Félix est un petit garçon juif de dix ans, que ses parents ont caché dans un orphelinat catholique avant de partir en voyage. Félix n’est pas malheureux, mais il s’ennuie de ses parents et décide de s’évader pour aller les retrouver et leur faire une bonne surprise. Il y parvient sans difficulté et se retrouve dans la campagne par un bel après-midi d’été. Il n’est pas sorti depuis des années et ignore tout du monde qui l’entoure, la tête pleine des souvenirs heureux de sa vie de petit enfant choyé par des parents libraires et passionnés de livres. Les difficultés vont venir du fait que la scène se passe dans la Pologne nazifiée de 1942.
Félix observe les événements avec la naïveté de son regard d’enfant, aidé par un sens certain de l’adaptation, et par une imagination immense, qui lui permet d’interpréter les choses curieuses qu’il observe de désarmante manière. Il va réaliser assez vite ce que sont les nazis et ce que veut dire être juif ; il va découvrir l’horreur et comprendre que ses parents ne sont pas partis en voyage. Félix va rencontrer Zelda, une petite fille de six ans à demi-morte dans la maison en feu de ses parents assassinés.
Félix et Zelda, compagnons désormais inséparables, vont vivre durant quelques mois en se cachant dans ce pays dévasté et massacré par les nazis. Ils seront cachés dans le ghetto d’une grande ville, embarqués dans un train qui roule vers un camp de la mort, témoins du massacre de tous les enfants d’un orphelinat. Ils seront enfin recueillis et cachés par une fermière polonaise qui cultive des choux dans la banlieue d’une ville où les nazis font régner la terreur.
On conçoit qu’il est hasardeux d’écrire un roman pour la jeunesse qui se déroule dans un tel contexte. Ce serait compter sans le talent de l’écrivain qui de la première à la dernière ligne s’efface devant les personnages qu’il a créés. Félix et Zelda découvrent l’horreur avec une désarmante naïveté et une profonde humanité. Solidarité, amour et espoir ne leur font pas défaut, alors que bien souvent leurs aventures se terminent mal. L’auteur réussit ce tour de force de faire parfois sourire, de faire réfléchir, de faire s’interroger, mais de faire pleurer aussi.
Le style est original et vivant ; les personnages attachants. Le roman est assez fort pour laisser le lecteur ému en refermant la dernière page d’un livre qu’il a dévoré… même s’il n’a plus quinze ans depuis bien longtemps. Un livre à recommander aux collégiens, aux lycéens, à leurs parents et grands parents, aux professeurs documentalistes de nos établissements. Il faudra sans doute répondre aux questions nombreuses que cette lecture suscitera, mais c’est encore une qualité du livre.
© Joël Drogland