« Population & Avenir, revue indépendante alliant rigueur et pédagogie, vous présente une analyse originale des enjeux actuels. Vous y trouverez une source d’informations, de réflexions et d’argumentaires amplement illustrés par des cartes, des graphiques, des tableaux, des schémas… »
ÉDITORIAL par Gérard-François DUMONT
COVID-19 : UNE BAISSE HISTORIQUE DES MIGRANTS DANS LE MONDE ?

Depuis les deux dernières décennies du XXème siècle, les migrations internationales ont bénéficié de l’ouverture de différents pays auparavant quasi-fermés aux migrations. Ces changements géopolitiques se sont traduits par un nombre accru de routes migratoires. Additionnés au coût considérablement minoré des transports, ils ont favorisé une hausse significative des immigrants internationaux, qui sont passés de 150 millions en 1990 à 272 millions en 2019.

La pandémie covid-19 a provoqué un coup d’arrêt historique aux migrations internationales et la réémergence des frontières et est à l’origine de 3 types différenciés et très inégalement distribués de « corona-migrations ». Le premier type de « corona-migrants » ont regagné le pays dont ils avaient la nationalité. Ces migrations de retour de personnes qualifiées sont surtout le fait de migrants originaires des pays les plus développés. Les pertes d’emploi de nombreux immigrants à faible qualification, tout particulièrement dans les pays du Golfe sont à l’origine d’un deuxième type de « corona-migrants » vers leur pays d’origine qui concerne avant tout des ressortissants des pays les moins développés. Un troisième type de « corona-migrants » concerne enfin des migrants qui se sont retrouvés arrêtés dans leur migration dans un pays de transit.

 

DOSSIER par Bernard AUBRY
TRAVERSER UNE FRONTIÈRE POUR TRAVAILLER – LA FRANCE « CHAMPIONNE » D’EUROPE

La pandémie Covid-19 a engendré la fermeture de nombreuses frontières. Toutefois, en général, les personnes vivant dans un pays et travaillant dans un autre, les transfrontaliers, ont été ou sont autorisées à se déplacer. On peut alors se poser les questions de l’importance quantitative de ces migrations transfrontalières, de leur géographie et de leurs caractéristiques.

L’Union Européenne compte plus de 2 millions de transfrontaliers, « ayant leur lieu de travail hors de la frontière et revenant au moins une fois par semaine dans leur résidence principale ». La France est de très loin le pays qui compte le plus de transfrontaliers, à savoir 438 000.   Depuis les années 1960, la hausse du nombre de personnes habitant en France métropolitaine et travaillant dans un autre pays connaît un rythme soutenu. En France, ce phénomène des transfrontaliers concerne surtout des frontières terrestres. Toutefois, il ne faut pas oublier les frontières maritimes. Entre 2007 et 2017, les navettes de travail de personnes habitant en France vers les pays limitrophes ont augmenté annuellement en moyenne de plus de 9000 personnes.

Les causes de l’augmentation du nombre de travailleurs transfrontaliers français sont multiples. La principale réside dans les disparités entre la France et ses pays limitrophes sous toutes leurs formes, démographiques, économiques et sociales. Le phénomène a aussi été facilité par la liberté de circulation de la population en Europe. Depuis les années 1960, la Suisse est le pays le plus attractif pour les résidents en France. Les écarts de salaire expliquent cet attrait. Le Luxembourg est le second pays d’accueil de transfrontaliers français avec environ 100 000 actifs. Dans les années 2010, le rythme de progression des migrations y est resté très soutenu. Le nombre de frontaliers français allant travailler en Allemagne a cessé d’augmenter depuis le début du XXIème siècle. Enfin l’économie belge recourt au réservoir de main-d’œuvre sur toute la bande frontalière qui va de Dunkerque à Longwy.

Ces migrations transfrontalières ont un impact géographique parfois considérable. A l’échelle des départements de France métropolitaine, cinq départements comptent plus de 10% de transfrontaliers dans leur population active ayant un emploi. A l’échelle des zones d’emploi, ce sont douze zones qui comptent plus de 10% de travailleurs frontaliers. Quant aux communes, il n’est pas rare que leur population occupée travaille pour plus de la moitié au-delà de la frontière. Par exemple, la part des transfrontaliers dans la population active ayant un emploi est de 51,3 % à Longwy.

