L’aventure de l’archéologie en 14 découvertes majeures : telle est l’accroche de ce très beau et très bon livre des éditions Gallimard. Il invite le lecteur à un tour du monde des civilisations sous un angle original.

Anne Rose de Fontainieu, docteur en archéologie précolombienne, a fouillé dans plusieurs endroits comme l’Amérique du sud ou le Proche-Orient. Elle s’intéresse depuis plusieurs années au public jeunesse comme en témoigne une série de biographies archéologiques en bande dessinée. Elle est aussi la conceptrice de l’application i pad pour le musée du Louvre. Aurore Callias, quant à elle, a déjà illustré plusieurs ouvrages. Deux grandes parties composent le livre, à savoir ces récits de découverte, mais aussi un index plus classique d’une centaine de pages.

Un angle original : restituer la découverte

L’angle choisi par le livre permet de renouveler une approche des civilisations et en même temps de réparer un oubli, à savoir faire revivre le moment des découvertes effectuées par les archéologues. Il s’agit donc clairement de donner une place à l’émotion de ce moment unique. Cela permet vraiment une autre approche des civilisations qui redonne sa place à l’humain dans l’histoire. Certes, on retrouve des grands noms attendus comme Schliemann pour la Grèce ou encore Evans pour la Crète, mais d’autres sont sans doute moins connus. On peut à cet égard citer la découverte liée aux Vikings. C’était en 1903, et un paysan vint alors voir un professeur parce que sur ses terres se détachait un monticule qu’il avait décidé de déterrer. Se souvenant d’une précédente découverte effectuée dans la région, il avait décidé d’alerter le scientifique. Ils tombèrent alors sur une construction en bois qui s’avéra être un bateau. Les Vikings, en effet, enterraient leurs morts dans leurs navires. L’argile qui recouvrait l’ensemble l’a préservé pendant des siècles offrant aux archéologues des informations exceptionnelles sur les rites des Vikings.

Une organisation très claire

Une carte et une frise forment l’ouverture et la fermeture du livre pour se repérer. Chaque découverte a droit à une douzaine de pages, toutes clairement organisées avec titres et sous-titres. Des astérisques proposent dans chaque chapitre des renvois aux définitions du dictionnaire. Si nécessaire, quelques autres définitions sont situées sur le côté du texte. Dans les articles existent aussi des petits encarts qui font le point à l’issue d’un raisonnement : ils sont clairs et bienvenus. Dans la seconde partie de l’ouvrage sont signalées les pages où l’on peut lire les récits correspondant aux termes abordés. Plusieurs chapitres correspondent aussi au programme du collège et intéressent directement les enfants.

Un plaisir pour les yeux

Il faut dire à quel point la mise en images et en pages est particulièrement soignée et agréable. Disons-le sans détour, elle m’a particulièrement séduite ! Il s’agit parfois de mélanges d’images de différents genres, sorte de collages tous plus inventifs les uns que les autres. Chaque récit de découverte débute d’ailleurs par une illustration pleine page sur la gauche. Incontestablement, cette réussite graphique participe de l’intérêt pour le livre. Les enfants aussi remarquent le côté très attractif de l’ouvrage. Du coup, la partie dictionnaire apparait un peu plus triste car un dessin marque seulement l’apparition d’une nouvelle lettre du dictionnaire.

Que d’apports grâce à l’archéologie !

Après un bref récit de l’histoire de la discipline, l’auteure entre dans le vif du sujet avec les origines de l’homme. Chaque récit est balisé d’abord par une carte et une datation qui permettent de savoir où et quand on se situe par rapport au contenu de la découverte. Logiquement, le livre balaie un certain nombre d’incontournables. Parmi eux, les origines de l’homme ou encore les Egyptiens. C’est l’occasion de côtoyer Auguste Mariette ou Carter. Le premier découvrit en 1850 un site oublié et consacra dès lors sa vie à l’Egypte. C’est lui le fondateur du premier département des Antiquités égyptiennes et il joua un rôle important pour réduire le pillage systématique des sites. L’auteur propose une revue des grottes ornées qui nous emmène de Lascaux à Cosquer et jusqu’à Chauvet. Un dessin explique d’ailleurs très clairement le site de la grotte Cosquer ce qui aide à mieux comprendre sa découverte tardive.

Le souci d’un texte de qualité

L’ouvrage est particulièrement intéressant aussi sur le fond quand il montre par exemple que la science avance par à coups, à force d’hypothèses. A plusieurs reprises, sont signalées les interprétations possibles sur tel ou tel sujet. Elle aborde notamment une question décisive :  » pourquoi peindre dans les grottes ? « . De façon très pédagogique, Anne Rose de Fontainieu passe en revue les quatre explications majeures. Le texte est clair et les enfants le comprennent sans souci.
Le livre insiste aussi sur l’importance de la construction historiographique dans un sujet comme les Celtes. Il remet aussi en valeur les Gaulois et leur savoir à travers le travail de l’acier ou autour de l’agriculture, traduisant ainsi le résultat des recherches archéologiques récentes.
On pourra pointer des manques, comme avec les apports de l’archéologie autour de la guerre de 14, mais Anne Rose de Fontainieu ouvre néanmoins l’esprit de son lecteur à des chemins moins balisés, comme les maisons de pierre de l’Afrique australe entre le Xème et XVème siècle.

Un dictionnaire qui ouvre des perspectives

Dans la partie dictionnaire sont définies des notions en rapport avec des civilisations, des espaces ou des lieux qui ne sont pas forcément l’objet d’un des 14 récits. Cela permet certes d’élargir le champ des thèmes et lieux traités, mais se révèle aussi frustrant de ne pouvoir rien lire en rapport avec. Sur les méthodes de l’archéologie, on trouve plusieurs articles, mais celui sur l’archéobotanique soulève beaucoup de questions, de problématiques, mais ne nous dit rien finalement sur des exemples concrets d’apports, ce qui est dommage. Pour le reste pourtant, le tour est assez large avec des définitions d’archéomagnétisme ou encore d’archéozoologie.
Copan se révèle à la lecture de l’article qui lui est consacré comme un site intrigant, car c’est là qu’aurait été inventé le calendrier maya. Les découvertes sont, on le voit, nombreuses : citons aussi les géoglyphes de Nazca, les informations sur les Khmers ou Pedra Furada, vaste abri sous-roche orné de peintures rupestres au Brésil.

Saluons avec cet ouvrage une vraie réussite qui mêle le plaisir des yeux à l’émerveillement de la découverte. Donnant sa place aux hommes, il se révèle être un vrai plaisir de lecture, nous entrainant vers une approche et une connaissance de grandes civilisations.

Jean-Pierre Costille, avec l’aide de Clara © Clionautes.