Passionné par sa région, Amaury Venault livre un deuxième volume d’une saga sur Aliénor d’Aquitaine devenue reine de France, publié aux éditions La Geste, qui entend promouvoir la culture poitevine-saintongeaise entre Loire et Gironde.
Sacré et couronné roi à 11 ans du vivant de son père, Louis VII se marie avec Aliénor d’Aquitaine à Bordeaux le 25 juillet 1137, alors que les époux ont moins de 20 ans selon la volonté du feu Guillaume le Toulousain. Cette union permet au domaine royal un agrandissement sans précédent, une partie du midi et de l’Ouest de la France, de la Méditerranée à l’Atlantique. Du chef de sa femme, Louis VII devrait être un grand roi, à l’instar de Charlemagne ou de Clovis. Il allait reconstituer le royaume des Francs en un État unifié et puissant. Mais l’union des terres ne se fera qu’à la génération suivante. Aliénor reste la duchesse héritière de l’Aquitaine et son mari administre ses états en son nom. L’acte suivant sera la naissance d’un héritier.
Destiné à la carrière monastique, Louis dit le jeune (le cadet héritier de Louis VI) s’avère mal armé pour dirigé un si grand royaume et pour dompter une si belle femme. Béat d’admiration autant pour sa beauté, sa culture et son éloquence que par sa liberté de ton, Louis se trouve contrarié dans son éducation ascétique, où la concupiscence serait ennemie du mariage. Consciente de l’effet qu’elle produit sur son époux, Aliénor symbole du désir, fruit du péché originel, entend bien user de son pouvoir sur le roi, pour se mêler de politique comme l’espère aussi l’abbé Suger (ancien conseiller de Louis VI) présenté ici comme une araignée tissant sa toile dans l’ombre de la cour de France. Ce dernier pressent une révolution de palais lorsque la jeune reine fera connaissance avec Adélaïde de Maurienne, l’exacte opposée de sa belle fille, laide, attrabilaire et acariâtre. A peine le mariage célébré à Bordeaux, marquant la prise de possession du duché d’Aquitaine par une nouvelle dynastie, réunissant les plus grands féodaux, que la mort de Louis VI endeuille la fête. Quand Aliénor découvre Paris devenue centre du royaume, le palais royal a été largement remodelé avec son donjon appelé la Grosse Tour. La reine au tempérament de feu se heurte de suite avec la mère de son époux qui voit en elle une manipulatrice avide de pouvoir. De suite la jalousie et la rivalité s’installent chez celle que l’auteur décrit comme la laideur incarnée. Adélaïde se sent étrangère dans son palais tant les modes poitevines l’investissent (chasses à courre, fêtes dispendieuses avec troubadours et caroles endiablées). Même l’abbé Suger tolère ces fadaises car « Ce qu’il faut avant tout, c’est qu’Aliénor engendre un fils qui fera l’unité du royaume ». Écartée de la cour, la mère du roi doit se retirer dans son fief de Compiègne.
Naïf et maladroit, Louis VII est en extase devant sa reine qui a « le caractère de sa race, née pour commander et dominer », difficile à raisonner, tout feu tout flamme. Cependant le roi garde les conseillers de son père et poursuit d’abord sa politique. Il fait des concessions aux villes en accordant des chartes et favorise l’émancipation des serfs. Sous l’influence d’Aliénor, Louis VII s’oppose à la création de la commune de Poitiers, fief de sa femme où il n’hésite pas à prendre en otage les enfants des bourgeois de la cité. Grâce à Suger, ces derniers sont épargnés mais l’abbé est écarté du conseil.
Toujours pas d’héritier, « le ventre d’Aliénor reste désespérément plat ». Il faut dire qu’en dehors des premiers temps, le roi délaisse la couche de son épouse, épouvanté par les plaisirs charnels. Son éducation rigoriste le pousse à bannir l’amour hors procréation qui ne serait que fornication, ce qui ne peut satisfaire la sensualité de la duchesse d’Aquitaine. Cette dernière doit maintenant compter sur le fondateur des templiers, Bernard de Clairvaux très écouté. Après avoir obtenu la condamnation d’Abélard, le créateur de l’ordre du Temple en 1129, entend influencer la politique royale. Louis VII s’oppose au comte de Champagne et par son intermédiaire au pape au sujet de l’investiture d’un évêque à Langres soutenant le candidat du cistercien. Poussé par sa femme, le roi intervient dans le Toulousain (sans l’appui du comte de Champagne, pourtant son vassal) afin de reprendre le comté, héritage d’Aliénor par sa grand-mère Philippa. Après un long siège devant Toulouse, la tentative de conquête est un échec cuisant. L’année suivante, Louis VII décide d’envahir la Champagne au prix de violences inouïes comme le massacre de 1500 personnes brûlées vives alors qu’elles s’étaient réfugiées dans une église à Vitry-en-Perthois.
A ce drame, s’ajoute une épreuve insoutenable pour un roi dévot. Ce dernier est excommunié par le pape pour avoir intercédé auprès d’évêques afin de faire annuler le mariage de Raoul de Vermandois, sénéchal de France et concubin de Pétronille, sœur d’Aliénor. Lui, fils modèle, élevé à Saint-Denis par l’abbé Suger pour être moine, est aujourd’hui banni de la sainte mère l’Église alors qu’Aliénor n’a toujours pas d’enfant. Comment a-t-il pu en arriver là ? Dieu lui pardonnera-t-il son holocauste à Vitry ? Ces drames hantent la conscience du souverain. Afin de se repentir, Louis VII accepte de mener la deuxième croisade prêchée par Bernard de Clairvaux. Il entend porter secours aux États chrétiens d’Orient menacés par les Turcs. Avec le soutien du pape Eugène III, le roi prend la croix en même temps que de nombreux barons à Vézelay. Entourée de sa cour fastueuse, Aliénor entend participer à l’aventure qui a aussi pour finalité de donner un héritier au couple royal. Partir en Orient ouvre une nouvelle étape aux époux royaux et donne l’occasion à la reine de revoir son oncle adoré depuis qu’elle est petite, Raymond Poitiers, le comte d’Antioche …
Cet ouvrage s’attache à employer des expressions de l’époque aujourd’hui oubliées ou réservées aux passionnés. Ainsi, il plaira aux amoureux du Verbe, des cours de la fine amor de l’Aquitaine, de l’amour courtois et des joutes chevaleresques. Il fera également le bonheur des amateurs de récits de vénerie et d’exploits guerriers.