L’ouvrage 250 Lieux, Personnages, Moments (Patrimoine en Beauce, Berry, Gâtinais, Perche, Sologne, Touraine), publié sous la codirection de Pierre Allorant, Jean Garrigues et Alexandre Borrell, constitue la dernière parution des Presses Universitaires François-Rabelais (PUFR) de l’Université de Tours, dans la collection « Patrimoines en région Centre-Val de Loire ».

Pierre Allorant est professeur d’université en Histoire du droit et des institutions à l’université d’Orléans (POLEN EA 4710) ainsi que, depuis novembre 2016, élu doyen de la faculté de droit et de gestion de cette même l’université. Il est également secrétaire général du Comité d’Histoire Parlementaire et Politique (CHPP).
Quant à Jean Garrigues, il est professeur d’université en Histoire contemporaine à l’université d’Orléans (POLEN EA 4710). Depuis 2002, il est président du Comité d’Histoire Parlementaire et Politique (CHPP) ainsi que directeur de la rédaction de la revue Parlement[s] : Revue d’histoire politique, éditée par les Presses Universitaires de Rennes (PUR).

Enfin, Alexandre Borrell est docteur en Histoire contemporaine à l’université d’Orléans (POLEN EA 4710). Il est également membre du bureau du Comité d’Histoire Parlementaire et Politique (CHPP) ainsi que rédacteur en chef adjoint de la revue Parlement[s] : Revue d’histoire politique.

Comme l’écrit Pierre Allorant dans sa présentation, ce dictionnaire a été conçu à partir du projet de recherche régional « Locmem », « mené depuis 2012, sur les caractères originaux du patrimoine touristique du Centre devenu « Centre-Val de Loire ». De nombreux laboratoires des deux universités d’Orléans et de Tours, souvent liés aux équipes du CNRS ou de l’INRA, travaillent de longue date sur le patrimoine naturel et culturel ligérien, son intelligence et l’amélioration de sa valorisation scientifique et touristique » (p. 8).

Outre la présentation de Pierre Allorant (pp. 7-16) et un article introductif intitulé « La Métropole-jardin » de Lucas Berry (pp. 17-26), ce dictionnaire contient 250 notices accompagnées de 300 illustrations réparties en trois catégories : 30 moments fondateurs (pp. 27-78), 80 lieux caractéristiques (pp. 79-238) et 140 personnages (pp. 239-446) porteurs de la mémoire régionale et, le plus souvent, nationale. Détail pédagogique à noter, chacune des 250 notices du dictionnaire est munie d’une carte miniature de la région « Centre-Val de Loire » permettant au lecteur de situer instantanément l’endroit du Moments, Lieux ou Personnages de ladite notice. Puis, suivent la table des illustrations (pp. 447-456), l’index géographique (pp. 457-460), l’index des notions (pp. 461-462) et, enfin, la liste des 116 auteurs, classée par ordre alphabétique et selon le patronyme (pp. 467-468).

Introduction : La région Centre-Val de Loire : une « Métropole-jardin » ?

Cet article de 9 pages (pp. 17-26), rédigé par Lucas Berry et intitulé « La Métropole-jardin », placé entre la présentation de Pierre Allorant et les 250 notices, est jugé par nous comme fondamental. En effet, ce dernier retrace l’histoire de la création de la région « Centre-Val de Loire ». Elle montre les circonstances de la naissance ainsi que les étapes (création d’une équipe pluridisciplinaire, phase préliminaire, élaboration, approbation et difficultés de mise en œuvre du schéma d’aménagement de la région Centre) de cette « Métropole-jardin », expression forgée en 1971. Ces 4 ou 5 étapes sont importantes pour comprendre la grandeur et les limites de cette expérience unique qui débute en 1964 – avec le rôle-clé de la DATAR de l’époque afin de contrecarrer « la croissance parisienne jugée excessive » (sic !) (p. 17) -, se poursuit en 1968 avec la création d’une équipe pluridisciplinaire avec l’OREALM, auteur du fameux Livre blanc et du concept « Métropole-jardin », créant un schéma d’aménagement adopté par les élus en 1975, mais sous-dotés en moyens financiers spécifiques « octroyés par l’État et la région » (p. 23).

