Ces deux ouvrages du Colonel Baratier sont une source sur la colonisation militaire de l’AOF, ce sont des mémoires donc, comme tout ouvrage du genre, marqués par l’oubli volontaire ou fortuit, la connaissance des événements postérieurs. L’intérêt n’est pas dans le récit et la précision des déplacements militaires mais beaucoup plus dans les informations sur le pays, ses habitants et sur les relations de l’homme avec ses soldats coloniaux. Si en homme de son temps il est sûr de la supériorité occidentale qui ressort dans quelques pages il témoigne d’un respect de ses hommes et même d’une réelle affection comme du respect et de l’admiration pour la bravoure de ses adversaires.

Bien écrit la lecture en est facile et même agréable. Les notes réunies en fin d’ouvrage ne sont pas inutiles. L’enseignant d’histoire pourra y trouver quelques courts extraits pour un cours sur la colonisation.

A travers l’Afrique


La première partie est consacrée à une découverte du Sénégal. De St louis à Kayes on va, avec l’auteur, remonter le fleuve en 1891. Il serait intéressant de comparer ses descriptions des rives (végétation, données climatiques) avec les réalités d’aujourd’hui.

La seconde partie aborde ce que l’auteur nomme le Soudan entre Kayes et Nioro,
actuellement au Mali. Son déplacement est marqué par les ravages de la fièvre jaune qui atteint indifféremment Noirs et Blancs et de la fièvre bovine qui ruine les éleveurs et gène le ravitaillement de la troupe.
Il évoque les combats qui ont peu de temps auparavant opposés Archinard et Samory, ses propres combats et la vie militaire.
Le chapitre consacré aux femmes n’est pas exempt d’un certain racisme. Il permet de constater les différences culturelles entre les ethnies d’origine des spahis et des tirailleurs: comment construire un sentiment d’égalité entre anciens maîtres et anciens esclaves?
Le récit de quelques combats lui donne l’occasion de parler de la bravoure des soldats qui sont sous ses ordres et de rendre hommage à l’adversaire.

Une troisième partie amène le lecteur dans la forêt dense ivoirienne. Nouveaux paysages, inquiétude face à l’inconnu mais aussi découverte en pays Baoulé du vin de palme.

Parti du sud sa mission est de préparer la remontée des troupes vers Fachoda, l’occasion d’évoquer la figure de commandant Marchand et de nous faire traverser le grand marais du Bahr-El-Ghazal (Sud Soudan). Un véritable expédition de découverte qui rappelle qu’à la fin du XIXème siècle l’intérieur de l’Afrique restait bien méconnue

L’épilogue conduit l’auteur devant le Sphinx

Epopées africaines

Ce second ouvrage nous informe , peut-être plus que le premier sur les représentations que les jeunes officiers coloniaux avides de découvertes et sûrs de leur rôle avaient des populations rencontrées: de bons sauvages de grands enfants; un regard au moins paternaliste qui se retrouve à propos du « parler tirailleur » analysé dans la préface de Roger Little voir page XV.

Avec le récit de la capture de l’éléphant l’auteur se laisse aller à des souvenirs très personnels comme aussi le récit du voyage en France de Moussa, son ordonnance qui nous révèle l’étendue de ses préjugés sans que l’auteur n’ait conscience que les effarements de Moussa puisse être l’occasion de s’interroger sur le bien fondé de certains de nos comportements, des scènes qui prête à rire mais de qui?

Le récit des aventures africaines nous renseignent sur les impressions vécues d’un Européen qui pénètre pour la première fois dans la forêt équatoriale pages 66 en suivantes.

La seconde partie est consacrée aux combats de 1893, contre Samory dans une région située aujourd’hui dans le sud du Burkina Faso et le nord de la Côte d’Ivoire sur ces épisodes on pourra se reporter à l’article paru dans la revue historique des armées : La « petite guerre » africaine, entre conquête, contre-guérilla et contre-insurrection (1880-1900) [http://rha.revues.org/7506->http://rha.revues.org/7506]
Outre les aspects militaires le texte nous renseigne sur le sort des populations réduites en esclavage par Samory. Ce récit est comme un écho du sort actuel des populations civiles qui fuient les luttes armées Centrafrique, Sud-Soudan ou Nigéria .

Le récit se termine sur quelques faits d’arme au Tchad, au nord du Liberia et au sud du Sahara.