Voici le premier opus d’une nouvelle collection des Éditions Delcourt consacrée aux légendes noires de l’histoire. Autant dire, que le lecteur aurait pu s’attendre à lire un ouvrage à charge contre le froid et tyrannique Robespierre, assoiffé du sang des innocents que sont Camille Desmoulins ou Georges Danton, une légende noire largement héritée de la période thermidorienne. Cette bande dessinée est une belle surprise car l’expérimenté Makyo réussit à donner vie et corps à cette biographie, à maîtriser son sujet grâce à un travail de fond et à esquisser un portrait subtil de Robespierre qui n’est pas non plus présenté tel le champion universel de la vertu.

Bref, un récit fin et équilibré grâce à une approche psychologique de l’Incorruptible, tout en s’inscrivant dans la chronologie de la Révolution française, qui permet d’explorer à la fois ses certitudes du moment comme ses doutes, sa force de caractère comme ses fragilités intérieures. Les dessins de Simone Gabrielli accompagnent cette histoire.

 

Une personnalité complexe au cœur d’une période tout aussi complexe

Cette bande dessinée parvient à présenter les principaux évènements de la vie de Maximilien Robespierre qui se confondent avec ceux de la France révolutionnaire, de ses études au collège d’Arras puis au lycée Louis-le-Grand à Paris – où il sera choisi pour déclamer un compliment au jeune Louis XVI et la reine Marie-Antoinette – à son exécution le 10 thermidor an II. Ainsi, le lecteur traverse la Révolution et son lot de temps forts : le 14 juillet 1789, la fuite de la famille royale à Varennes, le 10 août 1792, l’exécution de Louis XVI ou encore la fête de l’Être suprême.

Le plus intéressant reste le récit intimiste de la vie de Robespierre lorsque le lecteur assiste aux discussions de Maximilien avec Éléonore à la pension Duplay où il réside ainsi qu’aux prises de parole de celui-ci à l’Assemblée constituante puis à la Convention ou au sein du Comité de salut public. Ces confidences ou ces extraits de discours soulignent, au fil des évènements révolutionnaires, l’évolution morale et psychologique du personnage. Ainsi, en 1791, l’Incorruptible défend devant les députés l’abolition de la peine de mort alors que deux ans plus tard, il leur intime de voter l’exécution de Louis XVI. La mise en place du culte de l’Être suprême ou sa position des derniers instants face aux intrigues de ses opposants à la Convention sont tout aussi intéressants à suivre d’un point de vue psychologique, entre orgueil et humilité. Les craintes suscitées par cette personnalité énigmatique – certains l’accusent de vouloir mettre en place une dictature et une théocratie – vont précipiter la chute du « Sphinx mélancolique ».

Une belle réussite que cette bande dessinée ! Devraient suivre les albums consacrés à Louis XI, Charles VII et Marie-Antoinette !