Par manque de volonté politique régionale, le projet de l’ancien schéma d’aménagement de la Loire moyenne est donc resté inachevé « mais, en réalité, il n’a jamais été officiellement abandonné » (p. 25) car il est resté une source d’inspirations multiples. Comme l’écrit avec justesse Lucas Berry, « Ainsi, nombre d’études alors inédites restent une référence, notamment en matière de paysage et d’économie. Son innovation majeure reste d’actualité : le concept d’un espace système, articulant une métropole en réseau avec un espace naturel et culturel qui en constitue l’ossature. » (p. 26). Cet article résonne étrangement par rapport à l’actualité avec la crise nationale des « Gilets jaunes » mettant au premier plan les distorsions d’aménagement du territoire français depuis deux ou trois décennies…

Partie I : Les 30 Moments de la région « Centre-Val de Loire »

La première partie est consacrée aux « Moments » (pp. 27-78), au nombre de 30, qui se sont déroulés au sein d’un ou plusieurs des 6 départements de la région « Centre-Val de Loire ». Classés alphabétiquement, selon le mode du dictionnaire, celle-ci s’ouvre avec la notice « Action directe à Vitry-aux-Loges (1986-1987) », rédigée par Christian Bidault (pp. 29-30) et se termine avec « Les villes-pont ligériennes en 1940 » (pp. 77-78), de Pierre Allorant.

Parmi les 30 « Moments » retenus, 17 se sont produits que dans un seul département : 10 dans le Loiret (Action directe à Vitry-aux-Loges : 1986-1987, l’affaire Dreyfus et Le Progrès du Loiret : 1898-1906, L’affaire Stavisky à Orléans : 1928-1936, l’annulation du mariage d’Aliénor d’Aquitaine avec Louis VII à Beaugency en mars 1152, l’assassinat de François de Guise à St-Hilaire-St-Mesmin en 1563, la mort de François II à Orléans en 1560, la rumeur d’Orléans en 1969, le siège d’Orléans par les Huns en 451, la revue La Tribune d’Orléans 1967-1982, le « village noir » à Orléans en 1905) ; 2 dans chacun des départements suivant : l’Indre-et-Loire (Le mariage de Charles VIII et d’Anne de Bretagne à Langeais en 1491 & Tours capitale de la France en guerre en 1870 et 1940), le Cher (Les Mariannes du Cher sous la Seconde République & Le massacre de 36 juifs aux puits de Guerry durant l’été 1944), le Loir-et-Cher (La mort du duc Henri de Guise à Blois en 1588 & La poignée de mains à Montoire : le 24 octobre 1940) ; 1 dans l’Indre (Les Américains à Châteauroux : 1950-1967) et 0 en Eure-et-Loir. Par conséquent, 23 « Moments » ont eu lieu dans plusieurs départements dont 2 dans les six départements à la fois : la guerre des Gaules (53-51 avant notre ère) de Sylvain Janniard (pp. 47-48) ainsi que les guerres de Religion (XVIe siècle) de Gaël Rideau (pp. 49-50).

Partie II : Les 80 Lieux de la région « Centre-Val de Loire »

La deuxième partie est consacrée aux « Lieux » (pp. 79-238), au nombre de 80, qui se trouvent au sein d’un ou plusieurs des 6 départements de la région « Centre-Val de Loire ». Avec pour première notice « L’abbaye de Noirlac » (p. 81), écrite par Philippe Goldman, cette deuxième partie s’achève avec « La vinaigrerie Dessaux à Orléans » (pp. 236-237) de Pierre Allorant.

Parmi les 80 « Lieux » sélectionnés, 65 se situent que dans un seul département : 22 dans le Loiret, 17 en Indre-et-Loire, 12 dans le Cher, 7 en Eure-et-Loir, 4 dans l’Indre et 3 dans le Loir-et-Cher. Par conséquent, 15 « Lieux » sont à cheval sur plusieurs départements dont 12 sur l’ensemble de la région « Centre-Val de Loire », comme par exemple, la notice sur « Les lieux de culte protestants (p. 176) de Jean Boissière ». Naturellement, dans ce contexte, nous trouvons des notices consacrées à chacun des 6 pays constituant la région « Centre-Val de Loire », à l’exception notable de la Sologne qui est évoquée dans la notice consacrée à « La chasse en Sologne » de Joël Mirloup (pp. 111-112) : la Beauce de Pierre Gillardot (pp. 89-90), le Berry de Françoise Michaud-Fréjaville (pp. 91-95), l’Orléanais de Christophe Speroni (pp. 190-191) englobant peu ou prou le pays du Gâtinais, le Perche de Bernard Gagnepain (pp. 205-207) et la Touraine de Jean-Paul Carrière (pp. 222-225).

Parmi les notices de ces « Lieux » les plus emblématiques de ces pays évoqués ci-dessus, citons-en une par département : pour le Loiret (Les fêtes de Jeanne d’Arc à Orléans, pp. 148-151, de Yann Rigolet), pour l’Indre-et-Loire (Le monastère de Marmoutier à Tours, pp. 181-182, de Elisabeth Lorans et Thomas Creissen), pour le Cher (Le palais Jacques Cœur de Bourges, pp. 194-195, de Philippe Goldman), pour l’Eure-et-Loir (La cathédrale de Chartres, pp. 104-105, de Irène Jourd’heuil), pour l’Indre (Nohant, domaine de George Sand : 1804-1876, pp. 187-188, de Noëlle Dauphin) et pour le Loir-et-Cher (La chocolaterie Poulain à Blois, p. 128, de Jean-Pierre Williot).

