’Etat (mise en perspective des politiques d’aménagement depuis 1963). Ils font par ailleurs un premier bilan de l’appropriation et de la mise en oeuvre des compétences accordées par les lois de décentralisation par les différents territoires (région, département, structures intercommunales). Laurent Davezies (Université Paris-XII-Val-de-Marne) s’attache à montrer que les transferts de fonds autant publics que privés jouent un grand rôle dans la cohésion territoriale (redistribution vers les régions les plus pauvres). Il trace ainsi les contours d’une France qui, certes, n’est pas celle de la production, mais qui n’en est pas pour autant dénuée de tout dynamisme. Jean-Claude Bontron (Société d’études géographiques, économiques et sociologiques appliquées) montre que les récentes dynamiques migratoires liées à la périurbanisation, à l’attraction des grandes métropoles et des façades littorales profitent aux espaces ruraux. L’articulation entre les espaces ruraux et urbains se trouve ainsi recomposée. Les écarts entre les sociétés rurales et urbaines sont de fait amoindris mais ces nouvelles dynamqiues migratoires induisent également de nouvelles questions, celles des services publics en milieu rural ou encore du développement économique. Brigitte Baccaïni (INSEE) dresse le portrait de la mobilité et des flux migratoires en France dans ses composantes spatiales, démographiques et sociales. Jean-Claude Bontron inscrit le développement des différents territoires dans le cadre européen. Il montre le rôle positif des fonds européens dans le maintien d’une certaine cohésion territoriale. Il expose enfin la nouvelle orientation de ces fonds décidée par l’UE à partir de 2007 autour des objectifs communautaires de Lisbonne (développement économique) et de Göteborg (développement durable) et sa mise en oeuvre dans le cadre national.
Cet ouvrage est intéressant à plus d’un titre. Il aborde, en effet, les sujets délicats de manière dépassionnée et contribue ainsi à tordre le cou à certains stéréotypes très répandus dans l’opinion publique, par exemple celui de l’inefficacité structurelle de certaines politiques européennes. De ce fait, pour l’ « honnête homme », il constitue un moyen efficace et rapide de prendre du recul. Pour l’enseignant, un tel ouvrage permet une mise à jour rapide de ses connaissances, par exemple dans le domaine démographique. En outre, la lecture de ces articles très concis offre une première synthèse sur certaines questions, préalable qui permet d’orienter de manière plus efficace la réflexion et les lectures du professeur. Enfin, de nombreux thèmes abordés sont en lien direct avec les programmes de collège (4e et 3e) et de lycée (1ere et Terminale) tant en géographie qu’en histoire ou encore en Education Civique ou ECJS. Citons par exemple l’article de la sociologue Michèle Ferrand (CNRS) sur la place des femmes dans la société française. Il offre en effet une base solide pour la préparation d’un des débats proposés en Education Civique en classe de 3e, celui qui porte sur la place des femmes dans la vie politique et sociale.
Paradoxalement, la couverture ne tient pas ses promesses. Pourtant au coeur de la problématique actuel du développement, le thème du développement durable est quasiment absent de cet ouvrage. C’est le cas également d’autres sujets pourtant essentiels comme le rapport qu’entretient la France avec la mondialisation. Enfin, la place accordée à l’outre-mer est souvent marginale.
© Clionautes – Cyrille Chopin