DOCUMENT PÉDAGOGIQUE (libre de droits)
LES FRONTIÈRES DES PAYS DE L’UNION EUROPÉENNE ET L’EMPLOI – LA FRANCE, CHAMPIONNE D’EUROPE DES TRAVAILLEURS TRANSFRONTALIERS

EXERCICE PÉDAGOGIQUE par Alexandre DUCHESNE
LA PATRIMONIALISATION, ENTRE HÉRITAGE CULTUREL ET RECONVERSION : LE BASSIN MINIER DU NORD-PAS-DE-CALAIS

Cette étude de cas s’insère dans le thème 4 du programme d’HGGSP de la classe de Terminale intitulé « Identifier, protéger et valoriser le patrimoine : enjeux géopolitiques ». L’étude proposée ici se situe au sein de l’objet de travail conclusif. La question de la patrimonialisation du bassin minier du Nord-Pas-de-Calais est un exemple d’intérêt récent pour un patrimoine industriel. Il s’agit d’un des trois « jalons » étudiés pour ce thème conclusif.

Dans l’introduction, les élèves découvrent le monde de la mine par la chanson « Les corons » de Pierre BACHELET. Dans une 1ère étape, ils tentent d’appréhender la patrimonialisation du bassin minier du Nord-Pas-de-Calais par son inscription au patrimoine mondial de l’UNESCO. Dans une 2ème étape, ils étudient le musée du Louvre-Lens. La 3ème étape permet de dresser un bilan et d’établir les liens entre développement local et patrimonialisation. 

 

ANALYSE par Jean-Marc ZANINETTI
LA GÉOGRAPHIE DE L’EMPLOI EN FRANCE SOUS LE QUINQUENNAT HOLLANDE : QUEL BILAN POUR L’HISTOIRE ?

Cet article tente de faire le bilan géographique de l’emploi sous le quinquennat de François HOLLANDE.

Après la crise financière déclenchée en 2008, les années 2012-2017 ont été caractérisées par une nette reprise économique mondiale. Mais la France s’est singularisée par son impuissance à créer suffisamment d’emplois. En conséquence, son taux de chômage est resté à des niveaux élevés. Sur 96 département métropolitains, 33 seulement comptent plus d’emplois en 2017 que cinq ans plus tôt, tandis que 63 en comptent moins. Les pertes d’emplois sont particulièrement importants dans la moitié nord de la France, ainsi que pour des départements à dominante rurale du centre de l’Hexagone. L’évolution est à peine moins mauvaise dans la moitié sud du pays.

Les fractures territoriales semblent avoir été accrues par les décisions politiques. « L’effet TGV » est manifeste. Les départements comprenant l’une des principales métropoles régionales connectées par le TGV ou par avion à la capitale sont généralement favorisés, tandis que ceux du Bassin parisien qui entourent l’Ile-de-France sont délaissés, victimes d’un « effet tunnel » manifeste. Portées notamment par la dynamique de l’économie présentielle et du tourisme, les départements littoraux du sud et certains départements ruraux de l’intérieur limitent les dégâts ou tirent leur épingle du jeu, mais très peu d’entre eux voient leur emploi total progresser de plus de 1% sur la période.

Pendant les dernières décennies du XXème siècle, la France a perdu des emplois dans la sphère productive. Parallèlement, celle-ci change de nature : elle regroupe de moins en moins d’emplois agricoles ou de fabrication industrielle et davantage de fonctions immatérielles et de services aux entreprises. Après des années de développement, l’emploi a cessé d’augmenter dans la sphère présentielle. La croissance démographique est restée le principal facteur explicatif du développement de la sphère présentielle, mais la qualité de cette relation s’est dégradée. Ce retournement de tendance est « la grande surprise du quinquennat Hollande ».

Sans redressement économique vigoureux et sans politiques d’aménagement du territoire favorisant « l’amorce d’une révolution géographique », il est vraisemblable que la « fracture territoriale » opposant une poignée de métropoles au reste du territoire va encore se creuser davantage.

 

LE POINT SUR…par Gérard-François DUMONT
COVID-19 : LES TROIS RUPTURES DÉMOGRAPHIQUES ET LEUR PROSPECTIVE

La période de 2008 à 2014 est une période de quasi-stagnation de la fécondité en France. Mais depuis 2015, elle ne cesse de diminuer, notamment à cause « d’importants rabotages effectués sur la politique familiale ». On peut se demander si cette baisse va se poursuivre, notamment à cause des conséquences économiques et sociologiques de la pandémie Covid-19. Liée à cette dernière et au vieillissement de la population, l’espérance de vie a baissé, conséquence de la hausse du taux de mortalité en 2020. Entre 2019 et 2020, l’espérance de vie a baissé de 0,6 an pour les hommes et de 0,3 pour les femmes en France métropolitaine. Cette baisse de l’espérance de vue est surtout concentrée au-delà de 60 ans. La troisième rupture est la baisse de 34% du nombre de mariages entre 2019 et 2020.

Certains effets démographiques de la pandémie Covid-19 sont pérennes car ils comprennent des modifications significatives de la pyramide des âges qui continueront d’exercer des conséquences sur plusieurs décennies.