Partie III : Les 140 Personnages de la région « Centre-Val de Loire »

La troisième et dernière partie est dédiée aux « Personnages » (pp. 239-446), au nombre de 140, qui ont vécus au sein d’un ou plusieurs départements de la région « Centre-Val de Loire ». Cette liste de personnages s’ouvre avec « Jacques-Pierre Abbatucci dans le Loiret (1791-1857) » de Pierre Allorant et se clôt avec la notice sur « Jean Zay à Orléans (1904-1944) » par Olivier Loubes, un des spécialistes français et actuels de Jean Zay.

Parmi les 140 « Personnages » retenus, 124 sont accrédités pour un seul département : 57 pour le Loiret, 25 pour le Cher, 17 pour l’Indre-et-Loire, 10 pour l’Indre, 9 pour l’Eure-et-Loir et 6 pour le Loir-et-Cher. Par conséquent, 16 « Personnages » concernent plusieurs départements dont un seul pour les six à la fois : soit la notice sur les « Personnages ligériens et berrichons de La Comédie humaine » de l’œuvre d’Honoré de Balzac rédigée par Aude Déruelle (p. 379).

Parmi les notices de ces « Personnages » les plus symptomatiques, nous avons relevé : pour le Loiret (« Maurice Genevoix à Saint-Denis-de-l’Hôtel et Orléans (1890-1980) » de Géraldi Leroy, pp. 330-331), pour le Cher (« Alain-Fournier à La Chapelle-d’Angillon et Épineuil-le-Fleuriel (1886-1914) » de Alix Tubman-Mary, pp. 242-243), pour l’Indre-et-Loire (« François Rabelais et La Devinière (1483/1500-1553) » de Denis Bjaï, p. 389), pour l’Indre (« Henry de Monfreid à Ingrandes (1879-1974) » de Philippe Tanchoux, p. 366), pour l’Eure-et-Loir (« Marcel Proust à Illiers-Combray (1871-1922) » de Mireille Naturel, p. 388) et, enfin, pour le Loir-et-Cher (« L’abbé Grégoire à Blois (1754-1831) » de Caroline Chopelin-Blanc, pp. 336-337).

250 Lieux, Personnages, Moments : un dictionnaire de référence sur le « Centre-Val de Loire »

En guise de conclusion provisoire, concernant le dictionnaire sur les « 250 Lieux, Personnages, Moments (Patrimoine en Beauce, Berry, Gâtinais, Perche, Sologne, Touraine) », nous pouvons dire que les trois codirecteurs ont globalement tenu et gagné leur pari. En effet, comme l’écrit Pierre Allorant, « L’ambition de ce projet régional a consisté à étudier, dans la longue durée et de façon résolument interdisciplinaire, les « lieux de mémoire » à l’échelle régionale » (p. 15) en suivant les traces de l’historien Pierre Nora dans sa définition nationale des « Lieux de mémoire » mais en l’appliquant à la région « Centre-Val de Loire ». En réduisant la liste de 500 à seulement 250 notices, nous avons pu constater qu’aucune omission majeure n’est à déplorer. En revanche, nous pouvons qu’espérer la publication d’un tome 2 ou bien un nombre accru de notices, élargissant ainsi la liste du patrimoine immatérielle de la région « Centre-Val de Loire », dans les éditions ultérieures de ce dictionnaire (comme, par exemple, la franc-maçonnerie ligérienne du XVIIIe siècle à nos jours, étudiée par l’historien tourangeau Jacques Fenéant).

Après avoir parcouru ce dictionnaire, il s’avère que la région « Centre-Val de Loire » a une identité ouverte aux apports extérieurs car elle n’est pas une province historique d’Ancien régime. En effet, elle est formée de trois provinces à l’identité forte comme la Touraine (l’Indre-et-Loire), l’Orléanais ou la Beauce (le Loiret) et le Berry (l’Indre), au contraire du Perche (l’Eure-et-Loir), du Gâtinais (le Cher) et de la Sologne (le Loir-et-Cher). Néanmoins, la région « Centre-Val de Loire » est bien le cœur de la France car sa langue régionale est tout simplement le français.

Concernant l’appareil critique, l’éditeur n’a pas référencé les notices afférents aux 116 auteurs réduisant ainsi la praticité de ce dictionnaire. Autre oubli préjudiciable pour cet ouvrage, les PUFR n’ont pas jugé utile de faire la liste des 250 notices sous la forme de table des matières, ce qui aurait grandement facilité l’attrait de l’ouvrage. Espérons que ces oublis seront corrigés dans les éventuelles rééditions de ce dictionnaire ayant trait à la région « Centre-Val de Loire ».

© Les Clionautes (Jean-François Bérel pour La Cliothèque