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États-Unis : Trump va-t-il révolutionner le droit à la nationalité ?

Éditorial par Gérard-François Dumont

Les États-Unis ont fondé leur doit à la nationalité sur le principe du droit du sol. Chaque personne née aux États-Unis acquérant la nationalité du pays dès la naissance. Ce principe va-t-il être modifié sous la seconde présidence de Donald Trump ?

La Constitution des États-Unis est pourtant claire : tous les enfants nés sur le sol des États-Unis sont citoyens américains quel que soit le statut juridique de leurs parents. Cette spécificité états-unienne dans l’attribution de la nationalité, qui est un des éléments d’attraction migratoire, est la conséquence directe de l’histoire du pays. Le 13 juin 1866, le XIVème amendement adopté par le Congrès a pour objet de protéger les droits à être citoyen des anciens esclaves désormais émancipés et de leurs enfants à naître, en particulier dans les États du Sud.

Fin janvier 2025, le Président Trump a signé un décret, sans doute le plus controversé de ses dizaines de décrets décidés juste après son investiture, mettant fin à l’automaticité de la citoyenneté de naissance. Cela concernerait environ 5 millions d’enfants nés aux États-Unis et y vivant avec un ou plusieurs parents sans statut juridique de résidents.

22 États ont intenté une action en justice pour bloquer le décret et des associations ont également intenté d’autres actions en justice. Comme les conditions de la voie de révision de la constitution semblent impossibles à remplir, c’est très certainement aux juges des États-Unis qu’il conviendra de décider.

 

Dossier par Jean-Marc Zaninetti

Migrations internes en France : les métropoles répulsives

Chaque année, la France enregistre environ 7 millions de déménagements d’un territoire français vers un autre, soit un dixième de la population qui change de résidence. Mais quels sont les territoires qui connaissent le plus de départs et ceux qui voient le plus d’arrivées ? Quelle recomposition du peuplement de la France s’effectue en conséquence de ces migrations internes ?

Au sein des migrations résidentielles concernant un changement de région, soit moins d’1 million par an, le taux de départ de l’Île-de-France est exceptionnel. En effet, 2% des Franciliens ont quitté la région Île-de-France pour s’établir dans une autre région de France métropolitaine. La région Île-de-France conserve donc un solde de migrations intérieures déficitaire depuis plusieurs décennies, engendrant d’ailleurs un solde migratoire global, donc y compris les migrations internationales à solde pourtant positif, également négatif.

Mais l’échelle départementale semble plus pertinente pour observer les mobilités résidentielles. Les dynamiques de migrations internes sont de plus en plus différenciées selon les départements. Une minorité de départements dont la population était déjà la plus susceptible de partir pour un autre département selon le recensement 2015 ont vu, sauf exception, ce taux de départ croître fortement. Paris est encore dans ce cas, comme la Seine-Saint-Denis et 5 autres départements franciliens. Les départements de la région Île-de-France sont donc encore une fois les plus répulsifs. Ce solde des départs et des arrivées est au final déficitaire dans 32 départements de France métropolitaine (au Nord et à l’Est majoritairement). A l’inverse, il est bénéficiaire pour 64.

Les départs des départements répulsifs au titre des migrations internes bénéficient surtout aux départements du sud et de l’ouest de la France métropolitaine. Les départements attractifs forment un ensemble non totalement géographiquement continu, qui va de 2 départements bretons à la Corse du Sud, et est dépourvu de départements ayant sur leur territoire une agglomération ayant le statut administratif de métropole, à la seule exception de l’Ille-et-Vilaine (Rennes). Il s’agit de départements littoraux ou de départements ruraux dont l’agglomération la plus peuplée ne compte que quelques dizaines de milliers d’habitants.

En termes de migrations internes, qui sont un marqueur essentiel de l’attractivité des territoires, on observe une nette accentuation du déficit des départements ayant en leur sein les principales métropoles, notamment Paris et les départements de Petite couronne, ainsi que le Rhône avec Lyon, les Bouches-du-Rhône aves Marseille et même la Gironde avec Bordeaux et la Loire-Atlantique avec Nantes.

Document pédagogique (libre de droits)

Les migrations internes interdépartementales en France métropolitaine : une géographie fort différenciée

 

Exercice pédagogique par Alexandre Duchesne

Coopérer pour s’affirmer à l’échelle mondiale : le centre spatial de Kourou en Guyane

Cette proposition s’insère dans la 3ème partie du programme de Géographie de la classe de Terminale Technologique. Par l’intermédiaire de l’étude de la base spatiale de Kourou, elle vise à montrer ce qui permet à la France de rester un acteur à l’échelle mondiale.

