L’introduction part de l’incontournable définition de la guerre de Carl Von Clausewitz et rappelle le besoin de bien préciser le contexte et l’époque. Il souligne aussi que les conflits ont changé. Comme à chaque fois, la conclusion des grandes parties fait le lien avec la partie suivante et dégage les idées forces du chapitre qui s’achève.
Une grille d’analyse
Cette première partie, d’une quinzaine de pages, propose sept entrées, comme autant de grilles de lectures géopolitiques, illustrées à chaque fois d’un cas précis. Il y a d’abord l’indispensable notion d’échelle, avec l’exemple du conflit syrien. Ensuite, l’auteur insiste sur la question des représentations des acteurs et l’illustre à travers le cas de la Géorgie. En quelques paragraphes sont ainsi précisées la vision géorgienne et la vision russe du conflit. L’auteur souligne que l’un des principaux problèmes aujourd’hui est le maintien de la paix. La carte de la page 17 en donne un état des lieux actuels. On voit également l’évolution des territoires de conflit à travers l’exemple de l’Irak, de la Syrie, ou de la Libye. Un graphique sur l’évolution du nombre de morts entre 1946 et 2009 souligne le poids et les dégâts humains des conflits intra étatiques.
Alternant les cartes à toutes les échelles et les graphiques, cette première partie marie très habilement les données générales, aidant à penser le monde, et les exemples concrets pour incarner ces clés de lecture.
Anciens et nouveaux acteurs
Cette partie débute par une réflexion sur l’arrivée de nouveaux acteurs avec une double page qui s’interroge sur « les Etats- Unis sont-ils encore une hyperpuissance ? ». On peut rappeler qu’ils disposent actuellement de 350 000 soldats répartis sur près de 130 pays. Une carte actualise la logique américaine avec une carte intitulée « les Etats Unis face à la Chine en Asie ».
Les stratégies de sécurité ont changé d’échelle : elles hésitent aujourd’hui entre l’international et le régional. L’auteur prend l’exemple de l’ONU pour le premier cas, mais aussi des alliances militaires régionales pour le deuxième volet. Ce qui a changé au cours du temps, c’est le fait que les victimes sont de plus en plus des civils. L’ouvrage aborde aussi le cas des réfugiés en donnant quelques chiffres bruts : en 2012, plus de 7,6 millions de personnes ont été contraintes à quitter leur foyer du fait de conflits.
Le livre s’intéresse également aux enjeux géopolitiques locaux avec une carte consacrée au Mali. Pour penser le monde actuel, il faut actualiser les concepts comme en témoigne l’idée de « zones grises ». La page 40 propose un document sur les Etats défaillants. La partie se conclut sur la piraterie et rappelle que, parmi les explications du retour du phénomène, il y a l’augmentation des flux de marchandises mais aussi l’ aggravation des inégalités économiques.
Régions sous tension et lieux en guerre
Ici, l’auteur met l’accent sur trois phénomènes, à savoir l’analyse régionale, le grand jeu des puissances et l’importance des facteurs locaux. Il explicite les logiques de la Russie et de la Chine. Il se focalise ensuite sur quelques zones comme l’Asie du sud-est et insère des éléments d’actualité avec le devenir incertain du printemps arabe. Variant les échelles, le livre propose d’aborder le cas du tramway de Jérusalem (page 66) et montre comment on peut conquérir en aménageant.
Guerres de demain
Cette dernière partie se veut davantage un exercice de prospective. Parmi les enjeux de demain, il y a celui de la maitrise de routes de transit. Deux exemples sont détaillés, dont le détroit de Malacca. Celui-ci s’étend sur 800 kilomètres et permet l’accès à Singapour, deuxième port mondial de conteneurs en terme de tonnages exportés. Autre risque majeur pointé par l’auteur, la balkanisation du monde avec une proposition cartographique des lieux qui pourraient être touchés. Un flash est fait sur le Sahara occidental, ce conflit toujours pas réglé depuis plus de trente ans. Une carte permet de s’interroger sur les guerres climatiques avec la localisation de cinq endroits potentiels et des menaces afférentes. La question des médias est aussi abordée car leur contrôle est un enjeu majeur, comme le montre le cas de la Libye. Le tour d’horizon se termine par le cyberespace.
En conclusion, l’auteur rappelle le lien entre un conflit et son époque. Le conflit a aussi des répercussions, et les technologies jouent un rôle de plus en plus important. Tout ceci débouche sur l’idée que « guerre et conflit se présentent comme des phénomènes multidimensionnels ».
A la fois pour sa culture personnelle et pour les cours, cet ouvrage se révèle très utile, fourmillant d’approches et de documents qui ne demandent qu’à être traduits en applications pédagogiques.
© Jean-Pierre Costille pour les Clionautes.