Tout le monde connaît Cléopâtre, reine d’Égypte, séductrice célèbre pour son nez proéminent et qui mit Jules césar et Marc-Antoine à ses pieds …
Aurait-elle été heureuse de l’image que l’histoire a retenu d’elle ? Rien n’est moins sûr ! En 2025, alors que les historiens redonnent peu à peu aux femmes la place qui devrait leur revenir dans l’histoire du monde, après des siècles d’invisibilisation, Isabelle Dethan choisit de faire une biographie à la première personne « Moi, Cléopâtre dernière reine d’Égypte » en adoptant un point de vue féminin, voire parfois féministe de cette vie hors du commun.

Revenue d’entre les morts pour discuter avec son singe embaumé en même temps qu’elle afin qu’elle ne soit pas seule dans l’au-delà, Cléopâtre confronte l’image actuelle que le monde a d’elle et la réalité de sa vie : une femme forte, cultivée qui maîtrise 10 langues, a cherché à acquérir une place qui lui semblait lui revenir, et non pas seulement une icône de séduction. Son histoire est parsemée de traits d’humour et de procédés narratifs étonnants : son ami et confident n’est autre qu’une vieille momie qui lui parle : Khéops

 Khéops

La première partie de l’ouvrage s’attache à l’enfance de Cléopâtre et aux différentes trahisons et violence qui l’ont émaillée. La dynastie des Ptolémée, d’origine grecque avait peu de liens avec la culture égyptienne et pharaonique. L’appétence de Cléopâtre (réelle et confirmée) pour la culture antique de l’Égypte est mise en avant dès son enfance avec son apprentissage des hiéroglyphes et le choix de Khnoum Khoufou (Khéops) comme meilleur ami et interlocuteur face à ses interrogations sur l’existence.
Toutes les machinations de sa familles, les errements et les trahisons sont racontées de manière simple, y compris l’assassinat de Bérénice, sa sœur, par leur père.

Iulius Caesar

Contrainte à 18 ans d’épouser son jeune frère de 12 ans afin d’asseoir son pouvoir (et accessoirement de rester en vie), Cléopâtre doit faire face à une nouvelle conjuration et se tourne vers Jules César.
Présentée ordinairement comme une femme fatale qui a voulu charmer César pour être puissante, Cléopâtre est montrée ici comme une stratège qui cherche à sauver son pays, l’Égypte, quitte à se sacrifier. En effet, la description qu’elle y fait de César laisse peu de place aux sentiments érotiques et amoureux « avec ses jambes maigres, tout en nerfs, et son crâne dégarni, j’ai l’impression de faire l’amour avec un échassier déplumé ». Effectivement, 31 ans les séparent …
Cependant, après la « guerre d’Alexandrie » César repart vers Rome et invite Cléopâtre à le rejoindre et à assister à son triomphe au cours duquel il exhibe Arsinoé, sœur de Cléopâtre, dans une cage.
L’assassinat de Jules César aux Ides de Mars contraint Cléopâtre et Césarion à retourner en Égypte.
Là, en digne héritière des mœurs familiales, elle se débarrasse de son demi-frère qui brigue le trône.

Isis et Dionysos

Cléopâtre raconte sa rencontre officielle avec Marc-Antoine à Tarse, son attitude de reine refusant de se plier à l’autorité d’un Romain, mais également le début d’une véritable histoire d’amour entre les deux amants.

La vie inimitable

La vie de famille du couple avec leurs jumeaux est mise en parallèle avec les machinations d’Octave pour salir l’image de Cléopâtre.
Celle-ci, donnant un nouveau souffle à la religion ancienne, porte désormais le titre de Reine des Rois et ses enfants des titres royaux octroyés par Marc-Antoine pour des terres conquises au nom de Rome.
Le chapitre se termine sur la défaite d’Actium.

Ceux qui vont mourir ensemble

Trahisons en cascades, suicide de Marc-Antoine puis de Cléopâtre afin d’échapper au sort funeste qu’avait été celui d’Arsinoé exhibée dans une cage lors du triomphe de César à Rome qu’Octave voulait réitérer achèvent le récit de la vie de Cléopâtre.

Epilogue
Que reste-t-il aujourd’hui du royaume de Cléopâtre ? De sa descendance ?
Rien si l’on adopte le point de vue masculin … Sans doute beaucoup plus si on considère que les femmes sont importantes.

 

Ainsi, cette BD qui prend le point de vue de Cléopâtre nous la restitue dans ses dimension d’héritière puis de reine d’une civilisation à la croisée des mondes, grecque et pharaonique, mais aussi de femme et de mère. Sans passer sous silence ses erreurs et lâchetés parfois, elle nous livre le portrait d’une femme intelligente, stratège et pour le moins humaine.