La première étape consiste à repérer les héritages par la construction d’une frise chronologique. La deuxième partie a pour objectif de compléter un schéma des acteurs et de leurs rôles. Enfin la troisième partie traite des défis face à la concurrence d’autres puissances par l’analyse d’un texte.

 

Analyse par Dominique Gambier
Les territoires français face à l’explosion des normes : retrouver la proximité

Selon une étude, la France est nettement en première place en Europe pour ses contraintes administratives, ce qui la situe en leader européen de la bureaucratie. Pour les collectivités locales, comme pour les particuliers et les entreprises, les normes accroissent les coûts de toute nature. En outre, multiplier les normes augmente mécaniquement la dépense publique et les premières places de la France dans ces deux registres, normes et dépenses publiques, ne sont pas totalement surprenantes.

Il s’agit de mettre de la proximité dans la gestion des normes en valorisant une nouvelle forme de légitimité : la légitimité de proximité. En effet, au fond d’une certaine défiance démocratique dont l’abus de normes est un aspect, il y a souvent un manque d’information auquel la proximité est un élément de réponse. Il faut donc réduire le poids de la norme nationale et responsabiliser le local. Il importe d’aller vers une logique de subsidiarité, donc selon le principe qui établit qu’une autorité centrale ne devrait effectuer que les tâches qui ne peuvent pas être réalisées à l’échelon inférieur.

 

Le point sur… par Gérard-François Dumont
La France est-elle en dépopulation ?

Dans un territoire, on parle de dépopulation lorsque les décès sont plus nombreux que les naissances. Est-ce le cas en France ?

En 2024, l’ensemble composé de la France métropolitaine et de ses cinq départements d’outre-mer n’a pas été en dépopulation même si la fécondité a enregistré en 2024 un nouvelle baisse. En « France », le solde naturel, soit la différence entre les 663 000 naissances et les 646 000 décès, demeure positif en 2024. En revanche, à la l’échelle de la France métropolitaine, on constate une dépopulation : il s’agit d’un phénomène rare depuis un siècle et inédit depuis la Seconde Guerre Mondiale. En effet, 629 000 naissances y sont décomptées pour 630 000 décès, soit un solde naturel déficitaire de 1000.

Une telle dépopulation n’avait été enregistrée que 12 années au cours du XXème siècle : 1911, 1915-1919, 1935-1939, 1940-1944. Ainsi, l’année 2024 est la première, depuis un siècle, à enregistrer une dépopulation sans que celle-ci soit liée directement ou de manière différée à des années de guerre. C’est donc une rupture démographique majeure, même si elle pouvait être anticipée.

Cette rupture est éclairée par l’examen de la pyramide des âges de la France métropolitaine. Le phénomène majeur est la réduction accentuée des effectifs des jeunes générations, réduction presque continue au fil des années, ceci essentiellement à cause de la baisse de la fécondité. Ainsi la génération née en 2024 est la moins nombreuse de toutes les générations nées depuis 1946, alors que ces dernières ont des effectifs qui se sont rétrécis chaque année en raison des taux de mortalité de leur âge. La pyramide des âges de la France métropolitaine montre donc clairement les processus démographiques de vieillissement et de gérontocroissance. En particulier, le vieillissement « par le bas » est inhérent à la diminution des effectifs des générations les plus jeunes. Quant à la gérontocroissance, et plus particulièrement la croissance attendue des effectifs des personnes âgées de 80 ans ou plus, elle apparaît clairement à l’examen des effectifs des générations nées après 1945 et qui vont avancer en âge.

Ainsi l’évolution de la pyramide des âges de la France métropolitaine vers la forme d’un ballon de rugby, évolution marquée par une première année de dépopulation en 2024, signifie un véritable bouleversement qui change structurellement la composition par âge de la population. Un tel bouleversement est occulté quand on tient compte des départements d’outre-mer, et notamment de Mayotte, dans l’équation démographique de la France. Mais il est bien visible quand on restreint la focale à la France métropolitaine, ce qui ne sera pas sans conséquences économiques et sociales. Cette situation démographique nouvelle nécessite de repenser très largement des pans entiers de notre modèle social hérité d’un contexte radicalement différent, celui des Trente Glorieuses économiques…et démographiques (le baby-boom).