A la croisé de mémoires et d’histoires, Emmanuel de Waresquiel nous embarque dans la nef de ses passés sélectionnés et recomposés sous sa plume. Entre menus bonheurs, nostalgie et regards d’historien sur notre contemporanéité.

Ne nous attendons donc pas à des leçons d’histoire du XVIIIe son champ d’excellence, mais davantage à des entrelacs mêlant souvenirs d’enfance ou références événementielles plus ou moins récentes à des questions sur notre modernité occidentale et au temps qui passe.

Jamais deux sans trois1. Avec Rien ne passe, tout s’oublie, c’est le troisième opus du genre “réflexion sur les temps passés et présents” que nous livre le tout nouveau membre de l’Institut de France (élu le 5 mai 2025), par ailleurs biographe reconnu (Richelieu, Talleyrand) et spécialiste des imaginaires révolutionnaires. Une sorte de respiration égographique – pardonnez le néologisme – qui semble lui tenir à cœur, entre confessions et postures.

Trente-sept mini-chapitres, de trois ou quatre pages le plus souvent, forment l’ossature en apparence erratique de ces Souvenirs d’histoire. Où l’on retrouve en filigrane une part de l’épaisseur de la culture familiale. Des lieux aussi : le repaire mayennais, le château lorrain de Pange ou celui de Versailles. Une aversion répétée pour la question socio-économique des retraites. La nature enfin, avec le jardinage comme écho d’une pratique de l’auteur.

Autres temps, hors-champs ?

Les réflexions sont accessibles, avec des zooms parfois triviaux (les chaussures, J-P Belmondo, les chiens dont Milou…), et servies par une langue sans artifice. L’auteur recourt régulièrement à des auteurs – d’Ancien régime ou non – peu connus, tels Jean-Louis Soulavie et sa Vie privée du Maréchal de Richelieu (1792), la comtesse de Pange avec Comment j’ai vu 1900 (1965), l’abbé Delille avec Les jardins ou l’Art d’embellir les paysages (1782) et bien d’autres encore qui tissent une réflexion sur nos temps, souvent teintée de politique et de nostalgie. Des références plus récentes abreuvent aussi ces pages, avec l’immanquable 1984 de 1950 qui ne cesse de s’affirmer tous azimuts au cœur de notre technoïde XXIè siècle. Ou tout simplement les observations issues des conversations avec la fille de l’historien.

Au final, l’ouvrage garantit de bons moments de lecture. Il peut se parcourir comme un journal de notre siècle creusant son sillon, ou comme une somme d’aphorismes très augmentés dessinant une époque vécue, ou imaginée.

La présentation de l’éditeur :

https://www.tallandier.com/livre/rien-ne-passe-tout-soublie/