1908, la première puissance mondiale accueillait des JO balbutiants; 2012, devenu membre de l’UE et une puissance moyenne, le Royaume-Uni s’apprête à accueillir l’évènement planétaire que sont devenus les Jeux Olympiques. Le Royaume-Uni n’est donc plus ce qu’il était tant en interne qu’à l’extérieur de ses frontières, voilà résumé l’introduction de cet atlas co-écrit par Mark Bailoni, maître de conférences à Nancy II et Delphine Papin, enseignante à Sciences-Po Paris.

A quoi ressemble le Royaume-Uni en 2009?

C’est ce à quoi les deux premières parties tentent de répondre. Plusieurs siècles furent nécessaires à la construction, fort bien illustrée par cartes, textes et frise chronologique, du Royaume-Uni que les auteurs prennent soin de différencier des îles britanniques, de la Grande-Bretagne et de l’Angleterre. Cet édifice s’est cimenté autour de symbôles et valeurs, dont bien sûr la royauté, mais n’a pas occulté ceux et celles des Nations voir des groupes, le composant. Les développements sur la citoyenneté britannique sont l’occasion pour le lecteur de découvrir ce qui la différencie de la nôtre en termes de contenu et d’exercice.

Mais ces facteurs d’union ne peuvent cacher un certain « éclatement » du Royaume-Uni étudié à plusieurs échelles. A l’échelle du royaume, les déséquilibres économiques (voir Claude Mangin, « Le Royaume-Uni », http://www.clionautes.org/?p=1116) se trouvent résumés dans l’expression « Angleterre et les autres » sauf que la première, au-delà de l’opposition traditionnelle Nord/Sud (Géocarrefour, « Mutations et inerties spatiales dans le Royaume-Uni d’aujourd’hui », http://www.clionautes.org/?p=2259), présente un visage plus contrasté que cette bipolarité, carte des inégalités de revenus à l’échelle locale à l’appui.
Politiquement, si conservateurs et travaillistes dominent l’échiquier politique et ont une implantation territorialement bien identifiée, localement, la concurrence des libéraux-démocrates et des partis nationaux (Plaid Cymru, SNP) se fait sentir.

A l’échelle des Nations, des mouvements revendiquent ou l’indépendance pour le SNP ou cherchent à défendre, promouvoir une langue, une culture (Plaid Cymru, Mouvement nationaliste cornique). Mais certaines de ces organisations s’appuient soit sur une base relativement étroite soit ont un objectif invalidé par l’opinion publique. Le cas Nord-Irlandais est particulier; les « troubles » sont officiellement terminés, malgré la dérive mafieuse de quelques groupes extrémistes, mais les communautés restent toujours aussi éloignées alors que leaders catholiques et protestants collaborent au sein des instances gouvernementales.

Le Royaume-Uni et le monde

Que reste-t-il de l’immense empire britannique? Peu de choses en fait si ce n’est ces quelques « poussières » ou « confettis » dont le rôle dépasse le seul aspect symbolique: Gibraltar, point de passage stratégique, Diego Garcia et sa position idéale dans l’océan indien, héritages d’un ensemble « sur lequel le soleil ne se couchait jamais ». Dirigé avec l’aide des élites locales, démembré en douceur après la seconde guerre mondiale, le souvenir de l’empire survit d’une certaine façon par l’intermédiaire du Commonwealth (http://www.thecommonwealth.org/): la reine reste (symboliquement) au sommet, mais la grande famille anglophone, dont le poids politique est inversement proportionnel au nombre des habitants qu’elle rassemble, ne fait guère parler de lui si ce n’est dans les rubriques sportives des quotidiens lors des jeux du Commonwealth.
Héritage bien plus visible, la présence de minorités, principalement asiatique et noire, dans le royaume à l’origine d’un multiculturalisme (étudié par Delphine Papin dans sa thèse, « Politiques urbaines et multiculturalisme en Angleterre. L’exemple du quartier de King’s Cross à Londres ») qui ne va pas de soi et a réveillé une identité anglaise que le personnage de Combo de « This is England » illustre bien.

Naguère au centre du monde, le Royaume-Uni, depuis la seconde moitié du XXème siècle, mais dès 1940 en fait, est dans une sorte d’entre-deux, entre Amérique, le grande large, et Europe. Sa politique extérieure a en quelque sorte rejoint sa position géographique: entre Amérique et Europe bien qu’il soit plus proche géographiquement de la seconde et souvent plus sensible aux options politiques de la première parfois au détriment de son image dans le monde (l’intervention en Irak).
Souvent présenté comme le vilain petit canard de l’UE, souvent perçu en France à travers une série de clichés(dir Jean-Marie Le Breton, « France et Grande-Bretagne: mythes et préjugés » http://www.clionautes.org/?p=1479), le Royaume-Uni n’est pas, pour les auteurs, le frein au développement de l’UE si souvent décrit mais plutôt un pays défendant une certaine vision de l’Europe, plus économique que politique; de la même façon, Delphine Papin et Mark Bailoni soulignent la densité des échanges entre les deux côtés du Channel: industriels, touristiques, linguisitiques au-delà des à-priori populaires.

Le Royaume-Uni, une puissance?

Ou le Royaume-Uni est-il encore une grande puissance? Peut-être pas mais il peut s’appuyer sur un hard power et un soft power qui font de lui un pays avec lequel il faut compter. Parmi les éléments traditionnels de la puissance, son armée, bien qu’ayant des effectifs réduits, est reconnue pour sa compétence et son efficacité. Active dans la recherche d’une solution au Proche-Orient, présente sur tous les continents par le biais de l’APD, la diplomatie britannique garde toutefois les stigmates des engagements irakien et afghan. Son économie, elle, profondémment tertiarisée, et spécialisée dans la finance, donne au pays une place non-négligeable dans l’économie mondialisée.
Plus diffus mais non moins importants, l’omniprésence de l’Anglais, encore accrûe par Internet, l’innonvation technologique, et l’attractivité touristique, participent aussi au rayonnement du pays. On est ainsi surpris, peut-être suis-je victime d’un cliché, d’apprendre que le Royaume-Uni est la 6ème destination touristique mondiale, cette activité représentant plus de 6% du PIB et s’appuyant sur une offre conséquente d’espaces protégés (tourisme vert), des musées de renommée mondiale (British Museum, musée accueillant le 2ème plus grand nombre de visiteurs) et la multiplication des séjours à but linguistique.

Pour affirmer sa place dans le monde, le pays possède un atout de choix, Londres, l’une des trois « villes globales ». Un PIB supérieur à celui du Portugal, la présence de la City (dont le poids démographique et la superficie au sol n’illustrent en rien l’influence dans le domaine de la finance) ne sont que deux exemples de ce qui fait de la capitale le coeur du pays, une capitale dont le dynamisme s’observe dans les différentes opérations immobilières destinées à rénover des quartiers.
Les exemples des Docklands, de la South Bank et bien sûr de Stratford sont développés plus particulièrement. Stratford, située dans l’Est londonien, est un ancien quartier industriel choisi pour accueillir les JO de 2012 (http://www.london2012.com/plans/index.php), bénéficiant de nombreuses voies de communication rapides pour amener athlètes et spectateurs de l’extérieur et vers les autres sites. Seulement, comme souvent, le budget de départ, présenté au CIO, explose et son exécution se fera au détriment d’autres programmes, pour que Londres et le Royaume-Uni puisse relever ce nouveau défi.

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