Fondée en 2009, la maison d’édition franco-chinoise Fei réalise des bandes dessinées permettant de diffuser la culture chinoise à destination des enfants et des adultes.

Nankin

Sous la forme d’un lianhuanhua (bande dessinée chinoise) scénarisé par Nicolas Meylaender et dessiné par Zong Kai, les Éditions Fei publient les souvenirs de Xia Shuqin, survivante du massacre de Nankin (1937-1938).

Débutant le 13 décembre 1937, l’ouvrage se focalise sur la ville de Nankin lors de l’occupation japonaise. Outre les civils, le rôle des missionnaires et des diplomates nazis est souligné par la présence du révérent Magee (missionnaire américain et président du Comité de Nankin de l’organisation internationale de la Croix-Rouge) de John Rabe (homme d’affaires allemand, membre du NSDAP qui protégea les habitants de Nankin en instaurant une zone de sécurité). L’ouvrage évite l’écueil de mettre de côté les acteurs internationaux, dont le rôle est fréquemment minoré.

« Regarder le passé comme un miroir et faire face au futur sans fardeau » TAN Zhen, 4 août 2011, page 141.

Prix du meilleur premier album des lycéens picards, la postface se révèle très éclairante pour comprendre les enjeux historiographiques. « Les partis d’extrême droite japonais ont sans cesse tenté de se justifier au sujet du massacre de Nankin et des femmes de réconfort. Les manuels scolaires d’histoire ont été modifiées et le Tribunal militaire international pour l’Extrême-Orient, contesté » (page 140). Sans tomber dans une attitude de « nippophobie », l’objectif est de faire connaître au lectorat européen francophone les neuf années de procès visant à défendre Xia Shuqin dans les tribunaux chinois et japonais.

En convoquant plusieurs témoins permettant de justifier les demandes judiciaires de Xia Shuqin, les auteurs réussissent à faire des aller-retours chronologiques sans pour autant déboussoler le lecteur. La patte graphique, volontairement sombre (noire, grise, bleue) renforce la sensation de violence émanant du sujet. Parfois cru, l’ouvrage peut, lorsqu’il est manié avec des précautions, trouver sa place dans le CDI d’un lycée. Son usage au lycée est éclairant pour aborder l’abolition de la distinction entre civils et combattants au plan de la violence de guerre en Asie.

Le format à l’italienne, de type 23 cm par 16 cm se révèle agréable à la manipulation tout en restant malheureusement fragile au niveau de la tranche.

En conclusion, un témoignage sous forme de lianhuanhua permettant aux enseignants de Première d’aborder les exactions envers les civils à partir de la situation de Nankin en 1937-1938.

Pour aller plus loin :

Antoine BARONNET @ Clionautes