Repéré en avant-première lors du FIG de Saint-Dié 2016, cet atlas du monde réalisé par deux éditrices, une illustratrice et une cartographe s’affiche comme un produit résolument différent de ce qui se fait en la matière tant sur la forme (format à l’allemande de 29,7 x 42) que sur le fond (les planches sont problématisées).

Si l’œil est d’emblée attiré par des graphismes très réalistes, la rigueur du propos n’est pas en reste et c’est sans doute dans cet équilibre que réside la force de l’ouvrage. Les légendes, finement dosées, sans trop d’indicateurs, sont présentes à la fois dans le cartouche habituel mais également dans le texte qui accompagne chaque planisphère. De quoi faire les bons allers-retours écrit/image pour s’imprégner du propos efficacement.

Après rappel clair des types de projection (pour expliquer que les planisphères ne seront pas toujours centrés sur l’Europe), ce sont de nombreux points de réussite qui sont à souligner : une analyse de la répartition de la population pas trop déterministe, une mise en nuance de la notion de richesse avec l’IDH, une volonté d’aborder les questions « socialement vives » que sont les religions, la sécurité, les droits de l’homme ou encore la pollution.

Les trouvailles esthétiques sont nombreuses elles aussi : le fond de carte Seyes pour le thème de l’éducation, les oléoducs en forme de pistolet à essence, les postures de la prière et tant d’autres.

On pourra peut-être se montrer plus réservé sur quelques choix : si les cochons tirelire du Brésil, de la Russie, de l’Inde ou de la Chine sont dessinés pour botter les fesses de leurs pauvres et qu’il n’est en pas de même dans nos pays occidentaux et européens, cela signifie-t-il que nous sommes exemplaires en la matière ? De plus, l’utilisation de moyennes nationales laisse parfois de drôles d’impressions : la carte sur la criminalité montre une Amérique Centrale et du Sud très peu sécurisante. Quelques cartes sont parfois un peu chargées également.

Enfin, on appréciera l’humour présent tout au long du propos (ces petites pieuvres qui y vont de leur commentaire à chaque analyse) et on s’étonnera, sans doute avec malice, de quelques pratiques de nos concitoyens du monde : ce sport afghan qu’est le bouzkachi qui consiste à se renvoyer une chèvre morte ou encore ce dancefloor énergétique néerlandais qui permet de danser en toute autonomie !

Un bien bel objet en définitive qui bouscule les codes du genre avec brio : sans doute un beau cadeau de Noël dans un premier temps et peut-être un outil pour accompagner l’enseignement de la géographie à plus long terme.