Déjà présenté par la Cliothèque, Guy Hermet est politologue, enseignant à Sciences-po Paris, à Lausanne, Genève, Bruxelles, Montréal et Bogotá. Son dernier ouvrage traitait du fonctionnement des institutions démocratiques.


Avec ce recueil de citations politiques, Guy Hermet propose un joli voyage dans le temps à partir de personnages très divers ou l’on retrouve aussi bien les grands classiques, comme Aristote, Winston Churchill, ou Antonio Gramsci, que Georges Frêche, cité trois fois, alors que Michel Foucault compte une référence de plus que le turbulent président de la région Languedoc-Roussillon. Il faut reconnaître, que Georges Frêche avait le sens de la formule, en expliquant : « quand je fais campagne, je la fais jamais pour les gens intelligents. Des gens intelligents, il y en a 5 à 6 %, il y a 3 % avec moi et 3 % contre, je ne change rien du tout. Donc je fais campagne auprès des cons et la je ramasse des voix en masse.»
Mais finalement, est-ce que c’est vraiment différent de ce que pouvait penser Winston Churchill lorsqu’il disait : « le meilleur argument contre la démocratie est une conversation de cinq minutes avec l’électeur moyen.» Difficile d’être plus cynique.

Alors, on retrouve dans ce livre des auteurs connus et moins connus, importants et moins importants, avec parfois quelques absences dont on a du mal à penser qu’elles soient le fait du hasard. Comment est-il possible que le philosophe – stratège – chef de guerre – tacticien, Bernard Henri-Lévy ne soit pas cité ? N’aurait-il rien à dire ? En dehors sans doute des caméras de télévision ? D’autant plus qu’ André Glucksman, est cité trois fois… De quoi déclencher quelques aigreurs… Les egos surdimensionnés de quelques stars médiatiques seront un peu blessés, et Guy Hermet se fera quelques inimitiés… Il devrait s’en remettre.

Il est évidemment difficile de rendre compte de cet ouvrage recueil de petites phrases acérées ou d’aphorismes.
Ce qui est sans doute intéressant, en plus de la préface de l’auteur qui décortique les contradictions de la déclaration des droits de l’homme, et qui explique son cheminement vers l’écriture de cet ouvrage impertinent qui pourrait servir à mettre quelques contemporains devant leurs contradictions, c’est sa construction. Assorti de bonnes notices biographiques il est organisé en thèmes qui permettent de trouver très vite des références. Certains choix peuvent être discutés, et peuvent aussi déciller quelques thuriféraires comme les citations de Che Guevara qui justifie les exécutions sommaires. D’autres choix peuvent amener à réfléchir comme cette phrase du premier ministre turc, Recep Tayyip Erdogan, islamiste modéré parait-il : « la démocratie, c’est comme un autobus : une fois qu’on est arrivé où l’on veut, on en descend ».

On trouve aussi ces citations recueillies par le politologue dans les blogs les plus divers, une façon peut-être de rappeler que ce qui est mis en ligne est écrit dans le marbre numérique et qui trouve dans le papier sa consécration n’est jamais perdu pour tout le monde.

Les amateurs seront ravis de retrouver les références de ces compagnons de route, idiots utiles des totalitarismes, avec ce poème de Louis Aragon, Front Rouge édité dans la Pléiade en 1992.

  • « L’éclat des fusillades ajoute au paysage
  • Une gaieté jusqu’alors inconnue
  • Ce sont des ingénieurs, des médecins qu’on exécute
  • Mort à ceux qui mettent en danger les conquêtes d’octobre
  • Mort aux saboteurs du plan quinquennal »

Ce livre permet donc un beau voyage dans le temps et pourra sans doute inspirer bien des débats et des échanges. Si tant est que nous puissions encore en avoir sur fond de sinistrose. Dans ce cas, ces salutaires saillies seront de circonstance.

Bruno Modica ©