Depuis quelques années, les éditions Casterman publient régulièrement de nouveaux tomes des aventures d’Alix, confiés à des équipes d’auteurs et de dessinateurs variées. Si cette démarche garantit une certaine diversité, elle s’accompagne souvent d’une qualité fluctuante. Après le succès notable du Bouclier d’Achille, c’est au tour de Valérie Mangin (scénario), Chrys Millien (dessins) et Florence Fantini (couleurs) de reprendre le flambeau. Avec Le Gardien du Nil, quarante-troisième opus de la série, l’intrigue retourne aux racines égyptiennes si chères à Jacques Martin, le créateur d’Alix.

L’histoire

À Rome, Alix et son fidèle compagnon Enak échappent de peu à deux tentatives d’assassinat. Ces incidents éveillent les soupçons d’Alix et le conduisent sur la piste d’un complot mystérieux qui semble trouver ses origines en Égypte. Dès leur arrivée à Alexandrie, le destin des deux héros bascule : séparés et emprisonnés, ils tombent entre les mains de redoutables adversaires.

Enak se retrouve face à un homme énigmatique, mû par une vengeance liée au destin tragique de Sakhara, tandis qu’Alix découvre qu’il a été trahi par des proches en qui il avait toute confiance. Désormais seul, il doit s’allier tant avec de vieux compagnons qu’avec d’anciens ennemis pour tenter de sauver son ami.

Ce retour en Égypte ramène Alix dans la capitale des Menkharâ, théâtre des événements marquants du Prince du Nil. Les souvenirs de cette ancienne aventure résonnent alors tout au long de son périple.

Un album en demi-teinte

Si Le Gardien du Nil débute sur une note prometteuse, avec des tentatives d’assassinat qui semblent annoncer une intrigue captivante, la tension s’amenuise rapidement. Le scénario, largement ancré dans les événements de Le Prince du Nil, s’appuie tant sur cette référence qu’il risque de perdre les lecteurs peu familiers avec cet épisode. L’intrigue manque de surprises et de densité, se contentant d’un déroulement linéaire, sans véritable souffle épique.

Visuellement, l’album souffre également de la comparaison avec les œuvres emblématiques de Jacques Martin. Les dessins de Chrys Millien manquent de la précision et du raffinement qui caractérisaient les planches originelles. Les décors égyptiens, qui devraient être majestueux et immersifs, peinent à imposer leur présence et paraissent parfois ternes ou simplistes. Les couleurs, quant à elles, manquent de subtilité, brisant l’harmonie qui faisait le charme visuel de la série.

Après Le Bouclier d’Achille, qui avait su moderniser Alix tout en respectant l’esprit de la saga, Le Gardien du Nil déçoit du fait d’un scénario et d’illustrations qui ne parviennent pas à insuffler à cette aventure la grandeur des premières heures de la série. On ne peut qu’espérer que les prochains tomes redonneront à Alix toute sa vitalité et sa magie, en renouant avec l’exigence et l’élégance qui ont fait sa renommée.